En Allemagne, procès à Francfort d’un prince et de sa cour qui ont planifié un coup d’État
KIRILL KUDRYAVTSEV / AFP
Des barbelés sécurisent une salle d’audience temporaire construite pour le procès d’un prince et de sa cour qui ont planifié un coup d’État en Allemagne, qui commence le 21 mai à Francfort.
INTERNATIONAL – Une affaire sans précédent dans l’histoire récente de l’Allemagne. Le procès spectaculaire d’un groupe tentaculaire de théoriciens du complot d’extrême droite, composé d’un prince, d’anciens officiers de l’armée et d’un ex-député d’extrême droite, qui voulaient renverser le gouvernement allemand, se déroule ce mardi 21 mai devant le tribunal.
Ce procès devant le tribunal de Francfort est le deuxième concernant cette affaire qui implique au total 26 suspects, dont la révélation fin 2022 a stupéfié le pays. Un premier procès s’est ouvert fin avril sous haute sécurité contre neuf autres membres du gang à Stuttgart. Le reste du groupe sera jugé à Munich à partir du 18 juin.
La plupart répondent « participation à un groupe terroriste » qui était « fixer l’objectif d’éliminer l’ordre étatique par la force » et de « préparation d’un acte de haute trahison ».
Parchemin Olaf Scholz enchaîné
Parmi les neuf accusés de Francfort figure un agent immobilier aristocratique autoproclamé connu sous le nom de prince Henri XIII, rapporte Le gardien. Mais aussi la petite amie russe de ce prince et sept autres membres fondateurs, dont un ancien policier et un ancien juge, aujourd’hui député du parti d’extrême droite AfD.
Ils envisageaient d’envahir la chambre des députés de Berlin, le Bundestag, pour arrêter les élus et faire tomber le gouvernement. Selon le quotidien britannique, ils voulaient aussi faire défiler le chancelier Olaf Scholz enchaîné à la télévision allemande à Berlin dans l’espoir de rallier les Allemands à leur coup d’Etat.
Si le putsch réussit, le prince Henri, 72 ans, le dit aussi «Prince Reuss» et descendant d’une lignée de l’État de Thuringe, espérait devenir le nouveau chancelier de l’Allemagne. C’est notamment dans son château de Bad Lobenstein que se tenaient des réunions clandestines.
Ingérence de Moscou ?
Autre membre éminent : Rüdiger von Pescatore, 70 ans, ancien lieutenant-colonel de l’armée allemande, commandant d’un bataillon de parachutistes dans les années 1990, également soupçonné d’être l’un des fondateurs du groupe.
S’ajoute également une magistrate de 56 ans, Birgit Malsack-Winkemann, ancienne députée du parti d’extrême droite AfD de 2017 à 2021 et passionnée d’astrologie.
Selon le parquet fédéral, la Russe Vitalia B., compagne du prince, et poursuivie de son côté par la justice pour avoir soutenu le groupe, aurait « mis en contact (…) avec le consulat général de Russie à Leipzig et l’y a accompagné en juin 2022 ». Il a cherché à s’assurer le soutien des autorités russes, même si au moment du démantèlement de la cellule, le Kremlin avait, comme à son habitude, nié toute ingérence.
Le réseau s’était donné les moyens de ses ambitions, avec « environ 500 000 euros » disponible, ainsi qu’un « un arsenal d’environ 380 armes à feu, près de 350 armes blanches ainsi que 500 autres armes et au moins 148 000 cartouches »selon les enquêteurs. « Il était clair pour les membres (du petit groupe, ndlr) que le rachat en préparation entraînerait la mort de personnes »ont-ils estimé.
Un groupe nourri « de mythes sur Internet »
Les membres du groupe, qui comprend également un ancien colonel de l’armée, un ancien soldat des forces spéciales du KSK et un ancien policier, sont en détention provisoire depuis le raid de décembre 2022.
Considéré comme « la plus grande affaire de sécurité de l’État de l’histoire récente » d’Allemagne, selon l’hebdomadaire Spiegell’enquête se penche sur « le monde bizarre et fou » d’un groupe nourri « Mythes Internet, haine et croyance aux forces cosmiques ». Ils sont particulièrement influencés par l’idéologie de « Reichsbürger » (citoyens du Reich, ndlr), un mouvement hétéroclite qui prive la République fédérale d’Allemagne de toute légitimité.
Selon le parquet fédéral, les accusés prétendent que l’Allemagne est dominée par un « secte conspiratrice d’élites pédophiles ». Une idéologie qui n’est pas sans rappeler également le mouvement conspirationniste QAnon venu des États-Unis.
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