Les échanges de tirs entre le Hezbollah et Israël lors des négociations de Doha envoient un « mauvais message », déclare Séjourné à Beyrouth

Le ministre français des Affaires étrangères Stéphane Séjourné est arrivé jeudi à Beyrouth pour une visite axée sur la « désescalade dans la région », alors que le Hezbollah est engagé dans des combats quasi quotidiens avec Israël au Sud-Liban depuis le 8 octobre, dans le sillage du conflit de Gaza. Il a notamment estimé que le fait que le Hezbollah et Israël continuent d’échanger des tirs alors que les négociations pour une trêve ont repris à Doha n’envoie pas « le bon message ».

M. Séjourné a débuté sa visite vers 14h30 par une première étape à Aïn el-Tiné, pour rencontrer le président du Parlement Nabih Berry, avant une deuxième rencontre prévue avec le Premier ministre sortant, Nagib Mikati, à 15h30, puis son homologue libanais, Abdallah Bou Habib, vers 16h, selon l’Agence nationale de l’information (ANI, officielle).

Je vais au Liban aujourd’hui. ??

Dans quelques heures, je rencontrerai les autorités libanaises, afin de soutenir les efforts diplomatiques en cours en faveur de la désescalade dans la région.

– Stéphane Séjourne (@steph_sejourne) 15 août 2024

Plus tôt dans la journée, le patron du Quai d’Orsay avait déclaré sur la plateforme X que sa visite au Liban visait à « soutenir les efforts diplomatiques en cours en faveur d’une désescalade dans la région ». Sa visite intervient 24 heures après celle de l’émissaire américain Amos Hochstein, venu lui aussi réitérer les positions américaines concernant la nécessité de réduire l’escalade au Sud-Liban afin d’empêcher une guerre généralisée entre le Hezbollah et Israël. Elle coïncide également avec l’ouverture d’un nouveau cycle de discussions à Doha, mené par les Etats-Unis, le Qatar et l’Egypte, pour tenter de parvenir à une trêve dans la bande de Gaza, alors que le contexte régional s’est considérablement dégradé depuis fin juillet, dans le sillage de la guerre de Gaza qui a éclaté le 7 octobre et de ses répercussions régionales.

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Mandat de la FINUL

Dans une brève déclaration à l’issue de son entretien avec M. Berry, le ministre français a réaffirmé le soutien de la France au Liban « à un moment où tout le monde est préoccupé » par la situation dans le pays et au Moyen-Orient. Il a également adressé un message aux autorités libanaises appelant à la « désescalade », message qu’il doit également transmettre « aux autres pays de la région ».

« Nous soutenons également la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL), ainsi que le renforcement de l’armée libanaise au Sud-Liban », a ajouté M. Séjourné, indiquant que la France « travaillerait à New York dans le cadre de discussions pour prolonger le mandat de la FINUL » qui expire le 31 août. « La France est là, la France soutient le Liban et (…) veut un cessez-le-feu dans la bande de Gaza, qui sera nécessaire pour garantir la paix dans la région », a-t-il dit.

Dans un communiqué publié moins de deux heures après la réunion, Ain el-Tine a résumé les principaux points de la réunion avec Stéphane Séjourné et la délégation qui l’accompagne, à savoir l’état des lieux de la situation, la nécessité d’éviter une conflagration régionale et le renouvellement du mandat de la FINUL. L’ambassadeur de France, Hervé Magro, était également présent.

Le ministre français des Affaires étrangères Stéphane Séjourné rencontre le président du Parlement libanais Nabih Berry à Beyrouth, au Liban, le 15 août 2024. Mohamed Azakir/REUTERS/

« Le Liban est attaché aux règles d’engagement et à son droit à l’autodéfense face à l’agression israélienne, qui n’a épargné ni civils, ni professionnels des médias, ni médecins dans ses attaques, sans parler de l’utilisation d’armes interdites internationalement », a déclaré le président du Parlement, qui est également le chef du mouvement chiite Amal, allié du Hezbollah, en référence aux munitions au phosphore blanc, dont l’usage est très strictement limité par le droit international.

M. Berry a également souligné l’engagement du Liban quant à la nécessité de prolonger le mandat de la FINUL « conformément au projet français » et de mettre en œuvre la résolution 1701 de l’ONU, qui a mis fin à la guerre de 2006 entre le Hezbollah et Israël.

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« Soyez silencieux, patient et priez »

Stéphane Séjourné est ensuite arrivé vers 15h30 à la Platinum Tower de Beyrouth pour rencontrer le Premier ministre sortant, selon nos informations.

A l’issue de la réunion, le bureau de la présidence du Conseil des ministres a publié un bref communiqué dans lequel Nagib Mikati a souligné l’importance de soutenir la prolongation du mandat de la FINUL, se refusant à faire d’autres déclarations aux journalistes présents sur place. « Dans cette période difficile que nous traversons, nous ne pouvons que rester silencieux, patients et prier », a-t-il simplement déclaré. Stéphane Séjourné a ensuite rencontré, comme prévu, Abdallah Bou Habib, lors d’une réunion consacrée aux mêmes sujets et au cours de laquelle les deux hommes ont exprimé peu ou prou les mêmes positions. Abdallah Bou Habib a souligné que la visite de Stéphane Séjourné coïncidait avec la reprise par Air France et Transavia de la desserte de Beyrouth.

Poursuite des hostilités au Sud-Liban

Le ministre français a pour sa part déclaré que les échanges de tirs continus entre le Hezbollah et Israël lors des pourparlers entamés à Doha « n’envoient pas le bon message », espérant que les parties au conflit ne recourront pas à l’escalade tout au long des discussions qu’il espère sincères, et que les négociateurs parviendront à un accord.

Le Hezbollah et Israël ont, en effet, continué à échanger des tirs dans la zone frontalière au Sud-Liban, comme ils l’avaient fait mercredi lors du passage de l’émissaire américain Amos Hochstein. A 19 heures, on constatait toutefois que les bombardements réciproques faisaient moins de victimes que la veille, avec seulement deux personnes gravement asphyxiées par l’artillerie au phosphore israélienne sur la localité de Khiam (caza de Marjeyoun). Les deux victimes ont été admises à l’hôpital gouvernemental de Marjeyoun, où elles ont été soignées aux urgences, selon le ministère de la Santé.

Des avions de chasse israéliens ont également ciblé à deux reprises en fin de journée la localité de Yaroun (Bint Jbeil), selon des habitants cités par notre correspondant Mountasser Abdallah. Le Hezbollah avait annoncé six opérations au total, dont une utilisant un escadron de drones suicides contre le site de Khirbet Ma’ar, en face de la ville libanaise de Boustane (Tyr).

Finalement, l’une des deux personnes déclarées mortes lors du bombardement de mercredi soir sur Marjeyoun (dans le caza du même nom) a finalement survécu mais se trouve dans un état critique, selon un nouveau bilan du ministère de la Santé, qui a précisé que la victime avait subi un arrêt cardiaque avant d’être réanimée. Les huit autres blessés ont été répartis dans plusieurs hôpitaux du pays.