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La directrice du mouvement anti-Kremlin Evgenia Berkovitch condamnée à six ans de prison

La réalisatrice Yevgenia Berkovich (à droite) et l'écrivaine Svetlana Petriychuk avant leur procès à Moscou, le 8 juillet 2024.

Pendant des heures, assise dans sa cage de verre, Evgenia Berkovitch prend des notes dans son carnet noir. L’œil vif et le sourire moqueur tout au long des audiences, la réalisatrice russe de 39 ans se retrouve réduite depuis un mois et demi au rôle de spectatrice de son procès qui ressemble à un théâtre de l’absurde. Arrêtée le 5 mai 2023, cette figure renommée de la nouvelle vague artistique du Moscou libéral était jugée pour « apologie du terrorisme » Dans un tribunal militaire de la capitale, le spectacle s’est terminé lundi 8 juillet en début de soirée. Le juge, qui avait ordonné que les dernières audiences se déroulent à huis clos, a brusquement accéléré les débats, accordant à Evguenia Berkovitch et à sa compagne de détention, la dramaturge Svetlana Petriychuk, 44 ans, vingt minutes pour préparer leurs ultimes déclarations. Puis il a rendu son verdict. Dans un pays où les juges reprennent quasi systématiquement les accusations du parquet, les deux femmes se savaient condamnées, mais en tant que mère, Evguenia Berkovitch comptait sur une amende et non sur une peine de prison. En vain. Chacune a été condamnée à six ans de colonie pénitentiaire.

Cette condamnation sévère confirme l’intensification de la répression contre toute voix critique à l’égard du Kremlin de Vladimir Poutine. Plus de deux ans après le lancement de la « opération spéciale » En Ukraine, cette main de fer frappe les théâtres et les milieux culturels. Dès le début, Evgenia Berkovitch, ancienne élève de Kirill Serebrennikov, metteur en scène contraint à l’exil, avait critiqué l’offensive militaire. « Je resterai en Russie jusqu’au jour où le risque de prison surviendra »nous racontait-elle en décembre 2022, cinq mois avant son arrestation soudaine. Elle avait alors pris l’habitude d’ajouter des poèmes à ses différents spectacles. « Des versets anti-guerre ! »Elle s’est notamment moquée des autorités qui avaient affirmé que l’odeur dans le théâtre de Marioupol provenait des restes de poissons et non des corps des personnes mortes dans les bombardements, ce qui a été officiellement démenti.

« Chaque théâtre a beaucoup de poissons »Evguenia Berkovitch plaisantait. Ses poèmes étaient destinés aux autorités : « À la surface errent les décorés et les populaires. Froids. Muets. Ils nagent dans les eaux profondes. » Ses spectacles se terminaient autrefois par une minute de silence en hommage aux victimes du conflit. Aujourd’hui, dans le petit théâtre moscovite où ses pièces sont toujours jouées, les représentations affichent complet. Sur cette rare scène indépendante de Moscou, située non loin du tribunal militaire où la réalisatrice a été jugée, les soirées se terminent désormais par un appel en soutien aux deux codétenues. « Nous sommes devenus des pacifistes clandestins »les acteurs et les spectateurs respirent.

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Eleon Lass

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