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Les députés excluent les proches du système

Le retournement de situation s’est produit alors que personne ne l’attendait, dans une salle plus clairsemée que jamais, ce jeudi 6 juin vers 9h30. Après être partis nettement plus nombreux la veille, vers minuit passé, une centaine de députés venaient de reprendre leur débat autour de la possibilité qu’un tiers – qui n’est ni le patient en fin de vie ni un soignant – procède à l’acte d’euthanasie. . C’est ce que prévoyait exceptionnellement le projet de loi sur la fin de vie.

Cependant, l’Assemblée nationale a finalement exclu du système cette « personne extérieure » – majeur, volontaire, éventuellement proche du patient – ​​à une très courte majorité de 43 voix contre 42. Autrement dit, dans les cas où le patient ne serait pas en mesure de s’auto-administrer le produit létal (il s’agit d’un suicide assisté, qui doit être le  » règle  » selon l’esprit du texte), seul un soignant peut le faire (c’est l’euthanasie, qui doit rester la » exception « ). La famille ou les amis du patient peuvent être présents, mais aucun d’entre eux ne sera finalement autorisé à tuer le patient.

« Tourment » et « remords »

Les députés qui réclamaient ce changement étaient majoritairement à droite dans l’hémicycle, mais aussi, pour certains, à gauche et au sein du camp présidentiel. La commission et le gouvernement étaient contre cette modification. Concrètement, ce sont les mots qui disparaîtront de l’article 5 de la future loi : « ou une personne majeure qu’elle désigne et qui se manifeste pour le faire ». Seule la mention d’un  » médecin  » et un  » infirmier « autorisé à pratiquer cette exception d’euthanasie.

C’est entre autres pour éviter les conflits familiaux que les députés ont plaidé pour ce retrait des proches du système. « Je pense qu’on va un peu trop loin »a estimé le MoDem Louise Morel, mercredi 5 juin au soir. « Qu’allons-nous dire aux familles potentiellement déchirées, entre frères ou sœurs dont l’un a été choisi par un patient pour administrer le produit ? »

« La question se pose aussi de savoir à quelles hésitations et tourments on va exposer les personnes en fin de vie en leur demandant de désigner la personne qui réalisera le geste »» a ajouté David Amiel (Renaissance).

Autre argument souvent avancé : les répercussions psychologiques pour ceux qui ont réalisé le geste, et leurs éventuels remords. « On parle toujours du patient, mais il faut aussi penser à celui qui reste ! « , » a répété à plusieurs reprises Jocelyn Designy (Rassemblement National). « Comment vouloir faire son deuil quand on a le poids de la culpabilité après avoir posé cet acte, même s’il a été fait par amour ? »

« Un ultime geste d’amour »

Les notions de » amour  » et de  » compassion  » étaient en effet omniprésentes dans les arguments des partisans de l’intervention directe des proches. Mercredi soir, plusieurs personnes ont tenté de modifier le texte afin que le patient puisse choisir entre s’auto-administrer le produit ou se le faire administrer par quelqu’un d’autre, sans que cela dépende de son incapacité physique.

« Si cette loi doit être une loi de liberté de choix pour soi, si c’est la volonté de l’intéressé qui doit primer, alors il faut voter ces amendements »avait estimé Emmanuel Ferdandes (LFI), évoquant « un ultime geste d’amour de la part d’un être cher. »

Plusieurs députés, notamment à gauche et au centre, ont fustigé cette situation. « logique de tout pouvoir de l’individu »comme le socialiste Dominique Potier. « La liberté sans responsabilité, c’est la jungle, ce n’est pas l’humanisme »a ajouté Frédéric Petit (MoDem), estimant que l’euthanasie est un « acte grave », non seulement pour le patient lui-même, mais aussi pour  » nous tous « .

L’attitude des opposants à « l’aide médicale à mourir » a peut-être agacé le camp adverse, qui les accusait de« obstruction ». Car plusieurs de ces députés (essentiellement de droite) avaient tenté, mercredi soir, d’exclure les soignants de la loi sur l’euthanasie. « Vous nous dites d’un côté que ce ne serait pas un acte médical (…), alors pourquoi voulez-vous maintenant empêcher des tiers de le faire ? « , a déclaré Hadrien Clouet (LFI) jeudi matin.

William Dupuy

Independent political analyst working in this field for 14 years, I analyze political events from a different angle.
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