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« Personne ne nous cherchait » : pendant sept ans, ces deux enfants ont vécu seuls dans un bois – Edition du soir Ouest-France

Par édition du soir, avec l’Agence France-presse.

Le film « Frères », avec Yvan Attal et Mathieu Kassovitz, retrace la vie de Michel et Patrice de Robert de Lafregeyre. Abandonnés par leur mère, ils restèrent sept ans, livrés à eux-mêmes, dans un bois. Le premier, aujourd’hui âgé de 78 ans, revient sur cette folle histoire..

Michel de Robert de Lafregeyre, 78 ans, a de longues mains lisses, une silhouette élancée et une apparence soignée. Rien ne laisse penser qu’il aurait pu grandir comme un enfant sauvage dans un bois, avec son frère Patrice. Cette histoire a retenu l’attention du réalisateur Olivier Casas, qui l’a adaptée au cinéma. Le film. « Brothers » sort mercredi, avec Yvan Attal et Mathieu Kassovitz dans le rôle de « Mic' » et « Pat' »

Il présente « l’histoire vraie » de deux garçons – âgés de cinq et sept ans dans le film. Ils furent abandonnés par leur mère, journaliste au quotidien Combat, à l’été 1948. Elle les avait placés dans une colonie de vacances près de La Rochelle, et ne revint jamais les chercher.

Que s’est-il passé ensuite, a déclaré Michel à l’AFP lors d’une avant-première. Les enfants restent d’abord neuf mois dans la maison qui abrite la colonie, avant de s’enfuir lorsqu’ils découvrent le cadavre de son propriétaire, suicidé. « Pat m’attrape par le col et me dit : Garçon, nous devons courir ! »se souvient Michel de Robert de Lafregeyre.

Sept ans de « une liberté extrême » dans un bois près de Châtelaillon-Plage, où ils se cachent dans une cabane, se nourrissent de baies, de poissons et de lièvres : « Notre adaptation a été très rapide, nous n’avions pas le choix. Il fallait manger, se protéger. Patrice est parti à la chasse et j’ai découpé le lapin. Notre complémentarité a été essentielle à notre survie. »

Les deux enfants ont également pu compter sur des gens du voyage campant à proximité et sur l’infirmière d’une base militaire voisine.

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« Personne ne nous cherchait »

Des années d’avant la forêt, Michel ne garde que quelques flashs. Un appartement en ville, le nez verruqueux d’une femme de ménage, des petites voitures Dinky Toy. « Notre mère, femme libre et indépendante, n’est pas faite pour avoir des enfants », balaie cet ancien architecte. Les deux frères, conçus hors mariage, sont nés de pères différents. La préfecture n’a même pas été alertée de leur disparition. Après la Seconde Guerre mondiale, 340 000 enfants en Europe se sont retrouvés séparés de leur famille, rappelle le générique du film. « Nous avons réalisé que nous n’existions pas, que personne ne nous cherchait » dit Michel. Patrice, l’aîné, était « à la fois mon père, ma mère, mon frère. La cellule familiale, c’était lui. ».

Même s’il se souvient avoir souffert du froid, le jeune frère assure qu’ils ne sont jamais tombés gravement malades pendant ces années passées à l’abri des arbres. Cependant, en grandissant, Patrice a souffert de carences nutritionnelles dès son enfance et a été diagnostiqué stérile. Il s’est suicidé en 1993, à 48 ans.

Michel, de son côté, assure qu’il est seulement allé chez le médecin « deux ou trois fois dans sa vie ». « Quand nous étions blessés, nous nous guérissions ». A l’écran, on voit Yvan Attal, son double, recoudre seul une profonde blessure. « Ce qui est fort dans le film, c’est la fraternité (…) La vie en forêt n’est pas si importante »juge le septuagénaire.

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La séparation

En 1956, les frères sont reconnus par leur grand-mère dans un village où ils travaillent chez un ostréiculteur, et leur mère vient enfin les chercher. De retour à Paris, ils sont envoyés chez un couple de tuteurs chargés de les préparer à l’école. « Une année d’enfer »avant que l’un atterrisse dans un internat du Nord-Pas-de-Calais, l’autre dans un lycée parisien.

Une séparation difficile, même s’ils se retrouvent cet été pour « faire les choses en main ». Ils se voient très régulièrement jusqu’au décès de Patrice, qui dirigeait une clinique en Alsace. Ce n’est qu’après sa disparition que Michel se confie à ses proches : « C’est une histoire qui nous appartenait à tous les deux. Nous n’avions pas besoin de le partager. »

Il y a neuf ans, lors d’un week-end entre amis, il en parlait à Olivier Casas, qui s’étonnait de le voir sculpter un morceau de bois ainsi. « un Indien Cherokee ». Le scénario est né de plusieurs années de conversation.

Le réalisateur enquête à Châtelaillon et retrouve l’acte de décès de celui dont la pendaison, au début du film, fait fuir les enfants.

Grâce à Olivier Casas, Michel retrouve un ancien ami de la colonie et revient sur le site pour la première fois. Mais du bois de son enfance, il ne reste plus rien. Une autoroute et des champs l’ont fait disparaître. En tournée depuis un mois avec l’équipe du film, il pense à son frère avant chaque projection.

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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