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en Turquie, la flambée des prix des médicaments inquiète

Avec une inflation de près de 70 %, le pouvoir d’achat des Turcs est fortement impacté. Si l’alimentation reste un domaine sensible, il est un autre secteur touché dont on parle moins : celui du médicament.

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Une pharmacie du centre-ville d'Istanbul, mai 2024. (MARIE-PIERRE VEROT / RADIOFRANCE)

En Turquie, le gouvernement annonce une inflation annuelle de près de 70 % (69,8 %). Selon des économistes indépendants, ce serait plus de 120 %. Le pays est toujours aux prises avec une crise économique qui met la population à genoux et une spirale inflationniste qui peine à s’inverser.

L’alimentation reste un domaine sensible, avec une hausse de quelque 80% à Istanbul notamment, mais il existe un autre secteur touché et dont on parle moins, celui du médicament. Nurten, 84 ans, n’en peut plus : « Je m’occupe de mon mari malade et alité depuis 10 ans. Et si vous saviez combien ça me coûte ! Le gouvernement ne nous donne que le prix d’une couche, comment voulez-vous que je m’en sorte avec ça ! Les couches viennent d’Europe, tout comme la pommade.« 

« L’État ne nous donne rien ! »

Dans le domaine pharmaceutique, comme dans bien d’autres, la Turquie dépend des importations. Ces derniers mois, il y a eu des pénuries d’antibiotiques, de sirop contre la toux, de médicaments contre le cancer… et la chute de la livre turque a fait des ravages. Le taux de change irréaliste proposé par le gouvernement aux laboratoires étrangers a conduit nombre d’entre eux à se retirer du marché turc. Nurten doit parfois se rendre dans plus de dix pharmacies pour trouver ce dont elle a besoin à un prix raisonnable. Et dénoncer le gouvernement. « J’ai acheté trente flacons pour le traitement de mon mari à la pharmacie. ça coûte 300 livres (l’équivalent de 9 euros, ndlr). Je n’en avais que 200, mais comme ils me connaissent, ils m’ont accordé un crédit de 100 livres et j’ai pu aller payer aujourd’hui. Dès que l’argent arrive, il repart immédiatement. Et l’état ne nous donne rien !« 

C’est aussi souvent le problème dans le secteur médical. Nuray Kozonoglu gère une pharmacie dans le centre. Elle jongle avec les génériques, s’est inscrite sur une boucle WhatsaApp de 300 pharmaciens qui s’entraident en cas de pénurie. Mais ce n’est pas assez. « L’inflation affecte bien sûr les médicaments, elle explique. L’Etat en rembourse une partie mais pour certains le reste est très conséquent. »

« Le gouvernement ne rembourse que les médicaments peu coûteux. Les antidépresseurs, par exemple, restent exorbitants. »

Nuray, un pharmacien d’Istanbul

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Or, leur consommation a explosé avec la crise : +75% en 10 ans. Difficultés financières, chômage, angoisse face à l’avenir… Les Turcs consomment aujourd’hui 65,5 millions de boîtes d’antidépresseurs contre 37 millions en 2013.

« La société se sent enfermée »

Rencontré lors de la manifestation du 1er mai à Istanbul, Bilge, un jeune psychothérapeute qui brandit fièrement un drapeau de l’association des psychologues turcs, pointe les responsabilités : «L’une des principales causes de la dépression, elle dit, c’est ce climat d’oppression et de fascisme qui prive les gens de liberté et d’expression. La société se sent enfermée. Et elle ne voit aucune issue. Et nous aussimoi, ajoute Bilge, nous souffrons de dépression et réclamons une meilleure reconnaissance de nos diplômes. »

Bilge, psychothérapeute, a défilé lors de la manifestation du 1er mai à Istanbul.  Elle brandit un drapeau de l’Association turque des psychologues.  (MARIE-PIERRE VEROT / RADIOFRANCE)

Symbole de cette Turquie en grande difficulté, sous sa caisse, Nuray, la pharmacienne, en cache une autre, personnelle, et paie de sa poche les médicaments des plus nécessiteux. La société turque tient toujours grâce à cette solidarité.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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