«La langue est devenue un cheval de Troie idéologique»
ENTRETIEN – L’auteur dénonce la manipulation des paroles du débat public à des fins idéologiques, favorisée par la « colonisation linguistique » anglo-saxonne. Elle déplore également le « lexique mou » des élus et appelle à reprendre la main sur le vocabulaire.
Rachel Khan est avocate, scénariste, actrice et écrivaine. Elle est l’auteur de Encore éveillé. La République à l’épreuve des mots (L’Observatoire, 2024).
LE FIGARO. – Dans votre nouveau livre, vous établissez un état des lieux de la République à travers sa langue. Selon vous, cette dernière est-elle en danger ?
Rachel KHAN. – Certainement, parce que la langue de la République est devenue un cheval de Troie idéologique. Sa manipulation par des dogmes le détourne de sa fonction première pour en faire une arme au service de ceux qui cherchent à défaire l’unité de la nation. Alors qu’une langue est censée véhiculer nos propres pensées afin de mieux communiquer, de nombreux idéologues tentent aujourd’hui de nous définir eux-mêmes. Leurs étiquettes ne servent en réalité qu’à nous garder comme cibles. Après la publication de Racé (2021), dans lequel je dénonçais déjà les mots qui séparent, on me disait par exemple que je suis « clivant », voire « d’extrême droite ». Cherchant à me disqualifier…