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Le nouveau logo du Musée de Londres est un pigeon déféquant : voici pourquoi ce n’est pas dégoûtant

Quel changement pour le musée londonien. En plein déménagement, et après avoir annoncé le retour à son ancien nom de « London Museum » plutôt que « Museum of London », l’institution a dévoilé cet été son nouveau logo : un pigeon en train de faire ses besoins. Pour ce musée qui retrace l’histoire de Londres de l’Antiquité à nos jours, cet oiseau et ses excréments (en or, s’il vous plaît) « illustrent la dualité de l’histoire de cette ville, où les paillettes côtoient la poussière depuis des millénaires », selon l’interprétation de sa directrice Sharon Ament. Comme l’analyse The Conversation, ce logo dénonce également les métropoles qui font la guerre à ce représentant de la faune urbaine.

Naturellement, la mise à jour du logo a suscité son lot de critiques : vulgarité, gêne, gaspillage d’argent. Au-delà de l’aspect visuel, c’est directement le pigeon, supposément inintéressant, que de nombreux critiques s’attaquent. Une vision alignée avec le statut de pestiféré que l’on attribue généralement à cet oiseau et à ses 11 kilos d’excréments annuels. La plupart des grandes villes du monde chassent les pigeons à l’aide d’une architecture urbaine faite de piques et de filets. Les pigeons subissent l’injustice humaine, alors que la colombe, biologiquement identique, bénéficie d’un symbole beaucoup plus sympathique.

Le Musée de Londres défend son choix dans un billet de blog. Le pigeon, qui peuple la capitale britannique et observe ses évolutions depuis mille ans, apparaît comme un « témoin humble et impartial de la vie londonienne ». Une icône, même. Cette longévité montre que la nature trouve toujours un moyen, même dans les villes qui l’oppriment. Puisque les pigeons parviennent à nicher et à prospérer malgré des bâtiments inhospitaliers, la lutte contre eux semble vaine.

Si les humains ont choisi d’admirer l’intelligence des corbeaux et l’ingéniosité des mouettes, ils peuvent aussi devenir sensibles à la résilience et à l’opportunisme des pigeons. Comme le souligne le Museum of London, ce compagnon à plumes n’est pas un envahisseur : il descend des colombes domestiques importées après la conquête normande, au XIe siècle.et siècle. Il a tout simplement troqué les falaises rocheuses contre les toits des villes lorsqu’il a retrouvé sa liberté. Les pigeons sont ainsi un exemple de la faune urbaine que les amoureux de la nature commencent à apprécier.

Les pigeons sont (mal)traités comme certains humains

Le contrôle des pigeons repose implicitement sur le fait que ces oiseaux sont, comme beaucoup de gens, facilement dépeints comme indésirables et déplacés. Pour le sociologue Colin Jerolmack, les pigeons urbains sont considérés comme « des intrus évidents dans des lieux que nous avons décrétés exclusivement réservés aux humains ». Cette définition rend vulnérables les individus qu’elle qualifie, qu’il s’agisse d’animaux ou d’humains. Comme s’il s’agissait d’une simple expérience, l’antipathie envers les animaux urbains s’étend rapidement aux êtres humains. Les sans-abri peuvent témoigner d’une architecture et d’un mobilier urbain hostiles, conçus pour repousser ceux qui sont également considérés comme nuisibles.

Philip Howell, professeur de géographie à l’université de Cambridge (Angleterre), va encore plus loin. Selon lui, il existe un parallèle troublant entre la considération pour les pigeons et celle pour les migrateurs. Ces deux groupes ont été tour à tour accueillis, célébrés, puis de plus en plus diabolisés jusqu’à la création de« environnements hostiles ». L’une de ses précédentes études établit une comparaison entre l’histoire de la migration jamaïcaine au Royaume-Uni et celle du rejet du pigeon.

Mais le choix politique peut être inverse. Et l’art urbain, de l’ironie de Banksy au réalisme d’Iván Argote, aime nous le rappeler. Ce dernier s’est vu confier début août 2024 l’installation d’une sculpture de pigeon de 5 mètres de haut sur la High Line, sorte de « corridor vert » de New York (États-Unis). Avec ce pigeon fièrement posté au milieu de Manhattan, l’artiste franco-colombien veut nous rappeler qu’il y a une part de migrant en chacun de nous et qu’il ne faut pas être si prompt à décréter qui peut rester et qui doit être expulsé (si ce n’est pire).

Le musée de Londres et son pigeon déféquant prennent soudain tout leur sens. Le nouveau logo fait référence à la longue histoire de la ville et aux trajectoires de ses nombreuses communautés, tout en offrant un clin d’œil, avec une touche d’humour britannique, à ses habitants à plumes moins appréciés. Et peut-être suscitera-t-il une grande réhabilitation culturelle du pigeon.

Eleon Lass

Eleanor - 28 years I have 5 years experience in journalism, and I care about news, celebrity news, technical news, as well as fashion, and was published in many international electronic magazines, and I live in Paris - France, and you can write to me: eleanor@newstoday.fr
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