Mort de sept humanitaires dans une frappe à Gaza: le président israélien présente ses excuses – 02/04/2024 à 21:27

Le président israélien Isaac Herzog a présenté ses excuses mardi soir après la mort, dans la bande de Gaza assiégée et menacée de famine, de sept employés de l’ONG humanitaire World Central Kitchen dans une frappe israélienne « involontaire ».

Basée aux Etats-Unis, l’ONG World Central Kitchen, l’une des rares encore actives dans le territoire palestinien dévasté par près de six mois de guerre entre Israël et le Hamas palestinien, a annoncé qu’elle « suspendait ses opérations dans la région » après la frappe de Lundi à Deir al-Balah (centre).

Resté silencieux jusque-là, le chef de l’Etat israélien Isaac Herzog a exprimé mardi soir dans un communiqué sa « profonde tristesse et ses sincères excuses » après la mort des sept travailleurs humanitaires.

Plus tôt dans la journée, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a reconnu une frappe « involontaire », qualifiant cet « incident » de « tragique ».

« Cela arrive en temps de guerre, nous (…) ferons tout pour que cela ne se reproduise plus », a-t-il ajouté.

Plusieurs pays et organisations, dont l’ONU, qui ont dénoncé un « mépris du droit international humanitaire », ont condamné ce raid, d’une ampleur inédite.

– Indignation internationale –

« Dévastée », l’ONG WCK a confirmé que « sept membres de l’équipe ont été tués à Gaza lors d’une frappe des forces israéliennes ».

« J’ai le cœur brisé et consterné que nous, World Central Kitchen et le monde, ayons perdu de belles vies aujourd’hui à cause d’une attaque ciblée des forces israéliennes », a déclaré la présidente de la WCK, Erin Gore.

Les victimes étaient « venant d’Australie, de Pologne, du Royaume-Uni, (et comprenaient également) un citoyen ayant la double nationalité américaine et canadienne et une personne palestinienne », selon l’ONG.

Depuis le début de la guerre, WCK participe à des opérations humanitaires en fournissant des repas dans le territoire palestinien, où la majorité des quelque 2,4 millions d’habitants sont menacés de famine selon l’ONU. Elle a aidé à envoyer le bateau de premiers secours depuis Chypre via un couloir maritime vers Gaza à la mi-mars.

Alliés historiques d’Israël, les Etats-Unis ont appelé à une enquête « rapide et impartiale », la Maison Blanche se disant « indignée » par ces morts. La Grande-Bretagne a convoqué l’ambassadeur israélien mardi pour exprimer sa « condamnation sans équivoque » de la mort de sept personnes, dont trois Britanniques.

Les victimes du WCK ont été transportées à l’hôpital de Deir al-Balah. Un correspondant de l’AFP a vu cinq corps et trois passeports étrangers à proximité des dépouilles.

Sur une image de l’AFP, on peut voir le corps d’une des victimes portant un T-shirt noir avec le logo de l’ONG. D’autres montrent la carcasse détruite du véhicule, un trou béant dans le toit, juste au-dessus du logo WCK.

– Près de 33 000 morts –

Depuis le début de la guerre, plusieurs ONG présentes à Gaza affirment que leurs employés ou leurs sites ont été touchés par des frappes israéliennes.

En raison de la difficulté d’acheminer l’aide humanitaire par voie terrestre vers le territoire sous blocus israélien, un couloir humanitaire maritime a été ouvert à la mi-mars. Mais le gouvernement chypriote a annoncé mardi que le navire Jennifer, qui avait quitté samedi l’île méditerranéenne à destination de Gaza, était de retour sur l’île, avec près de 240 tonnes de nourriture non livrées, après la grève nocturne.

Le 7 octobre, des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza ont mené une attaque dans le sud d’Israël qui a fait au moins 1.160 morts, principalement des civils, selon un décompte de l’AFP basé sur des données officielles. Selon Israël, environ 250 personnes ont été kidnappées et 130 d’entre elles sont toujours otages, dont 34 sont mortes à Gaza.

Jurant de détruire le Hamas, Israël a lancé une intense campagne de bombardements aériens sur Gaza, suivie d’une offensive terrestre qui a vu ses soldats avancer du nord au sud de la petite bande de terre.

Au moins 32 916 personnes, pour la plupart des civils, ont été tuées dans les opérations israéliennes, a indiqué le ministère de la Santé du Hamas, faisant état de plus de 70 Palestiniens tués au cours des dernières 24 heures dans les bombardements israéliens incessants.

-Netanyahu : un « traître »-

Lundi, après 18 jours d’opérations, les soldats israéliens se sont retirés du complexe hospitalier d’Al-Chifa à Gaza, laissant derrière eux d’immenses destructions et cadavres.

Les soldats « ont tué plus de 200 terroristes et arrêté plus de 900 personnes soupçonnées de terrorisme » sur le site de l’hôpital en ruine, a indiqué l’armée après avoir accusé le Hamas, considéré comme un groupe terroriste par les Etats-Unis et l’Union européenne, d’utiliser l’hôpital comme un « centre de commandement ».

La Défense civile de Gaza, dirigée par le Hamas, a fait état de 300 décès dans et autour de l’hôpital lors d’opérations israéliennes.

Des médecins et des civils présents sur place ont déclaré à l’AFP qu’au moins 20 corps avaient été retrouvés, dont certains semblaient avoir été renversés par des véhicules militaires.

« La condamnation et la dénonciation ne suffisent pas face aux crimes qui continuent dans la bande de Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem », a déclaré mardi à l’ouverture du conseil des ministres le Premier ministre de l’Autorité palestinienne, Mohammed Mustafa.

Selon lui, l’opération à al-Chifa est un « véritable crime de guerre ».

A Jérusalem, et pour la quatrième soirée consécutive, des familles d’otages détenus à Gaza et des opposants au gouvernement de M. Netanyahu se sont rassemblés devant le Parlement israélien pour crier leur colère contre la politique du Premier ministre.

« Vous menez une campagne contre moi, contre les familles des otages, vous vous êtes retournés contre nous. Vous nous traitez de ‘traîtres’ alors que VOUS êtes le traître, un traître envers votre peuple, envers vos électeurs, envers l’Etat d’Israël » » a crié dans le micro Einav Zangauker, dont le fils est retenu en otage à Gaza.