«Oppenheimer» suscite des réactions mitigées au Japon
Près d’un an après sa sortie aux Etats-Unis, le film Oppenheimer est arrivé dans les salles japonaises ce vendredi 29 avril. Le public de ce pays, le seul à avoir été victime d’une attaque nucléaire en temps de guerre – c’était il y a soixante-dix-neuf ans – a réservé un accueil mitigé au film. Certains étaient excités, certains étaient émus et tristes, et un bon nombre étaient mécontents.
Deux hommes rencontrés par l’Associated Press devant un cinéma de Tokyo ont fait l’éloge du film. L’un des deux a souligné que le sujet était d’un grand intérêt pour les Japonais, même s’il était également difficile sur le plan émotionnel. Le deuxième spectateur a apprécié les scènes illustrant l’agitation intérieure de Robert Oppenheimer.
En revanche, Takashi Hiraoka, ancien maire de la ville d’Hiroshima, s’est montré critique. Dans cette ville du sud-ouest du Japon, l’une des deux bombes atomiques larguées par les États-Unis en 1945 a tué des centaines de milliers de personnes. « Du point de vue d’Hiroshima, l’horreur des armes nucléaires n’a pas été suffisamment représentée», a-t-il déclaré selon les médias japonais lors d’une avant-première du film. « Le film a été réalisé de telle manière qu’il valide la conclusion selon laquelle la bombe atomique a été utilisée pour sauver des vies américaines.»
Un film partiellement anti-guerre
En dehors du Japon aussi, certains pensent queOppenheimer est imparfait, surtout en tant que film anti-guerre. Selon The Guardian, les militants du désarmement nucléaire craignent que le film mette trop l’accent sur le progrès scientifique, ce qui diminuerait sa capacité à persuader les gens de la menace existentielle des armes nucléaires. Carol Turner, coprésidente de la branche londonienne de la Campagne pour le désarmement nucléaire, a critiqué la représentation dans le film de Robert Oppenheimer comme étant davantage un héros qu’un méchant, en raison de ses doutes moraux et de la persécution de la part du gouvernement américain.
Néanmoins, le film montre que la conscience collective des Américains a considérablement évolué au cours des dernières décennies, estime Kazuhiro Maeshima, professeur à l’université Sophia de Tokyo et spécialiste de la politique américaine. Il explique qu’à une époque où la justification des armes nucléaires dominait encore l’opinion publique américaine, il aurait été impensable de raconter l’histoire d’Oppenheimer dans un blockbuster.