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Économie. Qu’est-ce que le « salaire décent » promis par Michelin ?

« Le Smic n’est pas un salaire décent », a déclaré mercredi le président du groupe Michelin, Florent Menegaux, dans les colonnes de Parisien. Le fabricant de pneumatiques a donc décidé de mettre en place un « salaire décent » pour l’ensemble de son personnel. Il s’agit d’une rémunération « permettant à chaque salarié de subvenir aux besoins essentiels de sa famille (alimentation, logement, transport, éducation des enfants, frais de santé, etc.) mais aussi de constituer une épargne de précaution et d’acquérir des biens de consommation », détaille le groupe dans un communiqué publié mercredi.

Michelin se base sur la définition de « salaire décent » inscrit dans le Pacte Mondial des Nations Unies. Cela indique que « les entreprises doivent payer un salaire décent (parfois aussi appelé salaire vital) permettant aux travailleurs d’acquérir des biens et services fondamentaux (logement, alimentation, santé, éducation, transport, habillement mais aussi épargne) pour eux-mêmes et leur logement ».

« C’est de plus en plus compliqué de vivre avec le Smic en France »

Une définition similaire est donnée par l’Organisation internationale du travail (OIT) « le niveau de salaire nécessaire pour assurer un niveau de vie décent aux travailleurs et à leurs familles ». La coalition Global Living Wage déclare que « les éléments d’un niveau de vie décent comprennent la nourriture, l’eau, le logement, l’éducation, les soins de santé, le transport, l’habillement et d’autres besoins essentiels, y compris la préparation aux événements imprévus ».

« La rémunération au sens large doit servir à consommer (payer son loyer, faire ses courses, faire le plein d’essence dans sa voiture) mais aussi à se protéger (avoir une bonne couverture santé, n’hésitez pas à aller voir son médecin…’ il le faut) mais aussi pour économiser. Le fait est que depuis plusieurs années, il est de plus en plus compliqué de vivre avec un Smic en France », analyse Sandrine Dorbes, experte en rémunération et conférencière.

Au-dessus du salaire minimum

Mais alors quel doit être le montant de ce « salaire décent » ? Le Pacte mondial des Nations Unies indique qu’il est « souvent bien supérieur au salaire minimum (…) mais aucune norme n’est établie pour le déterminer ou le réguler ». « Il n’y a pas de définition universelle, je pense qu’il ne peut pas y avoir de définition nationale. C’est une vraie question personnelle, politique, qui dépend du point de vue de chacun sur le sujet », estime Sandrine Dorbes.

En 2016, le gouvernement britannique a établi un «salaire vital national – un salaire vital national – avec pour objectif d’atteindre « 60 % du revenu salarial médian ». Ce salaire vital national est destiné aux salariés de plus de 21 ans (depuis le 1euh En avril, il était auparavant limité aux plus de 23 ans et est fixé à 11,44 livres (£) par heure. Les salariés de moins de 21 ans bénéficient du salaire minimum, fixé à un niveau inférieur (8,60 £ pour les 18-20 ans et 6,40 £ pour les 16-18 ans).

Au moins 1 621 euros mensuels pour une personne

En France, le Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale (CNLE) estimait en 2022 qu’en moyenne, « le seuil de vie décent se situe autour de 84 % du niveau de vie médian ». Le niveau de vie médian correspond à « un revenu disponible de 1 930 euros par mois pour une personne seule et de 3 474 euros par mois pour un couple avec un enfant de moins de 14 ans », indiquent les dernières données de l’Insee sur le sujet. Le salaire décent correspondrait donc à un montant de 1 621 euros pour une personne seule et de 2 918 euros pour un couple avec un enfant.

Ce calcul est similaire à celui réalisé, en septembre 2023, par Pierre Concialdi. Dans une étude, l’économiste a calculé le revenu mensuel décent nécessaire à une personne en fonction de la composition de sa famille. Selon lui, une personne seule aurait besoin de 1 630 euros net par mois pour subvenir à ses besoins, une famille monoparentale de 3 003 euros, un couple sans enfants de 2 273 euros et un couple avec deux enfants de 3 744 euros.

Différencié selon les territoires

Chez Michelin, « en moyenne, le salaire décent représente entre 1,5 fois et 3 fois le Smic », a indiqué jeudi Florianne Viala, directrice des rémunérations du groupe. Surtout, l’entreprise a choisi de mettre en place « un salaire décent » différencié selon le lieu de résidence.

Le « salaire décent » d’un salarié parisien du groupe Michelin sera ainsi de 39 639 euros brut par an, alors qu’il sera de 25 356 euros pour un salarié résidant à Clermont-Ferrand. Au Brésil, le salaire « décent » de Michelin est de 37 347 réaux (soit 6 674 euros) et en Chine de 69 312 yuans (soit 9 000 euros). « Ce n’est un secret pour personne, nous ne vivons pas de la même manière d’une ville à l’autre. Il y a des villes où c’est très compliqué car on a du mal à se loger, à se déplacer… Il y a 20 ou 30 ans, il y avait des différentiels de salaires entre Paris et la province. Nous avons effacé cela pour des raisons d’équité interne et de mobilité », rappelle Sandrine Dorbes. L’OIT elle-même recommande également, dans sa définition du « salaire vital », qu’il ne s’agisse pas d’une « approche unique », mais qu’il reflète « les différences locales ou régionales au sein des pays ».

Une belle opération de communication pour Michelin ?

La décision de Michelin de mettre en place un « salaire décent » n’est pas dénuée d’intérêts économiques. « Michelin peut avoir une image un peu paternaliste, vieille école. Ce qu’ils ont fait s’inscrit dans ce paternalisme mais redonne du peps à leur image. La position est moderne, très actuelle, ancrée dans le débat public et pourrait donner envie à des gens qui ne pensent pas du tout à l’industrie de voir quelles sont les opportunités chez Michelin », analyse Sandrine Dorbes.

Sans salaires d’efficacité. « Michelin a raison de faire cela. D’un côté, ils fidéliseront leurs salariés et de l’autre, ils respecteront les obligations légales, ils seront bien notés et pourront emprunter plus facilement », a également déclaré l’économiste Emmanuelle Auriol sur RTL.

CT

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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