Pourquoi la condamnation d’Irmgard Furchner, ancienne secrétaire dans un camp de concentration, est une première – Libération
Dans un arrêt rendu mardi 20 août, la Cour fédérale de justice allemande a rejeté la requête d’une ancienne employée civile de la SS âgée de 99 ans, qui avait contesté sa condamnation par le tribunal régional d’Itzehoe à deux ans de prison avec sursis pour complicité de meurtre dans 10 505 cas et tentative de meurtre dans cinq cas.
Employée de juin 1943 à avril 1945 comme sténographe à la Kommandantur du camp de concentration de Stutthof, dans l’actuelle Pologne, où environ 65 000 personnes ont trouvé la mort, Irmgard Furchner était alors âgée de 18 ou 19 ans. Dans un communiqué accompagnant sa décision, la plus haute juridiction allemande en matière civile et pénale a rappelé que le tribunal régional d’Itzehoe avait décidé de condamner l’ancienne secrétaire, après avoir été « est arrivée à la conclusion que, par le biais de travaux de dactylographie à la Kommandantur, l’accusée avait volontairement aidé les principaux auteurs à exécuter les crimes cruels commis en les gazant, en créant des conditions hostiles dans le camp, en les transportant au camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau et en les envoyant dans des marches de la mort, ou avait tenté de le faire. Son travail aurait été nécessaire à l’organisation du camp et à l’exécution des actes cruels et systématiques d’extermination »Dans son arrêt du 20 août 2024, elle confirme définitivement le verdict du tribunal d’Itzehoe.
Cette décision a fait l’objet d’une importante couverture médiatique en Allemagne, en raison de l’âge avancé de l’accusée, mais aussi de son statut de secrétaire civile. « Il s’agit du premier jugement définitif contre un employé civil d’un camp de concentration », souligne le quotidien allemand Journal du jour. Lors de son procès à Itzehoe, le magazine Miroir a également noté que « C’est la première fois qu’un employé civil d’un camp de concentration nazi est jugé. »
Rejoint par Vérifiez les actualitésThomas Will, directeur du Bureau central d’enquête sur les crimes nationaux-socialistes à Ludwigsburg, confirme : « Il n’y a pas eu de jugement de ce type depuis plus de vingt et un ans d’activité du Bureau central. À mon avis, cela n’a pas été le cas non plus au cours des années précédentes », note l’avocat, dont les équipes sont à l’origine du procès contre la sténographe. En 2016, ses équipes avaient identifié son rôle dans le camp de concentration de Stutthof et déterminé qu’elle était toujours en vie. Elles avaient ensuite transmis le dossier préliminaire au parquet d’Itzehoe, qui a ouvert le procès en septembre 2021.
D’autres personnes qui n’étaient pas directement impliquées dans le meurtre de prisonniers ont été condamnées par le passé, mais il s’agissait le plus souvent de gardiens ayant eu des contacts directs avec les détenus des camps, contrairement à Irmgard Furchner. En juin 2022, Josef Schütz, 101 ans, ancien gardien du camp nazi de Sachsenhausen, est devenu la personne la plus âgée à être condamnée (cinq ans de prison) pour crimes de guerre nazis en Allemagne.