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« Il faut regarder avec un peu de distance », estime le président Vincent Merling

Ssouvent réticent à s’exprimer dans les médias, Vincent Merling s’est prêté longuement, et de bonne grâce, aux envoyés spéciaux de « Sud Ouest » et de « L’Équipe », ce jeudi, dans le patio ensoleillé du très bel hôtel réservé aux les Rochelais au Cap, Afrique du Sud. C’est que le président du club de la caravelle avait des messages à faire passer.

La Rochelle dispute son premier match de phase finale de la saison. Est-ce toujours une réunion importante ?

Ce qui est sûr, c’est que le club attache une importance particulière, très importante à la Champions Cup. Nous sommes titulaires du titre, il faut honorer ce statut. Du côté de Ronan (O’Gara), on sait que c’est un moment particulier. Concernant ce match en Afrique du Sud, après 27 heures de transport, ce n’est pas simple de gérer ce moment, un gros défi pour nous. Autant y parvenir avec une grande victoire. Ce serait dommage de repartir d’ici avec une défaite. Ce n’est pas possible, c’est vraiment important pour le club.

Que représente pour vous un match de phase finale en Afrique du Sud ?

Personnellement, je n’ai pas de sentiments particuliers. La protection des joueurs est quelque chose de très important pour nous au club, c’est une difficulté supplémentaire. Après être venus ici en décembre, nous revenons en phase finale mais pour moi, c’est un match comme un autre. Que ce soit en Afrique du Sud ou ailleurs, il n’y a pas de constat particulier quant au dépaysement. Sur le plan sportif, ça va être une équipe difficile à battre, dans un contexte qu’on ne connaît pas et qui sera certainement, d’après ce que je sais, moins hostile, avec moins de supporters qu’en Europe. Cela ne change rien, il faut gagner pour affronter à nouveau les Leinstermen la semaine prochaine (Leinster accueille Leicester dans l’autre 8ème de tableau rochelais, NDLR).

Cette saison n’est-elle pas vraiment particulière, entre la Coupe du Monde, plus de doubles que d’habitude et ce double déplacement au Cap ?

C’est compliqué. Heureusement, cela nous a permis de constater que nous avions des jeunes très talentueux qui pouvaient relever les défis de ce niveau. C’est une grande satisfaction. A côté de ça, c’est vrai qu’il y a ces doublons, avec une difficulté à jouer sur les deux côtés. Pendant la Coupe du monde, c’est complexe à gérer. Mais nous sommes dans le money time et s’il gagne, ce sera merveilleux.

Vous attendiez-vous à une saison aussi compliquée, matérialisée par une entrée tardive dans le top 6 ?

J’ai toujours peur de ces fenêtres internationales. Je me suis toujours battu pour qu’il y ait un juste équilibre entre le championnat national et ces fenêtres internationales. La Coupe du monde allait et venait, nous savions qu’il y aurait des faux doubles, que nos joueurs, s’ils gagnaient, seraient euphoriques, et s’ils perdaient, ils seraient dévastés. C’était très compliqué pour certains, je le sais, on le voit encore. On a aussi eu des blessures, on n’a pas pu faire les rotations qu’on voulait. Ce que je crains à l’avenir, c’est qu’avec la Coupe des nations (tous les deux ans à partir de 2026, NDLR), on retombe chaque année dans des mini-Coupes du monde avec un gros problème de gestion. joueurs. Cela devient compliqué. Il faut être performant en Top 14 où les équipes n’ont pas d’internationaux, contrairement au Stade Rochelais – qui est une grande fierté – et en double c’est quand même un handicap. Et puis il y a la Coupe d’Europe, certains clubs la jouent, d’autres pas. Cela crée une grande disparité dans le calendrier, avec des périodes de repos pour les uns, de grandes exigences pour d’autres, comme nous. C’est un défi de jouer sur les deux tableaux. Ce sont des enjeux positifs, mais cela reste des enjeux de gestion humaine.

« Nous avons des jeunes très talentueux qui peuvent surmonter les défis de ce niveau. C’est une grande satisfaction »

Les Rochelais, à l'échauffement ce jeudi, pour leur entraînement collectif de l'après-midi.


Les Rochelais, à l’échauffement ce jeudi, pour leur entraînement collectif de l’après-midi.

BD

Un équilibre international à trouver

Concernant une évolution en matière de calendriers, notamment internationaux, Vincent Merling n’y croit pas « trop. On nous dit que le Six Nations est plus serré, que ceci, que cela, mais il y a aussi des périodes d’entraînement, encore une fois, avec ces fameux faux doublons. Je n’attends donc pas grand-chose. Il y a une défense des intérêts par les uns, une défense des intérêts par les autres. Il n’y aura jamais de communion totale. Ce que je crains le plus, c’est le problème financier des fédérations internationales qui voudront multiplier les fenêtres internationales avec des compétitions qui leur permettent d’augmenter les revenus. A supposer que ces matches, qui n’ont pas d’importance sportive particulière, soient une réussite financière. »
S’il estime que la gestion des tournées estivales va dans le bon sens, avec moins de cadres et plus de jeunes, il pointe la question du « Tournoi des moins de 20 ans, qui se déroule en même temps que les Six Nations ». J’ai senti de profonds désaccords au sein de la direction des deux sélections (avec les clubs, NDLR) et une vigilance accrue pour les années à venir. Ce n’est pas la solution. Il doit y avoir un écart, car si on ne peut pas remplacer nos internationaux par nos meilleurs jeunes, c’est une aberration. J’espère que nous ferons les choses en bonne entente pour que les choses soient mieux gérées au plus haut niveau. Mais je suis sceptique, les problèmes des différentes fédérations… quand on parle des Sept Nations avec l’Afrique du Sud… On en parle, ce n’est jamais décidé mais à un moment donné ça arrivera, il y aura un bureau qui le fera. décider, sans consultation. »
Il dit cela sans aucune preuve concrète. « Mais quand un fonds d’investissement (CVC, NDLR) s’y intéresse avec une contrainte d’aider les fédérations, les Six Nations… Il y a un paiement en contrepartie, aux sociétés commerciales des différentes institutions qui doivent rendre l’ascenseur. à ce fonds d’investissement, souligne Vincent Merlining. Il va falloir trouver des solutions et j’ai peur que cela n’aille pas dans le sens de notre championnat national. »

Le club confirme sa stabilité, alors qu’il connaît une saison plus complexe, avec un bilan équilibré (12 victoires et autant de défaites). Nous ne vous avons pas entendu parler malgré des résultats contrastés…

Il y a une identité culturelle forte à La Rochelle, qui est une solidarité totale. Je ne crois pas qu’un discours du président ait une importance particulière. Encore une fois, donner l’exemple est, selon moi, la meilleure gestion possible. C’est ce qui nous permet de maintenir cette compétitivité du club, même dans une période plus difficile ou lors de doubles, surtout quand on combine cela avec des blessures sur des joueurs importants. On n’en parle pas beaucoup, mais on a quand même eu jusqu’à 14 joueurs indisponibles, parfois. Mais nous avons de très bons jeunes, ils l’ont prouvé. J’insiste là-dessus car, très sincèrement, ce qui fait continuer à grandir notre club, c’est qu’on se rend compte que l’herbe n’est pas plus verte ailleurs et que nos jeunes sont capables de relever des défis. des défis que nous pensions insurmontables pour eux, car ils étaient jeunes mais pleins de talent quand même. C’est extrêmement positif, donc il ne faut pas se concentrer sur un moment précis mais il faut regarder un peu avec distance. Mettre en lumière la gestion sportive, financière et structurelle du club et se dire qu’on est à l’abri du danger, même s’il y a une saison un peu moins aboutie. Quoique… Là par exemple, je sens eux (les joueurs, NDLR), aujourd’hui, qu’il y a une sorte de tranquillité. Peut-être que c’est lié à notre comportement, nous, dirigeants, en n’ayant pas semé l’inquiétude, mettons une pression particulière. Si nous sommes un cas isolé en matière de management, alors j’en suis très fier.

Cette tranquillité au sein du groupe et le cadre idyllique de votre hôtel du Cap n’entraînent-ils pas un risque avant le match décisif face aux Stormers ?

Je suis concentré à 200% sur le match, je gâche parfois mon plaisir personnel et collectif en ne faisant rien d’autre dans un tel cadre. Mais je veux sentir que les joueurs sont prêts, que ce n’est pas le Club Med. L’expérience m’a fait sentir aujourd’hui que ce n’est pas le cas, même dans ce cadre idyllique. Il est important d’avoir de la détermination. Nous pourrions peut-être perdre, et si nous le faisons contre des gens meilleurs que nous, c’est du sport. Mais je ne regrette pas, après coup, que nous ayons été d’heureux vacanciers ayant profité des lieux…

Vous avez des retours qui peuvent aussi changer le visage de l’équipe…

Je l’espère. Une chose est sûre, c’est que petit à petit, nous récupérerons tous nos joueurs blessés, et j’espère qu’il n’y en aura pas de nouveaux. Parce que cela permet à notre coach et à son staff d’avoir une gestion plus facile et de préserver l’intégrité des joueurs par rotation. Ne plus pouvoir le faire est un problème humain très fort, les joueurs peuvent se blesser car ils sont surmenés. J’ai une telle confiance en Ronan et son équipe dans la gestion du groupe… mais s’il n’arrive pas à continuer, il peut être l’homme le plus intelligent, à un moment donné les choses se bloquent.

Vous sentez-vous préoccupé par la santé des joueurs ?

Non, pas spécialement car pour être clair, nous nous occupons des joueurs à 200%. Mais, sur le plan sportif, on pourrait rencontrer – je l’espère si on se qualifie dans les 6 – des équipes qui n’ont pas d’internationales, et qui ne jouent pas de Coupe d’Europe. Cela veut dire que, quelque part, il y a une forme d’iniquité, car un groupe reposé va pouvoir affronter un autre groupe plus stressé. Je me pose cette question : comment pouvons-nous être compétitifs jusqu’au bout sur les deux tableaux ? C’est toujours un défi, un défi.

« Il faut des groupes plus importants, je pense que ce serait bénéfique pour la santé des joueurs »

Quelles solutions proposez-vous ?

À partir du moment où les équipes ne jouent pas le jeu de cette compétition – qu’il s’agisse de la Champions Cup ou du Challenge – très importante pour le rugby, pour le promouvoir et ne pas avoir besoin de chercher une autre nation (comme nous l’avons fait avec l’Afrique du Sud), puisque nous avons un plafond salarial plus élevé quand nous avons des internationaux, pourquoi ne pas le faire aussi en fonction des résultats en Coupe d’Europe ? Nous savons très bien que nous avons besoin d’un effectif plus nombreux pour être compétitifs dans cette compétition… Cela me semble juste et logique. Nous ne demandons pas d’argent, mais d’avoir un groupe plus grand.

N’avez-vous pas évolué de ce point de vue ? Sur la question des droits TV, vous êtes historiquement contre une forme de méritocratie au détriment d’un partage équitable entre les acteurs du Top 14 et de la Pro D2…

Soyons clairs, je suis contre la méritocratie, financièrement parlant, dans la mesure où le premier ne doit pas toujours gagner plus que le dernier. Cela nous permet de promouvoir un championnat « mauvais » par tout le monde. Mais en termes de personnel, il est vrai que jouer pleinement les deux compétitions pour défendre le rugby français à l’échelle européenne entraîne des problèmes de personnel. Autant on peut avoir deux ou trois acteurs supplémentaires pour pouvoir répondre à cette contrainte forte.

Comment déterminez-vous si une équipe joue dur ou non en Europe ?

Par les résultats. Après, comment, pourquoi, à quel niveau… Je ne dis pas que c’est la vérité mais ça mériterait d’y réfléchir. Une chose est sûre, les saisons vont se ressembler avec de faux doublons, des joueurs surmenés… à un moment donné, il faudra des groupes plus importants, je pense que ce serait bénéfique pour la santé des joueurs.

Vous rencontrez des difficultés à recruter en raison du plafond salarial ?

Nous sommes au sommet du plafond salarial, comme beaucoup, et c’est tant mieux ! C’est au club d’être plus malin que les autres pour pouvoir bien recruter, bien retenir et bien entraîner. Non, tout va bien de ce point de vue. Et comme on le disait, le meilleur recrutement, c’est de garder ses joueurs. Parce que les stars de partout ne sont pas toujours des stars ici.

Jeoffro René

I photograph general events and conferences and publish and report on these events at the European level.
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