Soirées décalées, alcool gratuit à gogo, giga club échangiste : plongez dans les nuits sans fond du Festival de Cannes
Cette dynamique entretient aussi son côté obscur : grâce à #MeToo, la parole s’est déliée en 2017 et les actrices Judith Godrèche ou Asia Argento ont décrit un système de prédation sur la Croisette, avec des intermédiaires et des invitations de jeunes artistes dans des suites de palais.
Si vous avez l’attitude et la tenue, même si vous n’avez pas un euro sur votre compte, vous êtes partant.
La Croisette se transforme également à la tombée de la nuit en podium de défilé. Si vous êtes un peu habillé, si vous avez l’attitude et la tenue, même si vous n’avez pas un euro sur votre compte, vous êtes partant ! », explique Hanae Violay, une créatrice de contenus de 23 ans qui filme ses tentatives en direct pour ses 200 000 abonnés. « Je pense que ce qui est spécial à Cannes, c’est que tout le monde est bien habillé. A Los Angeles, tout le monde sort en baskets et en jeans», confirme Olu Ajayi, scénariste américain.
« Un mélange incroyable »
Quand les plages ferment à 2 heures du matin et que les « happy hours » ont terminé leur « dîner cinéma » ou leur « before » dans une villa sur les hauteurs de la ville, la cohorte des noctambules rejoint l’un des clubs éphémères de la cité. « Que la critique soit positive ou négative, tout le monde se retrouve le soir pour fêter la projection du film. On s’en fiche des critiques tant que le champagne coule à flots», explique Daphnée, qui travaille dans la mode.
Le lieu festif le plus difficile à approcher est Silencio, la version cannoise du club parisien à carte de membre décoré par le cinéaste David Lynch. « Cela rassemble des gens du monde entier – des gens du cinéma, de la mode, de la musique – c’est donc un mélange incroyable. Je pense qu’il n’y a pas d’équivalent dans le monde», affirme son patron, Arnaud Trisch, qui possède des clubs à Paris, New York et Ibiza.
Le soir même, nous rencontrons un réalisateur canadien bien connu, un ancien ministre, le directeur d’une institution culturelle nationale, un ancien joueur de l’OM, des médias agents immobiliers…
Un giga club échangiste kitsch loué par l’équipe d’un film international en compétition.
A la porte du Silencio, Sascha Lupker joue, selon la légende, le deuxième rôle le plus influent du festival… après le président du jury. « Ce à quoi je fais attention, c’est le lien que nous établissons avec les gens, c’est-à-dire s’ils connaissent la marque et si je les connais. Est-ce qu’ils apportent la bonne énergie que nous souhaitons dans nos clubs ? », répond le physionomiste, en séchant un groupe de cinq garçons aux yeux endoloris.
L’autre joyau de la nuit cannoise, beaucoup plus confidentiel et louche, est Vertigo, un club éphémère animé par l’équipe Queer Palm (un prix alternatif du meilleur film abordant les problématiques LGBTQI), explique Christopher Landais, son co-gérant. . « Il y a parfois des gens qu’on ne voit pas toute l’année et qu’on ne retrouve qu’à Cannes ou au Festival de Berlin ou ailleurs », raconte cette figure des 20 ans de la nuit cannoise.
Il est 5 heures du matin mais Cannes ne serait pas Cannes sans les rumeurs d’un dernier rendez-vous festif, ce soir-là, dans un club giga-échangiste kitsch, salué avec humour par l’équipe d’un film international en compétition.