« Il ne s’agira plus tant d’éviter la pollution que de garantir notre approvisionnement en ressources stratégiques »
AAu fil des années et des campagnes de communication, le tri des déchets est devenu un geste citoyen pour la plupart des Français.
Derrière ce geste, toute une logistique déployée par les collectivités locales permet aux industriels organisés par filière (pour les emballages, les équipements électriques et électroniques, les jouets, les meubles, les articles de sport, les médicaments…) via une entreprise (appelée « éco-organisme ») de récupérer leurs produits en fin de vie pour assurer leur recyclage.
Ces filières dites de « responsabilité élargie du producteur » (REP), créées dans les années 1980 pour améliorer la gestion de nos déchets selon le principe du « pollueur-payeur », sont aujourd’hui confrontées à de nouvelles urgences qui ne sont plus seulement écologiques, mais aussi… stratégiques.
En effet, les produits que nous utilisons au quotidien, y compris nos équipements électroniques, contiennent des matières stratégiques que nous n’avons pas sur notre territoire ou qui sont particulièrement chères à acquérir. L’Union européenne a défini une liste de trente-quatre de ces matières premières critiques, des terres rares à certains métaux spécifiques, mais aussi des plus courants comme l’aluminium, le nickel et le cuivre, dont les besoins croissent rapidement.
Concernant ce dernier métal, nous allons bientôt nous retrouver face à un déficit définitif de disponibilité qui ne fera que s’aggraver face à l’explosion de la demande due à l’électrification massive, notamment de la mobilité, alors que son extraction comme son recyclage stagnent. Relever ce défi sera sans doute l’une des conditions de réussite de nos politiques de transition énergétique. Pour y parvenir, repenser le système REP est devenu un impératif majeur car, désormais, il ne s’agira plus tant d’éviter la pollution par les déchets que de garantir nos approvisionnements en ressources stratégiques.
Système logique et inefficace
Administrées par des industriels contraints par les lois du marché d’assurer leur développement et leur rentabilité, les filières REP ont la vocation paradoxale d’organiser la réduction de leur consommation de matières premières et d’énergie et, in fine, de la production de leurs propres produits manufacturés ! Deux objectifs parfaitement contradictoires qui tendent à privilégier la continuité de la production de masse d’objets fabriqués pour être recyclés avec les seuls matériaux intéressants à récupérer par les éco-organismes.
Bien que parfaitement logique, ce système est aussi parfaitement inefficace lorsqu’il s’agit de transformer notre modèle vers plus de sobriété, comme le démontre le rapport « Performance et gouvernance des filières à responsabilité élargie des producteurs » remis par l’Inspection générale des finances (IGF) au gouvernement en juin : 40 % de la provenance des produits couverts par les filières REP n’est toujours pas captée et à peine 50 % des déchets collectés sont effectivement recyclés.
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