Christian Tein, indépendantiste au leadership fort dans le collimateur des autorités
Bien connu des indépendantistes de Nouvelle-Calédonie, le leader de la Cellule de coordination des actions de terrain (CCAT), Christian Tein, est considéré par les autorités comme l’un des instigateurs des troubles dans l’archipel, quand ses partisans saluent LE « direction » d’un cadre « unificateur ».
Arrêté le 19 juin avec dix autres militants, le quinquagénaire fait partie des sept à avoir été transférés le week-end dernier en France métropolitaine en vue de leur incarcération.
Il a été mis en examen notamment pour complicité de tentative d’assassinat et association de malfaiteurs en préparation de crime, après plus d’un mois de violences contre une réforme électorale accusée par les indépendantistes de marginaliser la population indigène kanak.
Doté d’un physique robuste et d’un visage rond, le militant est tombé très jeune dans le chaudron de la cause de l’indépendance de l’archipel du Pacifique Sud.
« Chez les Tein, nous sommes nés avec le cachet de l’Union Calédonienne, c’est comme ça »», plaisante un militant de l’UC, le plus ancien parti politique du territoire.
Le père, Emmanuel Tein, grand chef de l’île Ouen, rattaché à la commune du Mont-Dore dans la banlieue sud de Nouméa, a lui-même été élu de l’UC à l’assemblée territoriale et à la commission municipale, ancêtres du congrès et de la commune. .
Le frère aîné, Tani Tein, aujourd’hui président du conseil coutumier de la grande chefferie du Mont-Dore, a fait de la politique dans les années 1980. Quant au neveu Dimitri Tein Qenegei, il fait partie des militants du CCAT placés en détention provisoire en France.
« Oncle Bichou »
Christian Tein, né en 1968, a grandi dans l’ombre de sa figure paternelle, respecté et connu du nord au sud de la Grande Terre. Une jeunesse entre l’île Ouen et le fief indépendantiste de Saint-Louis, au lieu-dit « Les 4 cocotiers »où résident toujours les Teins.
Dernier garçon d’une famille de dix enfants, il est surnommé « Bichou » par ses parents, diminutif qui a depuis largement dépassé la sphère familiale. « Tous les jeunes militants l’appelaient toujours +Tonton Bichou+ »» dit Aude Forrest, membre de l’UC.
Il était enfant au moment des premiers rêves d’autonomie kanak, et adolescent lors des violences insurrectionnelles des années 1980.
En 1987, son frère Tani Tein est emprisonné lors des « 15 jours de Kanaky » (nom donné par les indépendantistes à la Nouvelle-Calédonie), mouvement organisé pour protester contre le statut alors proposé par l’État.
L’événement aura son pendant en 2024, « les 15 jours de Kanaky » organisé en mai par le CCAT, dont Christian Tein a pris la tête pour mobiliser contre la réforme du corps électoral.
Entré à l’UC comme simple militant, Christian Tein gravit les échelons jusqu’à devenir secrétaire général adjoint puis commissaire général du parti dans les années 2010. Depuis une dizaine d’années, il a également occupé des postes de collaborateur politique au sein des institutions, le dernier en date auprès du président du gouvernement calédonien, Louis Mapou.
« C’est un cadre de longue date (…), un homme de leadership, capable de rassembler, comme il l’a montré avec le CCAT »assure Magali Tingal, de l’UC.
Son grand frère Tani en est convaincu, « on n’a jamais vu un homme aussi rassembleur depuis Eloi Machoro »un enseignant tué par la police le 12 janvier 1985, à qui la jeunesse indépendantiste voue un véritable culte.
Homme de terrain, Christian Tein est présent à tous les congrès et à tous les événements, arrivant souvent parmi les premiers à diriger l’organisation.
Connu de tous les militants et proche des médias, c’est lui qui a été chargé par l’UC en novembre dernier de gérer le tout nouveau CCAT.
Le mouvement, qui n’a aucune existence légale et auquel chacun peut participer, suscite rapidement l’enthousiasme, notamment parmi les jeunes, qui critiquent les partis indépendantistes traditionnels pour leurs compromis, alors que la page du CCAT est blanche.
Christian Tein a toujours nié avoir appelé à la violence.
Ses partisans estiment qu’il a tenté de contrôler un CCAT qui avait échappé à l’UC, quand ses ennemis politiques, au sein du camp loyaliste, l’accusent de duplicité et d’être le cerveau d’une organisation. « terroriste ».