Le Nouvel Empire – revue du miroir inattendu d’Avatar 2
Championzé
Pour tous ceux qui ont adoré les aventures de César, la suite de La planète des singes : suprématie marque son héritage par un prologue émouvant, qui donne encore plus d’impact à l’indication temporelle qui suit. Nous voilà « plusieurs générations plus tard »observer l’évolution des primates en plusieurs clans, alors que les humains ont continué à régresser intellectuellement.
Comme le précise l’une de ses séquences majeures (la traque d’un troupeau d’hommes et de femmes chassés comme du bétail), Le Nouvel Empire cherche un lien esthétique de plus en plus affirmé avec le film Matrix de 1968. Photographie de Gyula Pados (les deux suites de Labyrinthe) se veut plus lumineux et solaire, moins contrasté que chez Matt Reeves, et par extension moins riche. Cette légère déception est néanmoins compensée par sa raison d’être : brouiller les repères temporels de la saga, tant dans sa narration que dans sa réalisation.
Conseil des primates
Regarde ça La planète des singes 4 consiste à réunir toutes les époques, comme si la première adaptation de Pierre Boulle était soudain enrichie d’effets visuels photoréalistes. Cependant, au cours d’une première partie à la fois pédagogique et incarnée, on comprend que les sociétés de grands singes sont encore loin d’être aussi avancées qu’au moment de leur rencontre avec Charlton Heston. En contact avec notre héros du jour, la touchante Noa (Owen Teague), il s’agit de lois et de rites de passage qui ont été créés organiquement au fil des ans.
Bien sûr, le résultat final n’atteint pas toujours l’élégance poétique de Matt Reeves, mais Il ne faut pas sous-estimer le choix de Wes Ball à la réalisation. Déjà à travers son célèbre court métrage post-apo (le brillant Ruine), le cinéaste nous a fait ressentir un monde après nous avoir plongés dans l’action in media res. C’était aussi la grande qualité du Labyrinthe (notamment dans la gestion du mystère du premier volet), et Le Nouvel Empire confirme ce talent.
Sur le point de rencontrer Ellie
Je vais avoir un (Wes) Ball
Tout comme ses prédécesseurs, ce nouveau Planète des singes ne cède pas aux sirènes de l’action et du spectacle régulier pour réveiller un public soi-disant impatient. Au contraire, il lui fait confiance en mettant en avant la beauté mélancolique de son monde dévastéet la prouesse technologique de notre attachement aux personnages non humains.
Wes Ball prend son temps, et se montre contemplatif à certains moments clés (merveilleuse séquence où Noa ne peut que pleurer la perte de son village). Un choix fondamental, puisque le film est peuplé de protagonistes démiurges et pressés, qui refusent l’évolution lente et logique du monde. Après tout, Le Nouvel Empire admet que tout finit par être oublié, à commencer par le passé dominant des humains sur Terre. C’est juste dommage que le long-métrage mette du temps à développer sa deuxième partie, où Noa se retrouve sous le contrôle d’un roi tyrannique, Proximus (Kevin Durand)prophète qui s’est réapproprié le nom de César pour mieux dénaturer sa philosophie.
César n’est pas là
En transformant cet héritage idéologique en outil du fanatisme religieuxle scénario de Josh Friedman (La guerre des mondes, Avatar 4) impose sa meilleure nouveauté, même si on aurait aimé qu’elle soit un peu plus palpable et approfondie avant l’arrivée du troisième acte. Cela dit, avec ce saut dans la chronologie de la saga, on aurait pu craindre une manière de relancer ses enjeux, et sans doute de réduire la voile sur son nihilisme désespéré, inhérent à sa nature de préquelle. Ce n’est pas ainsi.
Derrière les métaphores les plus évidentes portées par La planète des singes (racisme, maltraitance animale, escalade militaire, etc.), il y a avant tout le constat d’une perversion. Une perversion immuable des êtres, des sociétés et de leurs politiques. L’exigence technique de la saga est justement corrélée à ce rapport à l’entropie. Bien qu’il soit possible de créer des singes parfaits en CGI, leur photoréalisme implique la dégradation du corps et les marques du temps qui passe (cicatrices, cheveux manquants ou décolorés, etc.).
On pourrait aussi reprocher à Wes Ball de ne pas repousser autant les limites du possible que Matt Reeves. Certes, le film rappelle qu’un blockbuster doit avoir au moins ce niveau de finition assez exemplaire, mais Le Nouvel Empire parvient trop rarement à décrocher la mâchoire comme L’affrontement Et Suprématiece qui donnait à chaque fois l’impression d’imposer de nouvelles normes, que ce soit dans les interactions directes des acteurs avec les singes numériques, ou dans le rendu de certains effets (la neige sur les manteaux).
Intelligent comme un singe
Qui a laissé sortir les singes ?
Si l’heure n’est plus vraiment au bouleversement technologique, à l’image du bouleversement hiérarchique du monde présenté par les films, c’est peut-être au fond que La planète des singes a également muté. Suite du premier Avatar, Les origines a marqué une nette fracture entre les humains et les singes, et nous a mis dans la position inconfortable du camp opposé au nôtre, alors opprimé et rebelle. L’homme était l’antagoniste, et son impossible rédemption l’obligeait à s’adapter à la nouvelle espèce « supérieure ».
Désormais, Le Nouvel Empire d’accord avec Avatar 2, où les méchants deviennent à leur tour des Na’vi pour mieux infiltrer un système qui remet en question son idéologie pacifiste. Les limites sont plus vagues et ne peuvent éviter les subdivisions. C’est là que La planète des singes révèle son atout : Mae (Freya Allan)humain qui offre à Noa une forme d’ancrage moral, avant de donner au long-métrage toute sa complexité thématique.
Mae, la surprise du film
Au même titre que Proximus (dont il est le miroir inattendu mais bienvenu), elle agit avant tout par défi à la mort, et par un refus de l’extinction qui reflète à merveille le déni de notre autodestruction (militaire comme militaire). écologique). ).
Plutôt que d’accepter le cours de l’évolution de cette nouvelle nature, les humains recherchent toujours la médaille d’or, malgré une longue défaite. Une fois de plus, nous pensons à James Cameron et à la détermination de ses Na’vi : et si la guerre et l’anéantissement de l’humanité étaient la seule solution pour permettre un monde meilleur ? Peut-être, mais le drame est de voir les singes, tout comme les extraterrestres bleus, souffrir la dégradation de leur utopie en s’inspirant de leur pire ennemi : nous.