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Voici les premières images de cerveau dévoilées par l’IRM la plus puissante du monde

«  Avec cette machine, nous pouvons voir les minuscules vaisseaux qui irriguent le cortex cérébral, ou des détails du cervelet qui étaient jusqu’à présent presque invisibles. »accueille Alexandre Vignaud, physicien, directeur de recherche au CEA.
CEA

Grâce à un aimant extraordinaire, l’IRM Iseult développée à Paris-Saclay par le CEA permet d’obtenir des images dix fois plus précises que celles disponibles en milieu hospitalier.

Jamais un cerveau humain n’a pu être visualisé avec une telle précision. Dans les sous-sols de NeuroSpin, le centre de recherche du CEA de Saclay (Essonne), l’IRM la plus puissante au monde vient d’être testée pour la première fois sur un être humain et les premières images sont exceptionnelles. Il faut dire que l’engin ne manquera pas d’impressionner : sa puissance atteint 11,7 Tesla, soit 220 000 fois le champ magnétique terrestre. C’est jusqu’à dix fois plus que les IRM actuellement utilisées dans les hôpitaux (1,5 à 3 Tesla).

En 2021, c’est une citrouille qui a servi de cobaye pour les premiers tests d’images. Depuis, 20 volontaires sains ont été interrogés par la machine. Les images de leur cerveau, d’une « finesse sans pareille » ont été révélées le 2 avril et devraient faire prochainement l’objet d’une publication scientifique. Né d’un partenariat franco-allemand en 2005, l’IRM baptisé « Iseult » est l’aboutissement de vingt-cinq années de recherches impliquant une étroite collaboration entre chercheurs et industriels. «  L’idée était de construire un instrument aux caractéristiques extraordinaires. C’était presque futuriste, voire impossible à fabriquer »explique Anne-Isabelle Etienvre, directrice de la recherche fondamentale au CEA.

Un projet à 170 millions d’euros

Les dimensions de cette IRM sont clairement extraordinaires : cinq mètres de long et de diamètre pour un poids de 132 tonnes. La pièce maîtresse de la machine est un aimant supraconducteur, conçu par les ingénieurs du CEA. Une fois intégré au cœur de l’IRM et soumis à son champ magnétique de 11,7 t, l’aimant polarise les éléments microscopiques des atomes qui constituent les tissus biologiques, un peu à la manière d’une boussole. En s’alignant, ces éléments émettent un signal mesurable qui est ensuite transformé en images par des calculs complexes.

Plus le champ magnétique augmente, plus les détails sont accessibles. Le précédent record était de 10,5 t pour une IRM américaine. Le coût total du projet est de 170 millions d’euros, dont 50 millions pour le seul aimant géant. Les coupes cérébrales générées par Iseult sont ainsi bien plus précises que celles obtenues avec les IRM existantes. L’appareil est capable de révéler des détails anatomiques auparavant invisibles, notamment des vaisseaux sanguins très fins ou la succession de couches qui composent le cortex.

L’IRM Iseult permet d’obtenir des images dix fois plus précises que celles actuellement utilisées à l’hôpital.
CEA

Un outil de recherche

En sondant les cerveaux sains de 20 participants, l’objectif des chercheurs était d’explorer le potentiel d’Iseult et d’affiner la compréhension de l’anatomie cérébrale. Mais surtout assurer la sécurité liée à l’exposition à un champ magnétique aussi puissant. Les volontaires ont été soumis à un panel de tests physiologiques, dont des tests de génotoxicité, avant et après passage dans la machine, avec un suivi de plusieurs semaines. «  Tous les bénévoles se portent bien », rassure Nicolas Bouleau, responsable du projet Iseult et directeur de recherche au CEA. La vraie force d’Iseult est aussi d’être sensible aux espèces chimiques (phosphore, fluor, fer…) qui sont très difficiles, voire pas du tout, à détecter avec les IRM utilisées en milieu hospitalier.

Pouvoir détecter les processus qui se déroulent à un stade plus précoce pourrait nous aider à mieux comprendre cette maladie, voire permettre le développement de nouveaux traitements.

Nicolas Bouleau, responsable du projet Iseult et directeur de recherche au CEA

«  Par exemple, nous avons pu augmenter la sensibilité à la concentration en fer, un élément qui pourrait plus tard nous renseigner sur la maladie de Parkinson. », explique Nicolas Bouleau. Dans cette pathologie, l’excès de fer cérébral contribue aux processus pathologiques tels que le stress oxydatif, la neuroinflammation et la mort neuronale. Des processus qui se déroulent jusqu’à vingt ans avant le diagnostic. «  Aujourd’hui, le diagnostic de cette maladie est très tardif, rappelle Nicolas Bouleau. Pouvoir détecter les processus qui se déroulent à un stade plus précoce pourrait nous aider à mieux comprendre cette maladie, voire permettre le développement de nouveaux traitements. »

Entre autres applications, les chercheurs espèrent pouvoir mieux discerner les atrophies hippocampiques caractéristiques de la maladie d’Alzheimer, ou encore cartographier la répartition de certains médicaments, comme le lithium, utilisés dans le traitement de maladies psychiatriques graves (bipolarité, schizophrénie). Mais il s’agira aussi d’exploiter la capacité d’Iseult à visualiser l’activité des neurones en temps réel afin d’en apprendre davantage sur le rôle des différentes couches du cortex et la manière dont elles communiquent. De telles connaissances pourraient éclairer la spécificité de nombreuses pathologies psychiatriques ou maladies neurodégénératives, mais pourraient également servir à documenter d’autres mécanismes physiologiques du cerveau, comme l’apprentissage. Iseult est pour l’instant strictement utilisé dans le cadre de la recherche fondamentale, et le sera encore quelques années. D’autres volontaires sains seront encore recrutés pour confirmer l’absence d’effets sur la santé.

Cammile Bussière

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