La vie de DJ Mehdi, un mélomane visionnaire et hors du commun au destin tragique
MC Solaar l’a décrit comme un « perfectionniste en freestyle »DJ Mehdi, jeune banlieusard d’origine tunisienne, est l’un des ambassadeurs de la French touch – la musique électronique créée à partir de samples – aux côtés de Cassius, Daft Punk ou encore Justice. Doté d’une oreille hors du commun, il déniche les meilleures boucles musicales dans une très grande variété de vinyles. Avant de rejoindre le mouvement électro et d’en devenir l’un des pionniers, DJ Mehdi a épousé le rap pour le réinventer. Il a commencé seul dans sa chambre d’adolescent avec un sampler qu’il a bricolé lui-même : Mehdi Favéris-Essadi, de son vrai nom, est un mélomane autodidacte.
Il n’a que 13 ans lorsqu’il rencontre le rappeur Kery James. Ensemble, ils se font connaître, notamment avec leur groupe Idéal J, formé en 1992. Mais à cette époque, la culture hip-hop est encore regardée d’un mauvais œil : « Le rap n’était pas très connu, c’était de la musique de rue et elle était associée à la violence »dit la mère de Mehdi dans cette série hommage en six épisodes.
Un transmetteur sonore entre rap et électro
Les radios refusent de diffuser leurs morceaux et leur producteur veut les transformer en produits commerciaux. Pour DJ Mehdi, ces concessions sont impossibles. Il n’oublie pas d’où il vient. Dans des images d’archives, il décrit son appartenance à la première famille noire de Gennevilliers, dans la banlieue ouest de Paris. « Ils sont arrivés en 1964 de Tunis. Les services sociaux ne savaient pas quoi faire, alors ils ont rebaptisé mes proches pour leur donner des noms français. » Quelques années plus tard, il devient l’un des piliers du groupe Mafia K’1 Fry et collabore avec les plus grands noms – Diam’s, Mc Solaar, Rim’k, Akhenaton… – dont certains parlent encore aujourd’hui.
Il est le premier artiste français à avoir fait ce grand saut entre le rap et l’électro. Deux univers qui semblent tout opposer, engagés dans une guerre froide qui ne dit pas son nom. Alors que le rap est encore à cette époque associé à la musique de quartier, le mouvement électro, très visuel, représente en partie la communauté queer issue de milieux favorisés. Mais pour Mehdi, ces frontières n’existent pas lorsqu’il s’agit de créer. Et c’est dans ce sens qu’il compose, en collaboration avec le duo Cassius, pour MC Solaar. Le manager de Daft Punk, Pedro Winter, devient alors le sien et lui ouvre les portes de la scène house élitiste. Il témoigne pour la série et s’amuse à décrire DJ Mehdi comme « bogue de l’an 2000 « .
Le nom de DJ Mehdi, décédé en 2011 suite à une chute, continue de résonner avec respect et unanimité, dans la culture hip-hop autant que dans le mouvement électro, deux cultures aujourd’hui connectées grâce à lui. Riche en archives et brillamment produit, DJ Mehdi : fabriqué en France a également été lauréat de la meilleure série documentaire à Cannes Séries 2024. Un très bel hommage à ce mélomane sans limite, qui a osé briser les codes sociétaux pour servir son art.
DJ Mehdi : fabriqué en FranceArte.tv.
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