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La France reste dépendante de la Chine dans des secteurs stratégiques

La crise du Covid avait souligné l’importance des importations chinoises en provenance de France dans des secteurs clés. Les déclarations politiques souhaitant atténuer ce lien se sont alors multipliées, sans qu’il soit possible pour l’instant d’observer d’effets concrets.

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Le président Emmanuel Macron rend visite au président chinois Xi Jinping le 6 avril 2023 à Pékin (Chine).  (LUDOVIC MARIN / AFP)

« Nous devons réduire notre dépendance à l’égard d’un certain nombre de grandes puissances. Notamment sur la Chine pour la fourniture de certains produits.» C’est ce que déclarait le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, en mars 2020, quelques semaines après le début de l’épidémie de Covid-19 en France. La crise sanitaire avait ainsi mis en lumière l’importance des importations chinoises dans les approvisionnements français.

Depuis, les déclarations politiques appelant à réduire la dépendance de la France à l’égard de la Chine se multiplient. Emmanuel Macron, qui a accueilli lundi 6 mai le président chinois Xi Jinping, a encore rappelé, la semaine dernière, l’importance de défendre «intérêts stratégiques« de la France et la nécessité de s’engager »des relations économiques fondées sur la réciprocité » avec la Chine, dans une interview au magazine britannique L’économiste.

Une balance commerciale déséquilibrée mais stable

Car depuis les années 2010, la balance commerciale avec la Chine s’est largement stabilisée en faveur de cette dernière. Même si les importations et les exportations augmentent, le rapport entre les deux reste constant. En 2023, la France aura importé environ 71 milliards d’euros de biens et services chinois, dont une grande majorité de produits manufacturés, un chiffre en légère baisse par rapport à 2022.

« Ce déficit de la balance commerciale vis-à-vis de la Chine est en partie compensé par le fait que nous sommes en excédent sur la balance des services, notamment touristique, encore très pénalisée par le Covid., explique l’économiste Isabelle Méjean. Une situation de dépendance qui a peu évolué malgré les déclarations politiques en faveur d’un rééquilibrage.

Mais pour les spécialistes, cette dépendance doit être relativisée. « Si la part de la Chine dans les importations n’est pas négligeable, elle n’est pas non plus majoritaire, car la majorité de nos importations viennent d’Europe.», souligne Isabelle Méjean. En 2019, selon l’Insee, la Chine ne représentait que 9,3 % des importations françaises totales.

Par ailleurs, la France reste étroitement liée à la Chine dans des secteurs moins essentiels, comme le textile. « Enfin, les produits stratégiques fabriqués principalement par la Chine ne représentent qu’une petite partie des produits où il existe une dépendance« , explique Vincent Vicard, économiste au Centre de prospective et d’information internationale.

Certains secteurs toujours soumis à des risques d’approvisionnement

Parmi les produits stratégiques, on retrouve les médicaments et produits pharmaceutiques au sens large, mais aussi les batteries électriques, l’électronique, les smartphones ou encore les ordinateurs. La Commission européenne met donc régulièrement à jour une liste de dépendances stratégiques. « Sur certains de ces types de produits, la Chine a pratiquement un monopole »note Isabelle Méjean.

Mais si la crise sanitaire a mis en lumière les problèmes posés dans certains secteurs, cette situation existe depuis plus longtemps. « Cela se voit souvent dans les secteurs où il existe de grandes économies d’échelle, comme celui de la chimie. Il est bien plus rentable et bien moins polluant de produire de très gros volumes. L’offre mondiale est donc très concentrée», explique le spécialiste du commerce.

Mais la liste des produits stratégiques évolue constamment, rappelle Vincent Vicard. « Par exemple, la Chine est devenue un producteur et un exportateur de véhicules électriques au cours des cinq dernières années. Ce pays, qui était un nain commercial dans le secteur automobile, est devenu le principal exportateur mondial en exportant 5 millions de véhicules en 2023..«  L’importation de certains produits chinois comme les ordinateurs ou les batteries électriques progresse également.

Délocalisations et multiplication des partenaires commerciaux

Or, « dans le contexte de la guerre entre l’Ukraine et la Russie, mais aussi du changement de doctrine américaine, le risque augmente que les liens commerciaux soient utilisés pour imposer des vues géopolitiques« , prévient Vincent Vicard.

Première étape pour réduire cette dépendance : diagnostiquer les éventuelles vulnérabilités. « Et ce n’est pas forcément évident« , souligne Isabelle Méjean. L’économiste cite ainsi le secteur pharmaceutique. « Nous savons qu’il y a de plus en plus de ruptures d’approvisionnement. Mais sont-ils vraiment dus à cet approvisionnement international ? Ou sont-ils liés aux stratégies des laboratoires pharmaceutiques, qui abandonnent un certain nombre de médicaments, ou à une concentration de la production ? »

Face à cette situation, l’Europe (Lien PDF) promeut le « réduire les risques » (« atténuation des risques« ), en multipliant les partenaires commerciaux. Le Conseil de l’Union européenne a par exemple adopté en décembre 2023 un accord commercial avec le Chili, important fournisseur de métaux rares. « Mais il s’agit avant tout d’engagements, avec peu de mesures concrètes derrière eux.« , tempère Vincent Vicard.

« Quelles politiques seront mises en place, dans quel secteur ? Pour le moment, ce n’est pas clair.

Vincent Vicard, économiste

sur franceinfo

Pour tenter de limiter sa dépendance, la France, de son côté, a engagé une politique de délocalisation de certaines industries. C’est le cas dans le secteur des batteries électriques, avec l’ouverture d’une première usine de production de batteries dans le Pas-de-Calais.

Mais pour l’instant, difficile de dire quand ces initiatives auront des effets concrets. « Ce sont de longs processus. Et si, dans certains secteurs, on constate des évolutions, dans d’autres, comme le photovoltaïque, on voit mal se dessiner une réduction des dépendances.« , conclut Vincent Vicard.

Cammile Bussière

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