A Lyon, Grégory Doucet licencie son assistante culture
Le maire de Lyon a démis lundi de ses fonctions son adjointe à la culture, Nathalie Perrin-Gilbert, sur fond de désaccord politique. Une première fracture de la majorité écologiste à deux ans des élections municipales.
Le Figaro Lyon
Première véritable fracture au sein de la majorité écologiste à Lyon. Lundi, Nathalie Perrin-Gilbert, l’adjointe culturelle de la ville de Lyon, a annoncé avoir été démis de ses fonctions par Grégory Doucet. « Officiellement, c’est parce que j’ai informé la presse, lundi dernier, de la lettre dans laquelle il me demandait de démissionner temporairement de la présidence du conservatoire de Lyon »a déclaré l’élu au journal Progrès .
L’entourage du maire de Lyon avance « une rupture de confiance » avec l’assistante. « Elle ne garantissait plus l’unité de la majorité et le bon fonctionnement de l’administration. La culture est la deuxième délégation la plus importante de la ville, il faut donc une vraie confiance et un contrat sur le fond et la forme. Le rôle du maire est de veiller à cette cohérence.indique un ami proche de Grégory Doucet à Figaro.
Confiance « irréversiblement rompue »
Selon nos informations, le maire a annoncé sa décision par téléphone avant de la graver par email. Une froide missive électronique, preuve de la tension qui règne à l’Hôtel de Ville entre les deux alliés politiques d’hier : « Madame Nathalie Perrin-Gilbert, Compte tenu du contexte (notamment transmission simultanée à la presse d’un email interne que vous m’avez adressé), je tiens à vous informer que la confiance que j’avais en vous dans la conduite de votre délégation a été brisé de manière irréversible. Afin d’assurer le bon fonctionnement de l’administration communale, j’ai donc décidé de retirer votre délégation. Un arrêté sera émis à cet effet ce soir..
Ce limogeage est l’aboutissement d’une lente érosion des relations entre l’élu du groupe « Lyon en commun » et la majorité écologiste. A plusieurs reprises, sur l’affaire du lancer de soupe au Musée des Beaux-Arts, sur l’exposition sur l’histoire de Lyon au musée Gadagne ou encore sur l’avenir du musée Guimet, Nathalie Perrin-Gilbert avait entendu une voix différente de celle de Grégory Doucet. Des propos qui ont peu à peu irrité les rangs de la majorité.
Le maire fait du marketing territorial et oublie l’intérêt général
Nathalie Perrin-Gilbert, ancienne assistante culturelle de la ville de Lyon
Plus récemment, ses divergences sur la direction du conservatoire de Lyon et l’opposition des écologistes à son égard ont fini de consommer cette rupture, Nathalie Perrin-Gilbert indiquant qu’elle fera une liste à part lors du 1euh élection municipale en 2026. « Cela faisait bien longtemps que je n’avais plus confiance dans les écologistes pour gérer la ville dans l’intérêt général et le bien commun », a-t-elle taclé. Et pour clarifier ses pensées Figaro : « La politique est aussi une manière d’être. On ne peut pas dire qu’on fait de la politique autrement, parler d’écologie politique, de démocratie participative et en même temps être un maire qui ne fait que du marketing électoral en s’adressant à des cibles en oubliant l’intérêt général ».
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L’élue explique qu’elle était au bout de ce qu’elle pouvait « faire en termes d’honnêteté intellectuelle et politique ». « Sur la polémique sur le quatrième tracé du musée Gadagne, qui est indéfendable et ni fait ni à faire, le maire m’a demandé de ne faire qu’un avec lui. J’ai fait ce que j’ai pu mais à un moment donné, je ne peux pas non plus me perdre. »poursuit l’ancienne assistante pour justifier son retrait.
Une rupture prévisible ?
Électron libre de la gauche lyonnaise, « NPG » fut d’abord un ami voyageur de Gérard Collomb jusqu’en 2008 avant de devenir l’un de ses plus farouches opposants lors des deux mandats suivants. Ayant obtenu 10,06 % des voix au premier tour en 2020, elle a noué une alliance avec les écologistes pour le second tour. Déjà à l’époque, adversaires politiques et élus écologistes se demandaient, avec un sourire narquois, si cet accord tiendrait, Nathalie Perrin-Gilbert étant réputée pour son franc-parler. Le temps a quelque peu donné raison aux sceptiques.
Dans les rangs de la majorité écologiste, on critique aujourd’hui volontiers « aventure personnelle » de Nathalie Perrin-Gilbert rappelant sa trajectoire passée. « Personnellement, je n’ai aucune animosité avec Nathalie, mais elle manifeste depuis plusieurs mois une volonté de se désolidariser de l’exécutif sur un certain nombre de dossiers. C’était parfois fondé mais parfois, à mon avis, artificiel, afin de poser des jalons pour plus tard »déplore de son côté Laurent Bosetti, adjoint à la Promotion des services publics, qui a quitté le groupe de Lyon en commun la semaine dernière suite à la polémique sur le conservatoire de Lyon et la présence du « NPG » à la réunion de Lyon de Raphaël Glucksmann. « Si la maire ne l’avait pas fait là, elle serait partie en septembre, alors autant garder la main dessus »indique hors champ un autre assistant écologiste.
Alexandre Chevalier, adjoint au Lien intergénérationnel et membre du même groupe que Nathalie Perrin-Gilbert, y voit une erreur d’appréciation stratégique de la part du maire de Lyon : « Certaines personnalités, il vaut mieux les avoir avec soi que contre soi. C’est le cas de Nathalie qui retrouvera sûrement une parole plus libre. Il se met en danger et j’ai l’impression qu’il n’en a pas conscience. »
Vers une guerre de gauche ?
De son côté, l’entourage de Grégory Doucet assume sa décision face à « choix personnel » de « NPG » et présente cette phrase comme un acte d’autorité de la part du maire : « Il montre que quand il faut décider, sa main ne tremble pas ». Une version locale duUn ministre se tait ; si tu veux l’ouvrir, tu démissionnes» peu apprécié par l’ancien adjoint.
« Nous parlons de choix personnels. Mais quand me suis-je présenté ? Je n’ai pas besoin de l’assurance narcissique des réseaux sociaux pour exister. On me parle de loyauté, mais quelle loyauté y a-t-il de la part d’un maire qui s’approprie le travail de tous ses élus ? Sur le réseau des villes créatives de l’UNESCO, nous nous sommes battus pour sélectionner les services. Finalement, le maire a organisé une interview avec un média sans me parler pour annoncer cette victoire. C’est un vrai manque d’élégance et une forme de machisme selon moi. » tacle Nathalie Perrin-Gilbert.
On ne sait pas encore qui lui succédera à la Culture mais à moins de deux ans des élections municipales, son éviction pourrait laisser des traces profondes dans l’alliance de la gauche qui a permis aux écologistes de remporter la ville de Lyon il y a maintenant quatre ans.