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Patrick Pouyanné envisage une cotation principale du groupe à la Bourse de New York

(Article publié le vendredi 26 avril 2024 à 9h29 et mis à jour à 16h18) C’est un début d’année ensoleillé pour TotalEnergies. La major pétrolière française a enregistré un bénéfice net de 5,7 milliards de dollars au premier trimestre 2024, améliorant encore ses résultats de 3% par rapport aux trois premiers mois de 2023, ce vendredi. Le groupe affiche cependant un Ebitda ajusté (bbénéfice avant intérêts, impôts et amortissement) – l’indicateur de rentabilité le plus suivi par les investisseurs – en baisse de 19% par rapport au 1er trimestre à 11,5 milliards de dollars.

Ses résultats s’inscrivent dans un « environnement marqué par les prix du pétrole (près de 90 dollars le baril de Brent ce vendredi, NDLR) et des marges de raffinage soutenues, mais des prix du gaz en baisse », a déclaré le PDG de la société Patrick Pouyanné cité dans le communiqué.

Ce dernier estime notamment que les résultats du début de l’année sont « en ligne avec ses objectifs ambitieux pour l’année 2024. »

Mais, rebondissement, le PDG envisage une première cotation de son groupe à la Bourse de New York, » une question légitime « , a-t-il déclaré à Bloomberg, faisant référence à la montée en puissance de l’actionnariat nord-américain, qui détient près de 50 % du capital de l’entreprise.  » Ce n’est pas une question d’émotion. C’est une question commerciale », a-t-il ajouté, avec pragmatisme.

Le PDG répondait notamment à une question sur le déplacement de la cotation principale du groupe, actuellement établie à Paris, vers la place new-yorkaise. Aujourd’hui, le groupe possède déjà des titres enregistrés à Londres et à New York, mais à titre secondaire.

 » Nous sommes confrontés à une situation dans laquelle les actionnaires européens vendent ou conservent leur participation, et les actionnaires américains achètent. », a justifié le patron du fleuron du CAC 40, lors d’un entretien.

Depuis 2012, la part de l’actionnariat institutionnel nord-américain est passée de 33 % à 48 % (dont 47 % pour les États-Unis) en 2023 tandis que celle de l’Europe (hors Royaume-Uni) est passée de 45 %. à 34% sur la même période. La propriété institutionnelle représente 78 % de la propriété totale de l’entreprise.  » La localisation du siège social n’est pas en cause, dit-il : il restera à Paris », a encore précisé Bloomberg dans son article.

Le gérant a notamment évoqué les réticences des investisseurs européens face à la stratégie défendue par le groupe, qui consiste à continuer d’investir dans les énergies fossiles pour financer sa transition vers les énergies bas carbone.

 » En Europe, au lieu de soutenir les entreprises européennes qui veulent faire cette transition, même si elle est difficile, ils nous regardent et nous disent : regardez, vous continuez à produire du pétrole et du gaz. « , a-t-il déclaré.

TotalEnergies a toujours supposé cela en affirmant que la demande d’énergie augmente dans le monde et que les combustibles fossiles qui réchauffent la planète ne peuvent pas être remplacés aussi rapidement par des énergies propres.  » Bien sûr, je produis toujours du pétrole et du gaz », a répété le dirigeant.

TotalEnergies fêtera son centenaire sous un ciel dégagé

TotalEnergies augmente sa production de pétrole

L’entreprise, qui fête cette année ses 100 ans, « démontre une nouvelle fois ce trimestre la pertinence de sa stratégie de transition équilibrée ancrée sur deux piliers, les hydrocarbures et l’électricité », a commenté le dirigeant à l’annonce des résultats.

Entre janvier et mars, le groupe a augmenté sa production d’hydrocarbures de 1,5% sur un an, notamment grâce à la montée en puissance des projets pétroliers au Brésil, et gaziers à Oman et en Azerbaïdjan, pays hôte de la COP29 en novembre prochain. Sa production d’hydrocarbures pour gaz liquéfié (GNL) a également augmenté de 6 % sur un an, tirée par des projets au Qatar et au Nigeria. Ses ventes de GNL se sont toutefois érodées de 9% sur le trimestre en raison d’une demande en baisse due à un hiver doux et à des stocks de gaz élevés.

TotalEnergies a largement bénéficié de la volatilité des prix du pétrole ces dernières années. Pour rappel, en 2022, la major française a enregistré un bénéfice record de 20,5 milliards de dollars, surfant sur la flambée des prix et du pétrole – à plus de 120 dollars le baril contre 40 dollars en 2020 – au lendemain de la guerre en Ukraine. Depuis, les prix se sont considérablement calmés, mais ils restent élevés pour le pétrole en raison des troubles géopolitiques en mer Rouge et de la guerre au Moyen-Orient. Cela n’a pas empêché le groupe d’empocher, toujours en 2023, un nouveau bénéfice record de 21,4 milliards de dollars, le meilleur résultat de son histoire, notamment grâce à sa stratégie rentable sur le gaz liquéfié, sa priorité.

Avec tous ces avantages,Le groupe confirme qu’il consacrera 17 à 18 milliards de dollars à ses investissements en 2024, dont 5 milliards pour la production d’électricité à partir de gaz ou de sources renouvelables.

Une multinationale sous le feu des critiques

Si l’énergéticien s’est diversifié dans l’électricité renouvelable, il reste très critiqué pour ses investissements continus dans les énergies fossiles, néfastes pour le climat. En 2023, TotalEnergies a notamment annoncé des projets ou des acquisitions en Namibie, au Suriname et au Brésil, et il a renforcé sa position aux Etats-Unis dans le gaz liquéfié (GNL), une énergie très convoitée par l’Europe qui cherche à remplacer le gaz russe.  » Nous sommes toujours liés en permanence à l’importation de gaz naturel liquéfié en Europe », affirmait mi-janvier Patrick Pouyanné, le PDG du groupe qui revendique la place de 3ème acteur mondial du GNL.

Énergies renouvelables : TotalEnergies envisagerait la vente de certains actifs

En septembre, le groupe s’est attiré de nouvelles critiques en annonçant vouloir augmenter sa production d’hydrocarbures de 2 à 3% par an au cours des cinq prochaines années, tandis que plusieurs compagnies pétrolières comme Enel, Shell et BP ont annoncé une révision en 2023 d’une baisse de leur production. certains de leurs objectifs en matière de transition énergétique.

Sous la pression des militants du climat et des droits humains, le groupe est la cible de plusieurs actions en justice contre sa stratégie ou contre ses projets gaziers et pétroliers, dont le très controversé projet Tilenga/Eacop en Ouganda et en Tanzanie. Elle affirme que ces projets restent nécessaires pour répondre à la demande mondiale et affirme qu’elle consacre également un tiers de ses investissements aux énergies bas carbone, notamment l’éolien et le solaire. TotalEnergies entend maintenir son objectif de 35 GW de capacité d’électricité renouvelable en 2025, avant 100 GW en 2030, un objectif ambitieux.

Séparation des pouvoirs

Par ailleurs, le groupe a annoncé vendredi avoir refusé l’inscription à l’ordre du jour de l’assemblée générale des actionnaires d’une résolution proposant de dissocier les fonctions de directeur général et de président du conseil d’administration, que regroupent le PDG Patrick Pouyanné.

 » L’unité du pouvoir de direction et de représentation de l’entreprise s’inscrit dans un contexte d’équilibre des pouvoirs particulièrement bien régulé. », justifie le conseil d’administration dans un communiqué.

Une coalition d’actionnaires représentant 0,62% de la capitalisation boursière de TotalEnergies avait soumis ce projet de résolution, purement consultatif, qui vise « mettre fin au cumul des fonctions de président et de directeur générall», tout en maintenant Patrick Pouyanné dans son poste de PDG. Pour les actionnaires à l’origine de la résolution consultative, la concentration excessive de « pouvoirs entre les mains d’une seule et même personne » présente des risques de conflits d’intérêts.

Le texte a été soumis par la fondation Ethos, qui représente les fonds de pension en Suisse et une coalition de 19 investisseurs internationaux, coordonnée par l’organisation française Forum pour l’investissement responsable (FIR), dont fait partie Achmea Investment management (Pays-Low, 218 milliards d’euros d’actifs). sous gestion), Candriam (Belgique, 144 milliards) ou AP7 (Suède, 102,4 milliards).

Dans une réaction transmise à l’AFP vendredi après-midi, la fondation Ethos et le FIR ont indiqué « constate avec surprise que le conseil d’administration de TotalEnergies a décidé de ne pas accepter la résolution consultative des actionnaires (…) présentée par des actionnaires représentant plus d’un milliard d’euros du capital de TotalEnergies « . Ils  » considèrent cette décision comme un obstacle à la démocratie actionnariale. Les moyens juridiques disponibles pour protéger les droits des actionnaires et leur permettre de s’exprimer sur une question aussi essentielle que la gouvernance d’entreprise seront examinés. », préviennent-ils.

Dans son communiqué, le conseil d’administration « invité » actionnaires à déposer un « point de l’ordre du jour », plutôt qu’une résolution consultative. TotalEnergies affirme également à l’AFP que le groupe « respecter la loi  » Et  » ne souhaite pas créer de jurisprudence » sur l’inscription d’une résolution consultative sur le mode de gouvernance à l’ordre du jour de l’Assemblée Générale, qui se tiendra le 24 mai.

 » Nous n’avons jamais eu, en droit français, une société qui ait inscrit à l’ordre du jour de son Assemblée Générale une résolution consultative portant sur l’unification ou la dissociation de fonctions. », a souligné un cadre proche du conseil d’administration.  » Il n’y a pas de précédent, ça n’existe pas « .

Pour rappel, le conseil d’administration s’est prononcé en septembre dernier en faveur de la reconduction de Patrick Pouyanné pour un 4e mandat de 3 ans, que les actionnaires doivent encore approuver fin mai.

Parmi les sociétés cotées au CAC 40, l’indice phare de la Bourse de Paris, une douzaine d’entre elles cumulent les deux fonctions. Une nouvelle pourrait s’ajouter, le groupe Publicis ayant récemment annoncé vouloir modifier sa gouvernance en ce sens, à l’occasion de son Assemblée générale du 29 mai.

(Avec l’AFP)

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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