Ce dont Moscou accuse le chercheur français
NATALIA KOLESNIKOVA / AFP
Laurent Vinatier, chercheur français, est jugé à Moscou ce mardi 3 septembre (photo d’illustration en juin 2024)
RUSSIE – Laurent Vinatier devra encore patienter pour connaître son sort. Le procès du Français s’est ouvert à Moscou mardi 3 septembre peu avant midi (heure française), avant d’être aussitôt reporté au 16 septembre. Sa détention provisoire a été prolongée jusqu’au 21 février 2025. Collaborateur d’une ONG suisse, il avait été arrêté le 6 juin en Russie alors qu’il se trouvait dans un café.
« Le tribunal estime qu’il est impossible de commencer l’examen du dossier pénal. L’audience est reportée au 16 septembre à 14 heures »« Nous avons été très surpris de voir Laurent Vinatier se faire rassurer sur la date de son procès », a déclaré la juge Natalia Tcheprassova, après avoir fait part de la prolongation de sa détention, selon des journalistes de l’AFP sur place. L’ajournement avait été demandé car Laurent Vinatier aurait été informé trop tard de la date de l’audience.
Agé de 48 ans, ce chercheur spécialiste de l’espace post-soviétique a travaillé en Russie pour le Centre pour le dialogue humanitaire, une ONG suisse qui intervient dans la médiation des conflits en dehors des canaux diplomatiques officiels. Il est accusé d’avoir collecté des informations militaires. Mais pour la diplomatie française, ces accusations ne tiennent pas. Le mois dernier, le Quai d’Orsay a demandé la libération de tous les « les personnes qui restent détenues arbitrairement en Russie, dont notre compatriote Laurent Vinatier. »
Mardi, l’accusé s’est présenté au tribunal souriant, vêtu d’une chemise bleue et d’un jean foncé. Le HuffPost fait le point sur ce dont le Kremlin l’accuse.
· Laurent Vinatier, « agent étranger » ?
Plusieurs chefs d’accusation ont été retenus contre le Français par la justice russe. Les autorités lui reprochent notamment de ne pas s’être enregistré en Russie comme « agent étranger » pendant qu’il collectionnait « informations dans le domaine des activités militaires » peut être « utilisé contre la sécurité » du pays. Il risque cinq ans de prison.
Laurent Vinatier avait admis ne pas s’être inscrit sous le label de« agent étranger »utilisé en Russie contre les voix critiques et qui leur impose de lourdes obligations administratives, sous peine de sanction. Il avait expliqué lors d’une audience sur son placement en détention provisoire qu’il ignorait que la loi russe l’obligeait à prendre cette mesure.
Au-delà de cela, les services de sécurité russes (FSB) ont affirmé dans un communiqué début juillet que l’accusé avait établi « de nombreux contacts » avec des politologues, des économistes et des experts militaires russes, ainsi qu’avec des responsables. Cette accusation avait fait craindre une inculpation plus grave, par exemple pour « espionnage »un crime passible d’une peine pouvant aller jusqu’à 20 ans de prison.
« Au cours de ses discussions avec ces personnes, il a recueilli des informations militaires et militaro-techniques qui pourraient être utilisées par les services spéciaux étrangers contre la sécurité de la Russie. »a assuré le FSB.
· Que faisait-il réellement en Russie ?
Selon des sources interrogées par l’AFP, le Français travaillait depuis des années sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine, avant même l’offensive russe de février 2022, dans le cadre d’efforts diplomatiques discrets en parallèle avec les Etats. Il mettait par exemple parfois en contact des experts et politologues ukrainiens avec certains de leurs homologues russes.
» Le Centre pour le dialogue humanitaire cherche à rapprocher les parties en conflit en proposant une médiation ou de bons offices. Il mène ce qu’on appelle une «diplomatie parallèle » « expliqué à l’hebdomadaire La vie son ami José Eduardo Pereira, diplômé de l’Institut d’études politiques de Lille et ancien journaliste.
· Demandes de libération rejetées
Marié et père de quatre enfants, Laurent Vinatier est en détention provisoire et a demandé à plusieurs reprises à être assigné à résidence, assurant qu’il n’avait pas l’intention de fuir le pays. Mais ses demandes ont été refusées par la justice russe.
« J’ai toujours voulu présenter de manière appropriée les intérêts de la Russie dans les relations internationales dans mon travail. »a-t-il déclaré lors d’une audience début juillet. « J’aime la Russie, ma femme est russe, ma vie est liée à la Russie »il avait dit.
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