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Avec son projet de loi agricole, le gouvernement prend le risque de ne pas mettre un terme à la crise

DENIS CHARLET / AFP Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture, au congrès de la FNSEA le 28 mars.

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Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture, au congrès de la FNSEA le 28 mars.

POLITIQUE – Un risque de rake. Après des manifestations dans toute la France et un Salon de l’Agriculture chaotique pour le président de la République, le gouvernement présente enfin, ce mercredi 2 avril, son projet de loi d’orientation de la souveraineté agricole et du renouvellement des générations. L’objectif est de mettre un terme définitif aux troubles environnementaux. Mais c’est loin d’être gagné.

Tout a commencé en 2022 avec une promesse de campagne d’Emmanuel Macron sur une grande loi agricole. L’objectif est de répondre au problème du renouvellement générationnel, à l’heure où un tiers des agriculteurs prendront leur retraite dans la prochaine décennie, selon les estimations du ministère de l’Agriculture. Le texte se concentre ensuite sur l’orientation, la formation, la transmission et l’installation avec la création d’un « baccalauréat agro » niveau bac+3 et d’un « France Service agriculture », guichet unique pour faciliter les échanges avec les porteurs de projets.

Mais le calendrier initial – une loi pour le premier semestre 2023 – échoue. Le retard s’accumule et la colère avec. Le gouvernement rate les premiers signaux d’alarme et assiste à l’explosion début 2024, alors même que l’arrivée du texte en Conseil des ministres est imminente. Le 21 janvier, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau annonçait à la dernière minute le report de la présentation. La crise agricole refond les articles et les priorités du projet de loi.

La souveraineté, priorité n°1

Outre le renouvellement des générations, les agriculteurs imposent en première ligne la simplification des normes – françaises et européennes. À cela s’ajoute la lancinante question du revenu digne, celle du calcul des retraites, des pesticides, de la trésorerie et de la compétitivité sur le marché.

Le projet de loi est donc revu de fond en comble : Marc Fesneau lui-même annonce un nouveau volet sur la simplification et Emmanuel Macron promet de rendre l’agriculture et l’alimentation « un grand intérêt général » de la nation. Ce deuxième point est maintenant « l’idée fondamentale » du texte présenté ce mercredi, précise le cabinet du ministre de l’Agriculture à la presse avant la présentation, avec un premier article qui met l’accent sur la souveraineté alimentaire « un objectif structurant » politiques publiques.

Pour y parvenir, le projet de loi est conçu autour de deux axes – le renouvellement générationnel et l’adaptation au changement climatique – déclinés en trois des « leviers ». Dans les deux premiers, on retrouve l’agro bachelor, la maison « France service agriculture », désormais agrémentée d’un « programme national d’orientation et de découverte de carrière » à l’école et « diagnostic des tests de stress climatique » étudier les projets à la lumière des conditions climatiques réelles. Sans oublier la création d’un « groupement d’investissement en foncier agricole » afin de faciliter la portabilité des terres, un système qui permet aux jeunes agriculteurs d’accéder plus facilement à la terre.

Le troisième levier concerne la simplification des normes et des procédures : réglementation des haies, révision du régime des sanctions pour atteinte à l’environnement, déclaration de présomption d’urgence sur les litiges relatifs aux projets d’eau et aux bâtiments d’élevage, etc. Ces deux derniers points illustrent la main tendue du gouvernement pour la profession. Concernant la révision du régime des sanctions, le cabinet de Marc Fesneau estime que cela « témoigne de la volonté de l’Etat d’accompagner, d’expliquer, de réparer si nécessaire pour ne pas être uniquement dans une logique punitive ». Idem sur la présomption d’urgence qu’il faut éviter « beaucoup de désespoir »de « perte de temps et d’énergie » pour les professionnels.

Le PJL et surtout toutes les « batailles » à ses côtés

La câlinothérapie oui, mais est-ce suffisant ? Après le Salon de l’agriculture, les syndicats ont déploré le manque d’action concrète de l’exécutif. « Le rythme n’est pas du tout là » sur les retraites, l’eau, l’élevage, la trésorerie, la simplification, » a déclaré le président de la FNSEA Arnaud Rousseau le 17 mars. Au Congrès dix jours plus tard, il a attiré l’attention sur le soutien par l’État, jusqu’à la cessation d’activité si nécessaire, de « des collègues dans des situations inextricables » sous peine de ne pas apporter de réponse à ceux « qui crient leur colère ou qui choisissent simplement de se réprimer ».

Ces doléances du président du syndicat majoritaire ont-elles été entendues ? Le projet de loi ne comporte quasiment aucune mesure budgétaire et le cabinet de Marc Fesneau suppose ceci : « Ce n’est pas un projet de loi avec taxation »assure-t-on, arguant qu’un certain nombre de moyens ont déjà été déployés (financements d’urgence au moment de la crise) et que « d’autres seront directement liés » dans le cadre du projet de loi de finances 2025.

De même, pas question de parler de l’application de la loi sur les retraites agricoles, déjà votée par le Parlement mais soumise à la discussion du gouvernement. Le cabinet de Marc Fesneau réaffirme son souhait que la réforme soit effective en 2026 mais rappelle qu’elle est «d’un sujet budgétaire». Le texte ne donne pas non plus d’objectif chiffré en matière de renouvellement des générations mais vise à « offrir des outils pour faciliter la transmission et disposer d’un cadre plus attractif », fait valoir le ministère.

Quant à la question du cadre européen, de la transition écologique (plan Ecophyto, pesticides…) et la question très sensible des revenus agricoles (avec les lois Egalim par exemple), « Les batailles sont en cours, elles ne sont pas terminées et elles se déroulent parallèlement au projet de loi », assure-t-on de la même source. Et d’insister sur la lecture du projet de loi, qui doit se faire dans la continuité des réformes entreprises depuis 2017 et des annonces du Premier ministre au moment de la crise. Pas sûr que la profession l’entende ainsi.

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Cammile Bussière

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