Quand un vieux préamplificateur TV oublié dans un camping-car perturbe les communications à l’aéroport de Nantes

Le Figaro Nantes

Quand un petit objet caché au fond d’un camping-car, à l’insu de son propriétaire, perturbe le bon fonctionnement de l’aéroport de Nantes… Cette situation cocasse a eu lieu le 25 avril dernier. Ce jour-là, les communications entre les pilotes et la tour de contrôle dysfonctionnaient. La Direction Générale de l’Aviation Civile a alors contacté l’Agence Nationale des Fréquences (ANFR) pour un brouillage des fréquences VHF.

Sans plus attendre, une paire d’agents de l’organisation qui gère toutes les fréquences radio du pays se sont rendus sur le terrain. « Le brouillage n’a pas pris le dessus sur toute la bande aérienne, mais il était suffisamment critique pour que nous intervenions. »« C’est un problème qui se pose, mais il faut bien le résoudre », explique Catherine Gabay, directrice adjointe du contrôle du spectre à l’ANFR. En attendant que l’énigme soit résolue, les pilotes utilisent d’autres bandes pour recevoir des informations. Les deux professionnels assermentés de l’ANFR partent à la recherche du nœud du problème. Ils sillonnent la zone équipés d’un radiogoniomètre sur le toit pour déterminer la direction de la perturbation.

Des recherches laborieuses

Leur appareil les conduit au bout d’une impasse à Saint-Aignan de Grand Lieu, à un peu plus de deux kilomètres de l’aéroport. Un homme, occupé à cuire un steak, leur ouvre la porte. Une fois dans son jardin, l’appareil pointe précisément vers un camping-car. Après avoir coupé l’électricité, les deux employés finissent par trouver, non sans mal, l’origine du contretemps. « Ils ont trouvé ce vieux préamplificateur de télévision, caché derrière une grille d’aération, qui devait appartenir à la personne précédente car le propriétaire ne regardait pas la télévision avec ça. »raconte Catherine Gabay. Ce petit objet a suffi à brouiller les antennes de réception de l’aéroport.

« Ces appareils n’interagissent normalement pas avec l’extérieur : leurs signaux sont confinés dans les câbles de distribution des habitations. Or, s’ils ne sont pas conformes ou lorsque leurs composants électroniques vieillissent, ils peuvent produire des émissions parasites. »L’ANFR détaille dans son enquête publiée fin août. En théorie, l’auteur d’une infraction risque six mois de prison et 30 000 euros d’amende. En pratique, la police du spectre s’adapte à la situation : dans ce cas, l’homme n’avait pas connaissance de l’existence du préamplificateur et n’a pas été verbalisé. « Du côté civil, la plupart du temps, le brouillage n’est pas offensif, mais les effets sont les mêmes. Il empêchera les données ou les communications d’atteindre leur destinataire, à la manière d’une cyberattaque. »poursuit le directeur adjoint du contrôle du spectre. A l’inverse, en cas de guerre, il s’agit d’une technique utilisée délibérément pour nuire à l’ennemi.

Autres situations inhabituelles

En France, environ 1 500 à 1 800 plaintes sont enregistrées par l’agence, qui dépend du ministère de l’Économie et des Finances. Les préamplificateurs TV sont la deuxième cause de brouillage la plus fréquente, après les répéteurs de téléphonie mobile. En 2017, quatre avions de l’aéroport de Nantes n’ont pas pu décoller à temps à cause d’un brouilleur GPS laissé dans une voiture garée sur le tarmac de l’aéroport. Le propriétaire a été condamné à une amende de 2 000 €. En 2023, en pleine mer au large de Saint-Nazaire, une VHF marine installée sur une éolienne a perturbé les communications d’une station côtière chargée des opérations de sauvetage. Les équipements radio ne sont pas les seuls coupables. Des équipements électriques et électroniques tels que des lampes LED, des câbles HDMI, des écrans, etc. peuvent également être en cause. En rendant publiques ces situations, l’ANFR espère « attirer l’attention sur les réglementations à appliquer et sensibiliser les différents publics au bon usage des fréquences ».