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Varsovie et Berlin vont renforcer leur coopération dans le domaine de la défense aérienne et des sous-marins

En mars, réunis au format dit de « Weimar », le président français Emmanuel Macron, le chancelier allemand Olaf Scholz et le Premier ministre polonais Donald Tusk ont ​​affiché leur « unité » sur l’aide à l’Ukraine, après plusieurs semaines de tensions entre Paris et Berlin non seulement sur ce sujet mais aussi sur le projet européen de défense antimissile (ESSI – European Sky Shield Initiative) lancé par l’Allemagne en octobre 2022, dans le cadre de l’Otan.

Puis, la semaine dernière, recevant à Paris ses homologues allemand et polonais, Boris Pistorius et Wladyslaw Kosiniak-Kamysz, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, a esquissé de nouvelles pistes de coopération militaire entre les trois pays du « Triangle de Weimar ». Il a cité la tenue d’exercices communs en 2025, la mobilité militaire et une « réflexion sur les frappes dans la profondeur », qui devrait aboutir à la signature d’une lettre d’intention lors du prochain sommet de l’Otan à Washington.

Mais dans ce trio, la France pourrait bien devoir se contenter de tirer la chandelle, même si, avec le Main Land Combat System (MGCS) et le Future Air Combat System (SCAF), elle mène deux projets en coopération avec l’Allemagne.

Mais dans d’autres domaines, les positions entre Paris et Berlin semblent irréconciliables. C’est le cas du projet de bouclier antimissile européen, qui vise à mutualiser les achats de capacités dédiées entre les pays participants. Or, parmi les systèmes envisagés (ou « éligibles »), le franco-italien SAMP/T (Sol-Air Moyenne Portée/Terrestre) a été snobé… D’où la défiance française à son égard.

Après s’être tenue à l’écart de l’initiative allemande alors qu’elle était dirigée par un gouvernement dominé par les conservateurs du PiS, la Pologne s’apprête à revenir sur sa position. L’actuel Premier ministre polonais, le pro-européen et centriste Donald Tusk, l’avait récemment suggéré. Et c’est désormais confirmé.

En effet, lors d’une rencontre entre MM. Tusk et Scholz à Varsovie le 2 juillet (la première, à un tel niveau, depuis 2018, ndlr), la Pologne et l’Allemagne ont approuvé un « plan d’action » de 40 pages pour renforcer leur coopération, notamment en matière de défense.

« La Pologne, l’une des plus grandes victimes de la Seconde Guerre mondiale, et l’Allemagne, auteur de cette destruction, de cette tragédie, doivent aujourd’hui, en tant que nations européennes libres et démocratiques, coopérer efficacement pour assurer la sécurité de l’Europe », a commenté Tusk. Il a insisté : « Je ne peux pas imaginer que l’Allemagne ne devienne pas un pays leader en matière de sécurité européenne commune, y compris la sécurité polonaise. »

Pour sa part, M. Scholz a déclaré que la sécurité de la Pologne était aussi celle de l’Allemagne. « C’est ce qui nous guide en tant que voisins, alliés au sein de l’OTAN et partenaires au sein de l’Union européenne (UE) », a-t-il déclaré. « Cela signifie précisément que nous (la Pologne et l’Allemagne) voulons assumer un rôle de premier plan dans la région baltique au sein de l’OTAN et dans la protection du flanc oriental de l’UE », a-t-il poursuivi.

Concernant l’ESSI, le plan d’action en question stipule que les « gouvernements polonais et allemand soutiennent fermement les initiatives visant à construire de fortes capacités de défense aérienne en Europe »… Et qu’à cet égard, la Pologne « envisage de participer à l’initiative ‘European Sky Shield’ coordonnée par l’Allemagne ».

Le document met l’accent sur « l’interopérabilité et la standardisation » des capacités militaires, avec l’idée de faire de la Pologne et de l’Allemagne les moteurs du renforcement du « pilier européen de l’OTAN ».

Parmi les autres domaines évoqués dans ce plan d’action figurent les sous-marins et la guerre des mines (navales). Il s’agit ici de « promouvoir une approche multinationale plus large », en mettant l’accent sur « l’approvisionnement, la doctrine, la formation, la maintenance, etc. »

« Une approche multinationale plus large » ? L’Allemagne a déjà établi une coopération avec la Norvège sur le sous-marin U-212 NG, qui doit également équiper la Deutsche Marine.

Parallèlement, la Pologne a lancé un appel d’offres dans le cadre du programme Orka, afin de se doter de trois nouveaux sous-marins. Parmi les industriels invités à y participer figurent le tandem formé par les Sud-Coréens Hyundai Heavy Industries et Hanwha Ocean, le Français Naval Group, le Suédois Kockums (avec l’A26), l’Espagnol Navantia et… l’Allemand ThyssenKrupp Marine Systems (TKMS). Ce dernier vient-il de marquer des points décisifs ?

La question se pose alors qu’en 2016, Varsovie et Berlin ont signé un protocole d’accord pour placer leurs sous-marins respectifs sous le contrôle opérationnel d’une autorité commune appelée « DEU-POL SibOpAuth », qui devait faire partie du Centre d’opérations maritimes (MOC) de la marine allemande. Or, la marine polonaise ne dispose actuellement que d’un seul sous-marin après le déclassement des trois modèles de la classe Kobben au début des années 2020.

Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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