La Namibie, bête noire d’Israël et du Maroc
La Namibie est depuis plusieurs jours dans le viseur de la presse marocaine et d’autres médias du palais royal de Rabat. En cause, la constance de la position de ce pays d’Afrique australe sur la question du Sahara occidental et son soutien au droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Sur la scène africaine, les déceptions continuent pour la diplomatie marocaine. Samedi 24 août, la République sahraouie a pu participer, en sa qualité de membre de l’Union africaine (UA), à la réunion ministérielle de la Conférence internationale sur le développement de l’Afrique (TICAD), à Tokyo, au Japon.
Les représentants du royaume se sont également donnés en spectacle en tentant d’utiliser la force pour exclure le délégué sahraoui.
La déclaration finale de la conférence est une nouvelle gifle pour le Maroc, puisqu’elle a souligné le droit de tous les pays membres de l’UA, y compris la RASD, à participer à ce cadre de partenariat entre le Japon et le continent africain.
Tout en s’en prenant à l’Algérie, dont l’un des délégués a défendu le diplomate sahraoui agressé physiquement par un diplomate du royaume, le Makhzen a aussi dans son viseur la Namibie, coupable d’avoir dénoncé la décision de la France de s’aligner totalement sur les positions marocaines sur le dossier sahraoui.
Dans un communiqué publié le 17 août, le président namibien Nangolo Mbumba a qualifié la décision du président français Emmanuel Macron de «Mépris flagrant des principes du droit international, en particulier du droit à l’autodétermination« .
Dans une lettre publiée le 30 juillet, le président français a informé le roi du Maroc que la France considère désormais le plan d’autonomie présenté par le Maroc en 2007 comme «seul« base pour le règlement du conflit au Sahara occidental.
La Namibie et l’Algérie en première ligne face aux colons marocains et israéliens
« La question du Sahara occidental reste une question de décolonisation et ne peut faire l’objet d’un accord bilatéral contournant les processus des Nations Unies.« , a rappelé le président namibien, accusant la France d’avoir capitulé »complice de l’occupation continue et des violations des droits du peuple sahraoui« .
En affirmant ces vérités, Nangolo Mbumba s’est attiré les foudres des relais du Palais Royal. La presse marocaine multiplie depuis plusieurs jours les attaques au vitriol contre la Namibie et son président. Les attaques ont dépassé toutes les limites, à l’image de cet article du site « le7tv.ma » qualifiant la Namibie de « petit pays mendiant à la solde d’Alger« .
« Alors que ce pays prétend faire la leçon aux grandes puissances, la réalité nous montre une Namibie qui quémande, implorant le Japon de lui accorder la modique somme de 500 000 dollars à l’occasion du sommet de la TICAD.« , écrit le média marocain.
Le mensonge est évidemment trop gros pour passer inaperçu. Si la Namibie avait vraiment dû quémander une telle somme, elle l’aurait fait auprès de ce pays dont elle est censée être propriétaire.l’équilibre« .
Revenus : la Namibie mieux classée que le Maroc
A l’échelle africaine, les ressources de l’Algérie sont colossales. Ce qui échappe également aux journaux marocains, c’est que le PIB par habitant de la Namibie est largement supérieur à celui du royaume (5.000 dollars contre 3.400 dollars).
La Namibie fait partie des six pays africains, avec l’Algérie, le Gabon, la Libye, l’Afrique du Sud et le Botswana, à revenus moyens supérieurs, selon le classement établi fin juillet par la Banque mondiale. Le Maroc est classé dans la catégorie des pays à revenus moyens inférieurs.
La Namibie, l’un des derniers pays africains à s’être libéré du colonialisme (en 1990, de la domination du régime d’apartheid sud-africain), dérange en effet par ses positions en faveur de la libération des peuples. C’est là que sa diplomatie rejoint celle de l’Algérie.
En janvier dernier, le pays africain avait vivement critiqué l’Allemagne pour sa tentative de défendre Israël, qui faisait l’objet d’une plainte pour génocide devant la Cour internationale de justice (CIJ) déposée par l’Afrique du Sud.
Le président Hage Geingob (décédé un mois plus tard) a rappelé à l’Allemagne sa responsabilité dans le génocide namibien du début du siècle dernier (entre 1904 et 1908) au cours duquel au moins 85 000 personnes ont été massacrées, soit 80 % de la population indigène.
L’Algérie et la Namibie ont subi les horreurs du colonialisme et il est dans l’ordre des choses qu’elles se retrouvent aujourd’hui dans la même tranchée contre les derniers avatars du colonialisme dans le monde.