Après ses consultations, Emmanuel Macron exclut la nomination de Lucie Castets à Matignon
Les représentants du Nouveau Front populaire (NFP) étaient repartis, vendredi matin, plutôt satisfaits de leur rencontre avec Emmanuel Macron. Mais devant les cadres de son parti (Renaissance) et ses alliés (Horizons, Modem, UDI) qu’il a reçus à déjeuner, Emmanuel Macron s’est montré beaucoup plus prudent. Certes, il a admis la nécessité d’une alternance dans le pays et la nécessité d’une « alternance politique », sept semaines après les législatives qui ont placé le NFP comme première force politique du pays, mais sans majorité au Palais-Bourbon.
La nomination de Lucie Castets a, en effet, été écartée par Emmanuel Macron. La perspective de voir des membres de La France Insoumise (LFI) entrer au gouvernement constitue une ligne rouge unanimement partagée par les participants au déjeuner. « S’il y a une majorité contre elle, ce n’est pas possible de la nommer », indique un proche du chef de l’Etat.
Motion de censure contre LFI
« Le président de la République a demandé à chacun des groupes parlementaires quelle position ils prendraient face à différents gouvernements. J’ai indiqué que notre groupe s’était très clairement prononcé en faveur de l’adoption d’une motion de censure immédiate dans le cas d’un gouvernement comprenant des ministres issus de LFI. Comment peut-on cautionner, sans s’y opposer, un ministre de l’Intérieur qui qualifie nos policiers de barbares ? Un ministre de l’Agriculture qui définit nos agriculteurs comme des pollueurs ? Un ministre de l’Economie qui traite nos chefs d’entreprise de bandits ? Et ainsi de suite », a écrit Gabriel Attal, Premier ministre sortant, aux députés Renaissance, qu’il conduisait, à l’issue de la réunion.
« Tout le monde était d’accord sur le fait qu’un ministre LFI au gouvernement n’était pas possible », a déclaré l’entourage d’un participant. Les positions du parti de Jean-Luc Mélenchon sur la Russie et la brutalisation permanente de la vie politique sont autant de facteurs rédhibitoires aux yeux d’Emmanuel Macron. Même constat à droite. Les députés Les Républicains « voteraient immédiatement une motion de censure » contre un gouvernement comprenant des ministres de La France Insoumise, a indiqué Laurent Wauquiez à l’issue de son entretien avec Emmanuel Macron.
Alternance souhaitée
En quête de la majorité « la plus large et la plus stable » possible, ou du moins pour éviter que le prochain gouvernement ne soit censuré quelques jours après sa nomination, Emmanuel Macron assure que le scénario Lucie Castets n’est pas envisageable. La droite, l’extrême droite et le camp macroniste déposeraient immédiatement une motion de censure pour faire tomber son gouvernement.
Emmanuel Macron cherche pourtant une alternance, mais il la veut en dehors du PFN. Il tente toujours de garder la main, estimant que les résultats des législatives ne sont pas « un désaveu complet » et que la configuration actuelle du Parlement est totalement inédite.
Une équation complexe
Un pari difficile à tenir. Selon les participants, le portrait-robot dressé par le chef de l’Etat pour le futur locataire de Matignon serait une personnalité plutôt orientée vers le centre gauche, compatible avec la droite et capable de ne pas être censurée par les députés socialistes et de gauche modérée. « J’ai défendu la nomination d’un nouveau Premier ministre ne venant pas des partis du bloc central, avec un gouvernement représentant un large spectre de sensibilités de la gauche républicaine à la droite, ce qui permettrait probablement d’avancer dans l’intérêt du peuple français », a ajouté Gabriel Attal, précisant que cette position est partagée par l’ensemble des membres de l’ancienne majorité.
Le nom de Bernard Cazeneuve circule, mais il le minimise. « Je n’ai pas été contacté, donc ce sujet n’existe pas », a-t-il déclaré à « Libération ». La nomination de Karim Bouamrane, maire de Saint-Ouen et membre du PS, semble également exclue. La nomination du Premier ministre pourrait prendre un peu plus de temps vu la difficulté de l’équation. Emmanuel Macron se lance donc dans un bras de fer avec le PFN.