Crise en Nouvelle-Calédonie. Le regard des professionnels de santé sur les violences de ces dernières semaines
Plus de deux mois après le début des émeutes, les exactions continuent dans la zone urbaine. Au sein des quartiers, les tensions sont toujours vives entre habitants et émeutiers au niveau de certains barrages. Comment les professionnels de santé expliquent-ils ces violences ? Éléments de réponse.
Insultés et menacés par des émeutiers, de nombreux habitants du Grand Nouméa témoignent des violences dont ils sont victimes au quotidien. Comme cette femme qui souhaite garder l’anonymat.Quand je marche, on m’attaque, on m’insulte, même si je suis mélanésienne. Je vois qu’il n’y a plus de respect. Même les personnes âgées sont insultées, quelle que soit leur ethnie. » . «
Selon Jean-Paul Helloa, psychologue clinicien, les groupes d’émeutiers ont une organisation sociale bien définie, composée d’un leader, d’un meneur et d’exécuteurs.Celui qui ne se conforme pas à l’objectif du groupe, on va l’appeler comme ça ou comme ça, même s’il s’agit de personnes de la même famille. C’est se conformer à l’objectif du groupe. Et à d’autres moments, si le groupe n’est pas bien organisé, d’autres personnalités, d’autres jeunes, peuvent prendre le dessus. Le groupe dépend des personnalités des éléments qui le composent.«
Le docteur Benjamin Goodfellow, psychiatre, a participé à une enquête sur les suicides en Nouvelle-Calédonie. Selon lui, les atrocités commises depuis le 13 mai peuvent être comparées à un auto-homicide. L’expression d’une rage destructrice sans se soucier de ce qui se passe ensuite. « La nature de cette destruction évoque quelque chose d’autodestructeur. C’est une rage exprimée, mais il y a un manque de considération des conséquences qui touchent directement ces jeunes ou leur entourage immédiat. » Selon ce professionnel, une étude scientifique approfondie sur le comportement de ces jeunes serait utile aux politiques de santé publique.
C’est une perte d’espoir, une perte de foi dans l’avenir, une perte de sens en général.
Benjamin Goodfellow, psychiatre
Le reportage de Natacha Lassauce-Cognard et Cédric Michaut :