Divertissement

du pur Dupieux sur Arte

CRITIQUE – Dans cette fable rythmée et rusée, rediffusée mercredi à 20h55, le réalisateur français réussit une nouvelle fois à jouer intelligemment avec l’étrangeté.

Ce n’est pas la peine de le répéter. Dans la cave, il y a une trappe. Elle cache un tunnel. Si on la franchit, on se retrouve soudain dehors avec douze heures d’avance et trois jours de moins. C’est un miracle. L’agent immobilier leur a confié cela en secret. Ils ont immédiatement acheté cette maison moderne trop grande pour eux, malgré l’épave de voiture rouillée dans le jardin. Alain (Alain Chabat) et Marie (Léa Drucker) sont très heureux. A 50 ans et quelques, ils sont enfin propriétaires. La particularité de leur maison leur brûle les lèvres. Mais chut. Il faudra un dîner avec un couple d’amis qui ont eux aussi quelque chose de délicieux à leur raconter pour qu’ils brisent le silence.

La folie va peu à peu gagner du terrain dans cette banlieue résidentielle. Léa Drucker devient obsédée par la surprise du sous-sol. Elle ne pense qu’à elle, s’y rend sans cesse, rêve de se transformer en bimbo. Alain Chabat reste impassible au premier étage.

Un clin d’œil au surréalisme

Leurs agendas sont désormais parallèles. Dans quelle époque vivent-ils ? Le mari se laisse vieillir tranquillement. Son patron s’est fait implanter un pénis électronique, une invention japonaise dont Benoît Magimel, qui a plus d’un registre dans son jeu, semble très fier. Sa femme, niaise, rigole en l’entendant raconter ses exploits. Avec ses boucles peroxydées, Anaïs Demoustier en fait trop, façon compétitrice, à moitié nymphomane. Dans sa boutique, elle se jette sur les clients.

Avec Incroyable mais vraiQuentin Dupieux n’a pas peur de l’absurde. C’est un domaine qu’il maîtrise. Il sait jusqu’où aller trop loin. Dans son cas, l’étrange – une mouche géante dans le coffre d’une Mercedes, un quadragénaire littéralement fou de sa veste à franges – fait partie du quotidien. On fait avec. Pas de problème. Un voyage spatio-temporel en région parisienne, quoi de plus naturel ? Un organe artificiel produisant des orgasmes à répétition, pourquoi pas ?

Le réalisateur a l’art d’étirer les scènes, de maintenir le suspense grâce à des dialogues hilarants et des acteurs qui, visiblement, n’en reviennent pas de s’amuser autant. On y voit l’immense misère de l’époque, la frustration qui règne dans les couples les plus soudés, les relations ambiguës au travail. Évidemment, la machine tourne mal. Sinon, ce ne serait pas drôle. Le réalisateur boucle le tout en soixante-quinze petites minutes, là où certains auraient eu besoin d’une éternité.

On entre dans cette folie avec une joie contagieuse. L’humour déjanté n’empêche pas les clins d’œil au surréalisme. Une séquence rend hommage à Un chien andalou. Le dernier mot, s’il en fallait un, c’est la détente. Rien de pesant dans cette fable rapide et astucieuse. Une certaine sagesse s’impose même peu à peu. Quand les gens autour de vous perdent la tête, la solution est simple. Mieux vaut hausser les épaules et aller pêcher avec son chien. Cette morale en vaut une autre. En attendant, il convient de vérifier s’il n’y a pas un trou sous votre maison…

Malagigi Boutot

A final year student studying sports and local and world sports news and a good supporter of all sports and Olympic activities and events.
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