« Sous la présidence Raïssi, la politique étrangère et de sécurité iranienne s’est affirmée par l’agressivité »
SAyyid Ebrahim Raïssi, décédé dans un accident d’hélicoptère le 19 mai, est resté président de l’Iran pendant deux ans et neuf mois. Ce n’est pas grand-chose pour laisser une marque sur la politique étrangère. De plus, les principales orientations dans cette affaire sont prises par le régime au niveau du Guide Suprême. Par ailleurs, la proximité entre les deux hommes promettait, dès l’été 2021, un virage ultraconservateur. Enfin, la perspective de devenir lui-même Guide garantissait, le cas échéant, une politique très conforme aux directives. La rapidité avec laquelle Ali Khamenei a rappelé un principe de continuité de l’administration du pays, lundi 20 mai, illustre bien que l’événement, s’il est politiquement significatif, l’est davantage à l’intérieur qu’à l’extérieur.
Il n’en demeure pas moins que le gouvernement iranien pose avec acuité depuis plusieurs mois une question stratégique de politique étrangère : c’est sous cette présidence que le Hamas a perpétré en Israël un massacre sans précédent dans l’histoire, le 7 octobre 2023. C’est sous cette présidence que L’Iran a lancé le 13 avril une attaque militaire sans précédent contre le territoire israélien. Ce sont pourtant deux illustrations d’une réalité de la politique étrangère et de sécurité iranienne qui est celle de l’affirmation, de l’ambition, de l’agressivité. On aurait tort d’y voir le simple signe d’une nervosité du pouvoir sur le plan interne.
À l’été 2021, le président Raïssi était attendu sur les fronts économique et diplomatique : une économie mise à mal par les sanctions américaines, un accord nucléaire international en lambeaux et la nécessité de réagir face au risque d’isolement stratégique régional. Si l’action en faveur d’une économie de résistance et d’une diplomatie économique spécifique a produit peu de résultats probants, la politique de défense et de sécurité a en revanche ancré les réalités suivantes.
Pivot durable de la coopération
Le retrait américain de l’accord nucléaire en mai 2018 a scellé la méfiance du gouvernement à l’égard des États-Unis et de l’Europe. Depuis lors, l’Ayatollah Khamenei a régulièrement averti que « Faire confiance à l’Occident ne fonctionne pas ». L’arrivée d’Ebrahim Raïssi a affirmé le pivot durable de la coopération vers l’est de l’hémisphère (stratégie dite du « regard vers l’Est » mise en œuvre depuis l’administration de l’ancien président Mahmoud Ahmadinejad). Le partenariat stratégique avec la Chine, les transferts d’armes avec la Russie, l’intégration de l’Organisation de coopération de Shanghai en juillet 2023, ont donné corps à ce pivot qui n’empêche pas des mesures opportunes, comme l’accord bilatéral de désescalade avec les États-Unis à l’été. de 2023, en l’absence d’une reprise de négociations sérieuses sur le nucléaire.
Il vous reste 54,6% de cet article à lire. Le reste est réservé aux abonnés.