Automobile : les confidences chuchotées de Carlos Tavares à Détroit – Post – 26 août 2024
Ce matin, à 6 heures, France Inter informait ses auditeurs qu’un magasin de l’enseigne Arroyolinos, situé au sud de Madrid, a créé une piste inclinée de 250 mètres recouverte de neige artificielle pour permettre à ses clients de chausser leurs skis avant de faire leurs courses. Elle est ouverte de 10 heures à 22 heures 365 jours par an, tandis qu’un abonnement annuel de 600 € permet d’y accéder cinq fois par semaine. Cela n’est pas de nature à favoriser la neutralité carbone promise par la Commission européenne pour l’année 2050, malgré l’interdiction de la vente de voitures neuves à moteur thermique à partir de 2035. D’autant que les voitures électriques sont de plus en plus chères alors que le prix de la recharge sur nos autoroutes est déjà aussi élevé qu’un plein d’essence ou de diesel. Ajoutons que la concurrence mondialisée dans la production de voitures électriques se traduira aussi par des fermetures de sites et la destruction du capital industriel en état de production.
Dans son édition du 21 août, Le Figaro publie des photos de trois voitures électriques chinoises et précise que « sauf surprise parmi les Vingt-Sept, qui se prononceront sur le sujet d’ici fin octobre, la Commission devrait en effet décider d’appliquer immédiatement – et pendant cinq ans – des taux pouvant aller jusqu’à 36,3 % du prix aux différents constructeurs concernés, en fonction du niveau de subvention reçu ». Trois photos de trois modèles de voitures chinoises illustrent cet article avec ces courtes légendes :
« Droits de douane de 17% recommandés par la Commission pour la marque BYD (en % du prix du véhicule en plus des 10% existants). « Droits de douane de 19,3% recommandés pour le constructeur Geely (qui possède la marque Zeekr) ». « Droits de douane de 36,3% (taux maximum) recommandés pour le constructeur SAIC (qui possède la marque MG) ».
La marge opérationnelle à deux chiffres menacée
Le lendemain, le quotidien « Les Echos » annonçait sur sa Une la présence de « Carlos Tavares à Detroit au siège de Stellantis ». Le titre était suivi de ces phrases explicatives : « C’est à Detroit, dans la capitale de l’industrie automobile américaine, où se trouve le siège de Stellantis, que Carlos Tavares a préféré écourter ses vacances d’été. Le patron du constructeur s’est donné jusqu’à vendredi pour trouver avec ses équipes des remèdes aux maux américains de Stellantis.
« Des stocks d’invendus excessifs, des usines insuffisamment efficaces, un positionnement de modèle discutable, tous ces abus menacent l’exploit d’une marge opérationnelle à deux chiffres que le groupe répète depuis 2021. Le modèle Tavares est remis en cause en Amérique. »
En page 12 du même journal, Guillaume Guichard explique que l’enjeu pour le PDG de Stellantis réside « dans le maintien d’une marge opérationnelle à deux chiffres en 2024 sur l’ensemble du groupe. Un exploit financier répété depuis 2021 pour le groupe, mais inédit pour un constructeur automobile généraliste occidental. Une performance que Carlos Tavares entend imposer comme une habitude. Reste que l’indicateur financier a quelque peu fondu au premier semestre, à seulement 10%, après 12,8% en 2023 et 13% en 2022. »
Selon Guillaume Guichard, le patron de Stellantis a constaté au siège du groupe que « les actions marketing ne sont pas suffisamment professionnelles et efficaces avant de déclarer sous forme de concession : « Nous avons été trop arrogants et quand je dis nous, je veux dire moi. Dans une entreprise qui fait 200 milliards de chiffre d’affaires, on n’est pas au courant de tout. Bien sûr, j’aurais dû voir le problème plus tôt et réagir plus vite. Il m’a manqué des voyants d’alerte. Nous allons en discuter avec les équipes. »
Nourrissez les actionnaires et récoltez 100 000 € par jour
On sait que la rémunération totale de Carlos Tavares s’élevait à 36,5 millions d’euros pour l’année 2023, soit la somme énorme de 100 000 euros par jour. Avec un taux de profit à deux chiffres, la partie variable du salaire perçu par le PDG est nettement supérieure à la partie fixe, tandis qu’un important paquet d’actions gratuites s’ajoute à sa rémunération annuelle.
Reste à savoir si l’augmentation des droits de douane, si elle est mise en œuvre, servira en partie à mieux rémunérer les salariés des usines restées en Europe ou si la taxation des voitures chinoises importées en Europe servira en priorité à augmenter les profits. Reste également à savoir comment réagira la Chine, puisque « Les Echos » du 22 août indiquait qu’elle envisageait de taxer les importations de produits laitiers en provenance des pays membres de l’Union européenne. Sur cette question, l’article de Dominique Chapuis apportait les précisions suivantes :
« Le Vieux Continent est le deuxième fournisseur de la Chine dans ce secteur, après la Nouvelle-Zélande. Les principaux pays exportateurs sont les Pays-Bas, l’Allemagne et la France. En 2023, le montant des exportations françaises vers le pays s’est élevé à 665 millions d’euros, un montant stable depuis 2021. La Chine représente environ 8 % des ventes mondiales françaises de produits laitiers hors de ses frontières, en valeur. Un poids non négligeable. Sans le lait infantile, les ventes à l’export sont réduites à 386 millions d’euros. »
Ajoutons enfin que la Chine, qui importe beaucoup de vin et de cognac de notre pays, menace aussi de temps à autre de réduire ces importations en guise de mesure de rétorsion.
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