Que sait-on des images de Palestiniens brûlés par une frappe israélienne dans la cour d’un hôpital de Gaza ?
Une frappe israélienne a touché un hôpital du centre de Gaza, lundi 14 octobre, provoquant des scènes d’horreur.
L’authenticité des images de corps ravagés par les flammes a été rapidement remise en question.
On fait le point sur ce que l’on sait de ces vidéos insupportables.
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Informations examinées par les commissaires aux comptes
Après un an d’intenses combats dans la bande de Gaza, certaines images restent difficiles à comprendre. Ceux qui sont apparus dans la soirée du dimanche 13 octobre au lundi 14 octobre en font partie. Dans des vidéos qui ont largement circulé, un incendie ravage des structures métalliques et plusieurs tentes en pleine nuit. Les victimes ont couru se réfugier, cachées sous d’épaisses couvertures, tandis qu’une personne semblait piégée par les flammes. Les hommes autour crient mais ne peuvent pas l’aider. « Israël bombarde les tentes des familles déplacées et les brûle vives dans la cour de l’hôpital »» raconte l’un des internautes qui partage cette séquence.
Une version remise en cause quelques heures plus tard par plusieurs comptes pro-israéliens (nouvelle fenêtre). En cause, la présence d’un jeune Palestinien, Saleh Aljafarawi, surnommé « Monsieur Fafo ». « Comme toute personne normale, ma première réaction instinctive a été la détresse et la douleur. Mais ensuite j’ai vu FAFO »a écrit l’un d’eux à 7 heures du matin « Chaque fois que vous le voyez sur une vidéo, vous pouvez supposer que ce n’est pas authentique »ajoute-t-il dans une publication vue plus de 2,2 millions de fois, tandis qu’une autre décrit le jeune homme comme « la plus grande star de l’industrie Pallywood ». Nous avons donc décidé d’en savoir plus.
Rien ne prouve que le Hamas a « mis en scène »
La séquence devenue virale a bel et bien été filmée par Saleh Aljafarawi. C’est sur son compte Instagram (nouvelle fenêtre) qu’on la retrouve, mise en ligne avec deux autres vidéos. Une source qui ne peut être utilisée comme seul argument pour nier les événements. Comme nous vous l’avons expliqué dans cet article (nouvelle fenêtre)le jeune vidéaste est régulièrement accusé à tort par des comptes pro-israéliens de dépeindre la douleur des Gazaouis avec de fausses informations. Sans jamais apporter de preuve tangible, ils assurent que le jeune homme serait un « acteur de crise » dans le cadre d’une production baptisée « Pallywood ». Contraction de Palestine et Hollywood, ce néologisme est utilisé depuis le début du conflit pour remettre en question l’existence de victimes civiles de l’enclave.
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Par ailleurs, le jeune Palestinien n’est pas le seul à témoigner de cette tragédie. Plusieurs vidéos, prises sous d’autres angles de vue par des photojournalistes amateurs ou professionnels, confirment toutes l’authenticité de la scène. Parmi eux, des contenus produits par Wafaa Shurafa, journaliste de l’agence américaine Associated Press (nouvelle fenêtre)sur lequel plusieurs victimes sont visibles ainsi que l’incendie en question.
Une autre séquence, filmée cette fois par le journaliste palestinien Abdallah Alattar, atteste également qu’au moins une victime a bien été brûlée vive. Capturé quelques instants après la vidéo de Saleh Aljafarawi, on voit plusieurs hommes essayant d’éteindre les flammes avec des couvertures et un extincteur. L’homme est toujours coincé dans les décombres, il agite le bras. Un autre point de vue, filmé par le photojournaliste Omar Aldirawi, corrobore cette information.
Une « scène de dévastation » à l’intérieur d’un hôpital
Et que sait-on de l’emplacement ? Selon différents médias, la scène s’est déroulée dans l’enceinte de l’hôpital des martyrs d’Al-Aqsa. Information confirmée par géolocalisation. Les multiples sources citées ci-dessus ont toutes filmé dans des lieux qui correspondent aux données satellite visibles sur Google Maps, comme le démontrent les images ci-dessous. Or, cet hôpital héberge en réalité des personnes déplacées. Il est situé dans la zone humanitaire décrétée par l’armée israélienne. L’ampleur des dégâts causés aux tentes a également été corroborée par des images apparues le lendemain matin.
Dans la journée, l’armée israélienne a reconnu la frappe, affirmant avoir visé un « centre de commande » du Hamas. Si les autorités n’ont pas été plus précises sur la cible en question, des témoignages pro-israéliens assurent de leur côté que les tentes abritaient un « cache d’armes ». « On entend le bruit des munitions qui explosent »commente l’un d’eux, accusant l’organisation terroriste d’avoir « mettant en danger des innocents.
En effet, plusieurs explosions sont clairement audibles dans toutes les vidéos de l’incendie que nous avons analysées. Il est toutefois difficile de confirmer cette piste. D’autant plus qu’elle est mise en cause par un témoin oculaire. Dans les colonnes de Washington Post (nouvelle fenêtre)Le photojournaliste Ahmed al-Ras, présent dans l’enceinte de l’hôpital au moment des faits, indique que la grève aurait déclenché l’explosion du « bouteilles de gaz ». Ceux-ci sont nécessaires dans la vie quotidienne des personnes déplacées pour cuisiner ou se réchauffer. Sur une autre vidéo de la scène filmée par le photojournaliste Omar Aldirawi (nouvelle fenêtre)Les internautes ont identifié un homme en train d’enlever visiblement deux « réservoir propane ». Il nous est donc actuellement impossible de déterminer si les explosions visibles sur les images sont provoquées par du matériel militaire ou des bonbonnes de gaz.
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En résumé, la géolocalisation des images, l’analyse de leur contenu ainsi que la multitude de sources confirment qu’une frappe israélienne a bien touché l’enceinte d’un hôpital au centre de la bande de Gaza, brûlant vif au moins un homme. . Quant à connaître l’étendue du « massacre » dénoncé dans la nuit de dimanche à lundi, Médecin Sans Frontières a fait état d’un bilan de cinq morts et 65 blessés. Dans un communiqué, l’ONG humanitaire rappelle que « C’est la septième fois que l’enceinte de l’hôpital d’Al-Aqsa est bombardée depuis mars 2024, dont trois le mois dernier ». Et déplore les nouvelles « scène de dévastation ».
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