Wildberries, l’Amazonie russe, au centre d’une querelle familiale et commerciale meurtrière
Ce mercredi 18 septembre, dans toute la Russie, les quelque 40 000 points de retrait Wildberries s’activaient comme d’habitude pour assurer leurs livraisons quotidiennes. Jusque dans les villages, le géant russe du e-commerce fait partie du décor urbain et des nouvelles habitudes commerciales des Russes avec, vingt ans après sa création, plus de dix millions de commandes par jour, en Russie et dans plusieurs ex-républiques soviétiques. Mais, ce même jour, dans l’après-midi, une fusillade a semé la panique dans le hall d’entrée du siège moscovite de Wildberries, une entreprise symbole de l’essor du secteur et de la nouvelle économie du pays.
Lancée en 2004 par Tatiana Bakalchuk, une enseignante dynamique devenue femme d’affaires, Wildberries a démarré loin des cercles politiques et des clans oligarchiques. L’entreprise est aujourd’hui prise dans la réalité des conflits d’intérêts politico-économiques et des appétits rapaces qui entourent un groupe devenu trop puissant pour être laissé aux seules mains de sa fondatrice, aujourd’hui la femme la plus riche du pays. Sa fortune est estimée à plus de 8 milliards de dollars (7,2 milliards d’euros).
Wildberries, dont la valeur des ventes de produits a augmenté de 50 % en un an pour atteindre l’équivalent de 28 milliards de dollars en 2023, est également prise dans le conflit entre Tatiana Bakalchuk, 48 ans, et son mari, Vladislav Bakalchuk, 47 ans. Après vingt ans de vie et d’affaires ensemble, la naissance de sept enfants et l’émergence d’un des plus beaux histoires de réussite Affaires russes, le couple se déchire.
Deux agents de sécurité morts et sept blessés
En instance de divorce depuis cet été, les deux époux ont publié des versions radicalement opposées des événements qui ont conduit au lourd bilan de la fusillade de mercredi : deux agents de sécurité morts, sept blessés, une trentaine d’arrestations dont celle du mari. Ce dernier a été inculpé, jeudi 19 septembre, de « meurtre », « tentative de meurtre » et « atteinte à la vie » d’un membre des forces de l’ordre, ont indiqué ses avocats.
L’affaire a été ignorée par la télévision d’Etat mais a passionné les médias indépendants, reléguant au statut de simple fait divers l’énorme explosion d’un dépôt militaire de missiles et de munitions ciblée le même jour près de Moscou par les forces ukrainiennes.
La fusillade de Wildberries est d’autant plus surprenante qu’elle a eu lieu dans le centre d’affaires situé en face du Kremlin, au cœur d’un des quartiers apparemment les plus sécurisés de la capitale.
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