Top 14 – Montpellier – Perpignan ou quand la glace rencontre le feu
Le duel entre Héraultais et Catalans fait l’objet de discussions dans les chaumières depuis de nombreuses semaines pour diverses raisons. Si la notion de derby ne sera pas la caractéristique principale des débats, c’est une véritable confrontation des styles à tous les niveaux qui aura lieu au GGL Stadium.
Si l’ambiance risque d’être assombri par d’éventuelles averses prévues le jour de la rencontre, cela ne suffira pas à éteindre toute la passion entourant le combat qui s’approche. Sur le terrain comme dans les tribunes. Lorsque deux éléments (ou trajectoires) contraires se heurtent, l’assurance d’un scénario alambiqué reste envisageable. Deux clubs avec des histoires insolites quelque part, deux visions aussi. Ce Montpellier/Perpignan présente quelques disparités historiques, culturelles et philosophiques. Question originale avec un MHR très récent dans sa création, et un Usap dont le parcours est presque intemporel. Laurent Arbo, qui a joué et entraîné dans les deux clubs, connaît parfaitement le contexte.
L’actuel préparateur physique des Montois pose un regard précieux sur le contexte : « L’Usap est le club phare de la région, qui éclaire tout le territoire. La passion débordante autour du club est incroyable. Puis on retrouve les racines de l’entité jusqu’aux entraîneurs. Cela n’a pas été perdu avec Patrick Arlettaz qui était encore peu de temps en charge loin de là, mais actuellement, pour avoir une maîtrise totale des émotions, c’est un plus d’avoir des garçons qui ont été immergés dans ce milieu. » Les souvenirs revenant, il ajoute :« On peut vite se laisser engloutir par tout ça, je me souviens des moments de la phase finale où ça t’emporte, mais ça t’effraie aussi. » Une sorte de soutien mental, permettant d’anticiper toutes les considérations habituelles.
Montrer le rugby versus le rugby passion ?
L’ancien ailier aux 100 essais inscrits dans l’élite raconte son expérience à Montpellier :« J’ai vu la fin du Stade Sabathé. Montpellier, déjà avec Patrick Arlettaz mon ami catalan, avait envie de construire et de monter en Top 14. J’y ai fait 4 belles saisons. C’était un club jeune, avec un projet intéressant. Au final, je conclus que Perpignan est un club très familial, avec une certaine pression sans plus. A l’opposé de Montpellier, où on sait qu’il y a maintenant de gros budgets et où l’investissement est énorme et je dirais que la pression est grande. plus palpable. » Dans le registre des joueurs des années 2000-2010, Julien Tomas, ancien demi de mêlée et entraîneur du club des Cistes, est un témoin incontournable de l’ambiance montpelliéraine.
« Avec le renouvellement 5 étoiles du staff, il y a eu un électrochoc. C’était positif, mais d’autres se sont réveillés aussi. Cette position de barragiste, ça faisait longtemps que le club n’avait pas vécu ça. Niveau confiance, ce n’est plus pareil. Il faut sauver le MHR et je pense que le match contre Perpignan n’est pas loin d’être le match de l’année. » il a dit. Avec un parcours incroyable à accomplir pour les troupes de Patrice Collazo aux profils pas forcément habitués à ces jeux-là, il poursuit :« Au final, il n’y a pas de surprise. Cela fait un moment qu’ils se battent dans ces domaines-là, les cerveaux sont forcément passés en mode survie, pas le choix. Face à des Catalans qui, selon lui, relancent :« La ferveur bien sûr. Le stade sera plein à craquer, c’est rare par ici. A Montpellier, c’est un peu différent. Le rugby se vit comme un spectacle, où on fait quand même généralement de bonnes saisons. »
Révéler les couleurs ?
Au fil des fréquentes et nombreuses retrouvailles entre les deux cercles, une richesse d’anecdotes alimente la chronique. Pourtant, celle de février 2019 retient l’attention. Alors que les Cistes visaient une énième qualification, Perpignan vivait une saison cauchemardesque. Revigoré ce jour-là, alors que les Sang et Or n’avaient remporté que deux victoires dans la saison, l’Usap s’est imposé sans débat contre le MHR (10-28). David Mélé, alors titulaire, n’a pas oublié : «La saison a été tellement difficile. Avec cette rivalité pseudo-géographique, il fallait être solidaires pour rester le plus longtemps possible dans le match. Nous recherchions notre premier succès et nous voyions des regards en face sans solutions. C’était un moment agréable, car on proposait du rugby complet. » Si les situations sont aujourd’hui différentes et les rôles presque inversés, l’ancien demi de mêlée de l’Usap s’étonne que l’on découvre l’aspect époustouflant de la Catalogne.
Il explique:« Cette passion existe depuis des décennies. Ce n’est pas un mythe et j’ai l’impression que tout le monde ne s’en rend compte que maintenant. Dans les bons comme dans les mauvais moments. D’ailleurs si les chiffres annoncés de supporters qui feront le déplacement sont exacts, ayant connu 500 Les Catalans vous soutiennent là où c’était fabuleux, j’ai hâte d’observer le bruit qu’ils sont capables de produire. » Sans tomber dans une opposition facile et dénuée d’explications, l’actuel responsable de la technique individuelle du Stade toulousain relève de subtiles contradictions :« Juste les couleurs ! Le côté stoïque de Montpellier face à la fureur catalane. C’est comme ça que je me sens.« Question de perception, du côté où l’on peut se retrouver, et de l’expérience emmagasinée entre les deux entités.
« Un club si spécial »
Le décor est véritablement planté. La transhumance catalane est irrésistible et semble vouloir tout chambouler sur son passage face à une équipe héraultaise qui voudra à tout prix se remettre sur les rails. Pour l’ancien international Guilhem Guirado qui n’a connu que ces deux équipes dans sa carrière au RC Toulon, la lutte sera extrêmement rude :« Il ne faut pas négliger la construction de Perpignan cette saison, où modestie et humilité vont de pair pour avancer malgré tout. Aucune effervescence de leur côté, la pratique du rugby offensif, très agréable, fait plaisir à regarder. Ils ont confiance, on sent qu’ils s’amusent et qu’ils s’amusent ensemble. » Une tendance paradoxale pour le MHR qu’il tente d’expliquer avec lucidité :« Très compliqué, une éviction d’un entraîneur. Pour démarrer, il y a eu un retard d’éclairage. Depuis leur déroute à Toulon, ils enchaînent les contre-performances. Alors évidemment, l’état d’esprit est différent, et Montpellier doit se préparer. pour ce lieu potentiel de barrière. »
Onze points séparent les deux groupes, synonymes d’itinéraires bien distincts. Si Montpellier souhaite éviter de vivre un match d’accès que les Perpignanais connaissent trop bien, la réussite sera indispensable afin de ne pas se laisser distancer par la concurrence. Ce n’est pas l’affaire des Catalans, surfant sur une dynamique exponentielle, et qui par succès s’achèteraient la voie du maintien et regarderaient vers le haut avec cupidité. L’un des acteurs de la rencontre, l’arrière Louis Dupichot, donne sa version :« Nous irons à Montpellier pour jouer notre rugby, et nous concentrer uniquement sur notre jeu avant tout. Je pense que l’Usap est tellement différent. Depuis mon arrivée, j’ai fait le point sur le lieu où je me trouve. L’identité est très forte en Catalogne, l’attente est immense. Le pain noir a été mangé et tout le monde veut revenir aux bonnes choses vécues auparavant. Réponse vers 19 heures ce samedi pour connaître le verdict.