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pourquoi Paris-Roubaix est une course « inhumaine »

Poussière ou boue sur une succession de 29 secteurs pavés – habituellement empruntés par les tracteurs – sujets aux chutes et autres crevaisons. Inhumain, mythique, effrayant ou poétique, l’Enfer du Nord de Paris-Roubaix, dont la 121e édition a lieu ce dimanche, effraie autant qu’il fascine.

Rien n’est écrit d’avance mais l’édition 2024 de Paris-Roubaix pourrait avoir une place à part dans l’Histoire. La foi de Thierry Gouvenou. « Les Paris-Roubaix mouillés font partie de la légende. On a longtemps pleuré de ne pas avoir de pluie lors du Paris-Roubaix. Là, on risque d’être dans des conditions compliquées», s’est réjoui le directeur de course, mardi lors des reconnaissances.

Chèvres ou machines d’étudiants en horticulture ont tenté de rendre les routes de « l’Enfer du Nord » plus hospitalières ces derniers jours. Cela n’empêchera pas le peloton de passer de longues heures de souffrance entre Compiègne et Roubaix, sur l’un des parcours les plus mythiques du cyclisme. L’un des plus « inhumains » aussi.

« Cette course, c’est de la connerie »

Bernard Hinault, quintuple vainqueur du Tour de France, n’avait pas pensé autrement en 1981 après sa victoire dans la Reine des Classiques. Ce jour-là, le champion du monde s’impose au sprint après deux crevaisons et une chute provoquée par un chien. Si la visite d’un descendant du canidé en question serait surprenante, le peloton sera encore confronté ce dimanche aux mêmes désagréments sur les 260 kilomètres, dont 55,7km pavés répartis en 29 secteurs. Brutal, légendaire et presque poétique.

« Le mieux que je puisse faire serait de le décrire ainsi : ils ont creusé un chemin de terre, l’ont survolé avec un hélicoptère, puis ont juste largué un tas de pierres depuis l’hélicoptère. C’est Paris-Roubaix », avait imagé l’Américain Christopher. Horner dans les années 2010.

« Cette course, c’est de la connerie », disait le Néerlandais Theo de Rooij en 1985.

« Tu travailles comme un animal, tu n’as pas le temps de pisser, tu mouille ton pantalon. Tu roules dans la boue, tu glisses, c’est de la merde… C’est la plus belle course du monde. » Double vainqueur en 1985 et 1991, Marc Madiot s’est immédiatement senti à l’aise sur ces routes cahoteuses, poussiéreuses ou boueuses aux vibrations incessantes.

« Ce n’est pas inhumain parce qu’on y va », confie-t-il à RMC Sport. « Nous en venons à flirter avec nos limites mentales et physiques. »

« Le conscient et l’inconscient se heurtent »

Toutefois, les sensations à vélo ne sont « pas très agréables ». « Le conscient et l’inconscient s’entrechoquent. Le conscient nous dit : ‘on est fou d’être là, c’est potentiellement dangereux’, et l’inconscient nous dit : ‘il faut y aller’ parce qu’il y a des trucs sympas », sourit l’actuel. patron de l’équipe Groupama-FDJ.

Truc cool? L’incroyable ferveur populaire ou l’arrivée libératrice au vieux Vélodrome de Roubaix, et c’est tout. La suite n’est qu’un exercice de pilotage pour éviter les concurrents, les pavés détachés et les incidents mécaniques en tout genre.

« Il ne faut pas avoir peur », conseille Madiot.

Que faire pour éviter les pièges ? Prendre le dessus au centre de la route ou privilégier l’accotement avec les risques que cela comporte ? « Il n’y a pas de règles, il faut avoir une bonne vue devant soi et anticiper ses propres sensations, où on va mettre les roues. Quand on a le contrôle, c’est une sécurité. Et il y a forcément des moments où on ne peut plus être là. » La clé pour éviter les pièges : une concentration constante sans « tics » ni « obsessions ». « Ne faites qu’un avec votre vélo » tout en l’épargnant le plus possible.

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« Ne serrez pas trop le guidon »

Grand favori pour sa propre succession, Mathieu van der Poel insiste sur un fait fondamental : la détente. « Il y a toujours beaucoup de stress dans le peloton, et je pense qu’il faut être détendu sur les pavés, ne pas trop serrer le guidon, je pense que c’est le gros problème », explique le Néerlandais, agacé par la mise en place d’une chicane avant. la Trouée d’Arenberg pour réduire la vitesse et éviter les chutes.

« Pourquoi mourons-nous, pourquoi tombons-nous ? Parce que peut-être que nous n’avons pas tout maîtrisé correctement », poursuit Madiot.

« Lorsque vous prenez des risques et jouez dans des zones à risque, vous êtes plus susceptible de commettre des erreurs. » Il avait bâti ses deux victoires au Carrefour de l’Arbre, le dernier des trois secteurs pavés les plus difficiles à 15 kilomètres de l’arrivée. « Il faut être prêt dans sa tête, c’est beaucoup mental, explique-t-il. Vous devez avoir un physique impeccable, être à 100% de vos capacités et avoir un mental à 100%. Si vous avez une carence dans l’un ou l’autre, c’est mort.

La pluie annoncée pour le parcours de dimanche mettra les jambes et la tête à rude épreuve. Et s’ils passent entre les gouttes, les coureurs devront encore slalomer entre les flaques formées par les fortes précipitations de ces dernières semaines. Avec la peur d’une mauvaise surprise invisible aux yeux du coureur. « Il faut y aller et ensuite passer à autre chose », recommande Marc Madiot. Dimanche, il suivra en voiture les performances de Stefan Küng et Laurence Pithie, les deux meilleures chances de son équipe. « Nous sommes aussi dans la voiture, nous sommes concentrés. Si elle ne lâche pas, j’irai au Vélodrome», sourit Madiot.

Jeoffro René

I photograph general events and conferences and publish and report on these events at the European level.
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