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« L’attractivité repose sur la redynamisation des territoires » (Laurent Saint-Martin, directeur général de Business France)

Avec 1 815 décisions d’investissement enregistrées en 2023 en France, le pays conserve la première place en termes d’attractivité en Europe. Résultat, près de 60 000 emplois créés ou maintenus d’ici 2027. Business France, la structure fondée en 2015 pour aider les entreprises françaises à exporter et convaincre les investisseurs internationaux de s’implanter dans le pays, a soutenu 58 %. de ces projets. Ils viennent de 56 pays différents, avec en tête les États-Unis, l’Allemagne et la Grande-Bretagne. La décarbonation est à l’honneur, avec 205 décisions d’investissement, dont plus de la moitié sont des créations de sites. Laurent Saint-Martin, directeur général de Business France, dévoile les résultats de cette évaluation pour La Tribune Dimanche.

LA TRIBUNE DIMANCHE- Le nombre d’extensions d’investissements a dépassé le nombre de créations l’an dernier. Est-ce une source d’inquiétude ?

LAURENT SAINT-MARTIN- Non. Ils prouvent au contraire que le pays consolide depuis cinq ans son attractivité. Les expansions industrielles sont essentielles. Sans eux, nous risquons à terme de perdre l’investissement initial. Près de 2 000 décisions d’investissement ont été enregistrées en 2023.

Etes-vous satisfait de ce résultat ?

Oui, car cela indique que la France tient sa place dans un contexte international très troublé. Un grand motif de satisfaction pour le gouvernement, le ministre du Commerce extérieur Franck Riester, les conseillers du commerce extérieur – et tous ceux qui œuvrent pour accroître l’attractivité nationale – est que le pays conserve la confiance des investisseurs internationaux. Et la confiance est la clé des décisions d’investissement.

Investissements étrangers : la France reste championne européenne de l’attractivité économique

Le plan américain de réduction de l’inflation, qui prévoit des subventions massives aux entreprises, a-t-il introduit la concurrence ?

Sans aucun doute. Mais le plan France 2030, doté de 54 milliards d’euros, l’avait anticipé : 559 projets sont directement liés à la mise en place de ce dispositif. Notamment en matière de décarbonation – 11% des projets – et d’innovation, deux domaines où la France est perçue très positivement à l’étranger. Plusieurs centres d’excellence sont dédiés aux grandes technologies de demain, dont l’intelligence artificielle et le quantique, comme à Paris-Saclay, Toulouse ou Sophia Antipolis. Sans oublier bien sûr nos secteurs emblématiques, comme l’aéronautique, l’aérospatial ou le luxe. Tous représentent d’excellentes opportunités pour continuer à investir, malgré les tensions géopolitiques. Et même si, aujourd’hui, le « quoi qu’il en coûte » mis en place pendant la crise sanitaire suscite des critiques, il n’en reste pas moins la condition essentielle de l’attractivité actuelle. La compétitivité se joue entre les continents. Et les Etats-Unis restent le premier investisseur étranger en France.

ORIENTATION DES INVESTISSEMENTS DANS LES RÉGIONS FRANÇAISES ENTRE 2014 ET 2023

METHODOLOGIE – L’indice d’orientation sectorielle d’une Région est réalisé en calculant le rapport entre la part d’un secteur dans les projets régionaux et la part de ce même secteur dans les projets nationaux.
Les projets pris en compte sont ceux de la période 2014-2023. Pour un secteur et une Région donnés, un indice d’orientation supérieur à 1 signifie que ce secteur correspond à une part de projets plus importante dans cette Région qu’au niveau national. Plus cet indice est élevé, plus l’orientation de cette Région est forte. Un indice supérieur à 1,5 indique une part de ce secteur dans les investissements de la Région 50% supérieure à cette part au niveau national, ce qui est le signe d’une très forte orientation de la Région concernée dans ce secteur. © LTD / Camille Chauvin

À quoi ressemble la distribution ?régional?

Rien ne se ferait sans les territoires et leurs forces respectives. Chaque région a son
priorités sectorielles, les développe et s’ouvre à d’autres investissements. En 2023, un projet sur deux – et trois sur quatre dans l’industrie – impliquait des villes de moins de
de 20 000 habitants. Les trois quarts d’entre eux sont de nature industrielle. L’attractivité repose avant tout sur la revitalisation des territoires, comme le démontre la relance industrielle de Dunkerque ou celle du Grand-Est, inimaginable il y a seulement dix ans. Toutes les Régions accélèrent : la santé en Centre-Val de Loire, les batteries dans les Hauts-de-France, l’agriculture en Normandie, la tech en Région Paca. L’Île-de-France reste première, mais aucune région n’est plus isolée. Il n’y a pas de ligne diagonale en matière d’investissement. Aux côtés des Régions, les services de l’État, dont la Banque des Territoires, RTE (Réseau de transport d’électricité), France Travail et l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives), se coordonnent pour obtenir les meilleurs résultats. L’attractivité est un engagement collectif.

1 815 décisions
des investissements ont été enregistrés en 2023 en France
1ère place
occupé par la France en termes d’attractivité en Europe
60 000 emplois sera créé ou maintenu d’ici 2027 grâce à des investissements
étrangers

Malgré tout, les Français sont souvent perçus comme pessimistes à l’égard de
de leur propre pays. Pour quoi ?

Le pays a besoin de résultats tangibles pour mettre fin à une certaine autodépréciation, provoquée entre autres par les fermetures successives d’usines pour
décennies. La première place de l’Europe en termes d’investissements internationaux est le meilleur argument pour consolider sa fierté. Nos politiques économiques fonctionnent. La cohérence et la stabilité sont payantes. Il faut être optimiste !

La détérioration des finances le public pourrait-il dissuader certains investisseurs ?
La France n’a aucune difficulté à se financer sur les marchés. La confiance dans le pays n’est pas entamée. Sans nos efforts d’investissement dans l’industrie, nous n’aurions pas retrouvé son attractivité.

La France toujours championne d’Europe

Le baromètre annuel publié cette semaine par EY (qui réalise cette étude depuis plus de vingt ans) maintient la France en tête des pays européens pour les investissements internationaux en 2024, pour la cinquième année consécutive. Si les dirigeants d’entreprises étrangères évoquent de plus en plus de craintes liées à la sécurité ou à la dégradation du climat social ces derniers mois, c’est le coût de la main d’œuvre qui représente le principal obstacle à la mise en œuvre des projets. Le nombre d’investissements dans ces derniers a diminué de 5 % en un an, mais ils sont en baisse dans l’ensemble de l’Europe.