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JO de Paris 2024 – Les plus belles arènes face à la grogne des « moins-vivants »

Depuis huit jours, Paris subit le corporalisme des QR Codes. Là-bas, les chauffeurs de VTC sont aussi en colère, les restaurateurs sont furieux et les natifs du micro-centre s’agacent de vivre derrière des grilles. Pourtant, Paris n’a jamais été aussi beau…

Maintenant que le monde a les yeux tournés vers Lutèce, nous nous sommes amusés cette semaine, lors d’une longue balade à vélo dans les rues de la capitale, à écouter le Parisien moyen s’énerver, discipline dans laquelle il a toujours empilé les médailles. Près du Trocadéro, nous avons d’abord croisé Gabriel, un professeur d’université à la retraite, familier du quartier pour y être né soixante-huit ans plus tôt.Je marche depuis une heure et on m’a déjà demandé mon QR code trois fois, nous a-t-il confié lundi après-midi. Tout cela m’a pris une éternité. Le soleil rend visiblement la lecture des codes-barres difficile et la foule se rassemble aux barrages… Bienvenue dans « l’absurde », mes amis… Depuis le 18 juillet et jusqu’à la fin de l’événement, la capitale est divisée en trois zones (grise, rouge ou bleue) accessibles grâce au « Games Pass » délivré par la préfecture de police ou via des accréditations spécifiques à l’événement. Nous vous épargnerons ici le quadrillage exact de la capitale, car l’usine à gaz en question occuperait soudain la majeure partie de cette page. Plus caustiquement, nous vous dirons seulement qu’en dehors de ces zones, les embouteillages sont soudain plus importants que d’habitude et conduisent, près de la gare Saint-Lazare ou du côté de la place de la République, certains automobilistes à sortir de leur véhicule pour jouer aux policiers de la circulation, le tout dans un concert de klaxons insupportable…

Alors ? Les Jeux Olympiques sont sur le point de commencer et en attendant que les habitants soient tôt ou tard envoûtés par l’événement, il est de bon ton de passer outre les recommandations de l’édile (Anne Hidalgo), qui s’est pourtant donnée à fond pour tenter de faire taire les « « douleur à apprécier » (c’est le terme sous lequel elle regroupe les râleurs de tous bords) et convaincre les Parisiens de ne pas quitter la ville pendant les Jeux Olympiques : « « Ne partez pas, leur criait-elle encore dessus il y a quelques mois. Ce serait stupide ! Restez en ville, ça va être absolument incroyable ! ».

Les Parisiens sont en colère

Ici, c’est Amandine, une quadragénaire mais bon vivant, qui râle contre la vie depuis huit jours.  » en prison « son quartier du centre-ville étant muré par des grilles de 2 mètres de haut, face visible du plan de sécurité encadrant la cérémonie d’ouverture. Là, c’est Charles, un serveur de l’île Saint-Louis, qui s’agace de voir la fréquentation de l’établissement dont il est salarié depuis quatre ans fondre comme neige au soleil, la nécessité d’un QR Code pour rejoindre sa rue décourageant les clients qui n’ont pas encore obtenu le précieux blason. Enfin, on vous épargnera les quelques arnaques aux faux billets, inhérentes à toute grande compétition internationale, ou le vent de colère qui souffle depuis deux mois chez les chauffeurs de VTC, jusqu’ici bannis des voies de circulation « Paris 2024 » dédiées à tous les protagonistes de l’événement et ouvertes à la compétition, soit aux chauffeurs de taxi traditionnels. Pour rappel, la moindre infraction constatée sur ces routes par les milliers de policiers réquisitionnés pour l’occasion (ils sont, pour mémoire, originaires de 43 pays) entraînera une amende de 135 euros pour le contrevenant. Enfin, on ne vous dira rien des tickets de métro qui sont soudainement passés à 4 euros (2,15 euros normalement) ou de ces tickets de RER qui ont connu une inflation similaire…

Le monde va tomber de sa chaise

Si nous ne vous disons rien de tout cela, c’est qu’il faudrait être fou, ou aveugle, ou bien malhonnête, pour ne pas remarquer à quel point Paris est redevenue Paris, à l’approche des Jeux olympiques. Soudain, les verrues sont tombées. Soudain, les chantiers qui fleurissaient ces derniers mois dans des centaines d’endroits de la capitale ont tous disparu, laissant place à des façades immaculées, des haussmanniennes à l’allure noble et des trottoirs généralement exempts de détritus. Sans prévenir, la Ville Lumière a baissé le rideau opaque derrière lequel elle vivait recluse depuis près de trois ans et ce qu’elle a offert à nos yeux cette semaine était, sans exagération, un véritable délice. Dans la rue du Faubourg Saint-Honoré, Katya, le nez au ciel, n’en revenait toujours pas : «Regardez cette beauté… Qu’on aime ou non la maire de Paris, elle a tenu ses promesses et réalisé le lifting qu’elle a toujours annoncé pour notre ville. » C’est que par hasard au cours de cette promenade, nous avons pu aussi constater que les JO de Paris offriront aux 15 millions de visiteurs attendus cet été en Ile de France (à titre indicatif, Paris et sa banlieue comptent normalement 12 millions d’habitants) des panoramas qu’aucune autre ville ayant accueilli l’événement par le passé n’a jamais pu afficher : du haut du Trocadéro, les projecteurs sont braqués sur la Seine, dont les quais porteront bientôt les cyclistes du contre-la-montre ; un peu plus loin, ce terrain de beach-volley dominé par la Tour Eiffel et posé sur le Champ de Mars ; tandis qu’à deux pas de la Dame de Fer, la vasque olympique supportant la flamme éternelle trône au milieu du jardin des Tuileries…

En contemplant Paris ce jour-là, nous nous sommes naturellement dit que le monde tomberait de sa chaise en découvrant les trésors que le COJO (le comité d’organisation des Jeux Olympiques) avait disposés dans les plus beaux endroits de Lutèce et de ses environs immédiats. Car à 18 kilomètres de là, l’effet « waouh » était tout aussi réel au château de Versailles, noble théâtre des épreuves équestres au cours desquelles les chevaux donnaient l’impression de galoper sur l’eau du Grand Canal, à tel point que les pontons érigés sur le plus grand bassin du parc du château étaient conçus pour plonger la cohorte de flâneurs (8,6 millions de billets ont été vendus pour les Jeux Olympiques, un record historique) dans une illusion parfaite. Sérieux ? Maintenant que sonnait le crépuscule de cette croisière à vélo, maintenant que nous tournions le dos au Petit Trianon de Marie-Antoinette ainsi qu’à la dernière demeure de Louis Capet, le « bla bla bla » de la « « douleur à apprécier » s’était soudainement tu… Et c’était bien, mon prince…

Cammile Bussière

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