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Au Sénégal, un journaliste proche du pouvoir à la tête de la télévision publique

C’est une promotion qui ne passe pas inaperçue à la tête de la Radio-Télévision Sénégalaise (RTS). Si la pratique d’une nomination décidée en haut lieu n’a pas changé, l’arrivée de Pape Alé Niang à la tête de l’audiovisuel public au Sénégal, mercredi 24 avril, annonce un changement de ligne éditoriale. L’ancien directeur du média privé en ligne Dakar Matinemprisonné à plusieurs reprises sous la présidence de Macky Sall, jouit d’une certaine popularité dans le pays mais n’en reste pas moins une figure de division, y compris parmi ses pairs de la profession.

Considéré comme  » fermer «  même « partisan » Du nouveau Premier ministre Ousmane Sonko, du président du parti Pastef dont l’inéligibilité a permis à son bras droit Bassirou Diomaye Faye d’accéder à la fonction suprême le 24 mars, Pape Alé Niang a multiplié ces dernières années les chroniques très critiques du pouvoir. Parfois au prix de sa liberté. Fin juillet 2023, il a été écroué, accusé d’appel à l’insurrection pour sa couverture de l’arrestation de M. Sonko, avant d’être libéré après dix jours de grève de la faim.

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Pour nier les accusations de partisanisme qui lui sont adressées, Pape Alé Niang rétorque avoir reçu les mêmes reproches lorsqu’il ouvrait son micro à d’autres personnalités politiques qui avaient eu des démêlés avec la justice, comme l’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, ou même Macky Sall, avant son arrivée au pouvoir en 2012.

Mais la critique la plus virulente concerne cependant la déception face aux engagements de Pastef. Encourager le mérite dans « certains emplois de la haute fonction publique et du secteur parapublic », il s’était engagé à soumettre les postes à un appel à candidatures. Le remplacement de l’ancien directeur de la RTS Racine Talla, membre de l’ancienne coalition au pouvoir, ainsi que la promotion de dix-sept personnalités à de hautes fonctions publiques ont finalement été décidés en conseil des ministres.

« Un coordinateur, un capitaine » ?

« Je croyais que le nouveau régime allait vraiment lancer un appel à candidatures pour garantir la liberté des journalistes, changer le fonctionnement pour que le pluralisme soit une réalité »» reconnaît désormais avec déception un journaliste de la RTS sous couvert d’anonymat.

« Ce qui est important pour nous, c’est d’avoir un bon réalisateur capable de jouer le rôle de coordinateur, de capitaine »juge pour sa part Mama Moussa Niang, secrétaire générale de la section RTS du Syndicat des professionnels de l’audiovisuel public (Synpap).

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L’un des premiers critères sur lesquels devra être jugé le nouveau patron sera sa tolérance à l’égard de la diversité des opinions dans les programmes de l’audiovisuel public. Au sein de la chaîne de télévision d’abord, critiquée par la société civile et l’opposition pour son manque d’ouverture envers le pouvoir.

Avant que Bassirou Diomaye Faye ne s’y engage, ni Macky Sall ni son prédécesseur Abdoulaye Wade n’avaient tenu la promesse de transformation de leur adversaire. « Les médias d’État enfermés dans la reproduction quasi systématique des discours de pouvoir »rappelle Mamadou Ndiaye, enseignant-chercheur en sciences de l’information et de la communication au Centre d’étude des sciences et techniques de l’information (CESTI) de Dakar.

À la tête d’une « grosse machine »

« Il y a un contrôle virtuel de la direction générale et de ses principaux collaborateurs sur tout ce qui doit apparaître au journal télévisé. Tout discours contraire à la ligne tracée est censuré »confirme le directeur du CESTI.

« La RTS sera forcément ouverte à toutes les tendances dans notre pays car ce n’est pas normal que des opposants soient muselés, car ils n’ont pas la même couleur politique que ceux au pouvoir »a rassuré Moustapha Sarré, le porte-parole du gouvernement le 14 avril sur le plateau de télévision.

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Pape Alé Niang aura fort à faire à la tête d’un « grosse machine », mais « il a l’expérience d’avoir été reporter, présentateur d’émissions, directeur de chaîne de télévision »» croit Maman Moussa Niang.

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Le journaliste qui, au cours de sa carrière, a dû composer avec la méfiance de ses pairs aura désormais la lourde tâche de s’épargner celle de ses nouveaux collaborateurs. « Il a de larges épaules » Et « sera capable de gérer la maison »deux journalistes interrogés sont optimistes. « Il n’a pas le profil du poste mais vient de recevoir une récompense »dit, plus crûment, un de leurs collègues.

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Gérard Truchon

An experienced journalist in internal and global political affairs, she tackles political issues from all sides
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