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VRAI OU FAUX. Le Rassemblement national est-il l’héritier de la Waffen-SS et du régime de Vichy, comme l’affirme la députée LFI Sarah Legrain ?

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Rencontre des cofondateurs du Front National avec, de gauche à droite, Pierre Bousquet, Roger Holeign et Jean-Marie Le Pen.  (MARC CHARUEL / MARC CHARUEL)

Le Front national (FN), ancêtre du RN, comptait parmi ses premiers membres d’anciens militaires affiliés à l’armée allemande du Troisième Reich et des miliciens pétainistes.

Alors que l’extrême droite se rapproche du pouvoir, après la décision annoncée dimanche par Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale, la gauche s’inquiète de la normalisation du Rassemblement national. « Nous avons aujourd’hui dans le pays une partie de la bourgeoisie, qui jusqu’ici se disait républicaine, parfois aussi une partie du champ médiatique, qui est tout à fait prête à concevoir que le Rassemblement national arrive au pouvoir », La députée La France insoumise s’indigne Sarah Legrain, mardi 11 juin sur LCI, se disant prête « pour formuler l’idée qu’Hitler est meilleur que le Front populaire ».

Pour justifier cette comparaison entre le Rassemblement national et le dictateur allemand, le député de Paris a invoqué l’histoire du parti politique : « Est-ce que je dis que le Rassemblement national est un parti qui est l’héritier de la Waffen-SS qui l’a fondé et l’héritier de Vichy ? Oui bien sûr! »dit-elle. « C’est une déclaration sérieuse »a réagi Christophe Moulin, journaliste et présentateur sur LCI.

Elle n’est pas la seule à tenir de tels propos : en 2023, Elisabeth Borne, alors Premier ministre, rappelait que le RN était « L’héritier de Pétain ». Alors à quoi fait référence le député ? Franceinfo fait le point.

La genèse du Front National n’est pas un secret : elle a été largement documentée par les historiens. C’est le 5 octobre 1972 que naît le Front national pour l’unité française, alliance hétéroclite de petits groupes d’extrême droite autour de la figure de Jean-Marie Le Pen. Le vétéran de la guerre d’Algérie a été choisi par l’Ordre Nouveau, un mouvement de jeunes néofascistes, pour assumer le rôle de leader fédérateur, en vue des élections législatives de 1973.

Il s’agit de présenter une image plus civilisée de l’extrême droite, qui reste actuellement discréditée. « On était vraiment dans une violence verbale totalement décomplexée. On voulait ‘tuer les métèques’, ‘assassiner les communistes’… », rappelle l’historienne Valérie Igounet au sujet de l’Ordre Nouveau, à France Culture. Sur les conseils d’un cadre du parti néofasciste italien MSI, François Duprat, l’un des cadres d’Ordre Nouveau, commence à pratiquer « un fascisme souriant« , explique Nicolas Lebourg, historien, à franceinfo.

« Dans les années 1960 et 1970, en pleine guerre froide, toutes les familles idéologiques d’extrême droite se sont rassemblées dans un anticommunisme violent », explique Magali Balent, docteur en sciences politiques et maître de conférences à Sciences Po Paris, à France Culture. La nouvelle alliance est composée de trois tendances politiques : la famille national-populiste, les néofascistes et les collaborationnistes. Le premier est porté par Jean-Marie Le Pen. Marqué par la décolonisation et les événements de Mai 68, il regroupe des nostalgiques de l’Algérie française, dont certains sont impliqués dans l’Organisation de l’Armée secrète (OEA), comme Roger Holeign. Le Nouvel Ordre constitue le second. Le mouvement souhaite la suppression des partis politiques, voire des élections s’il accède au pouvoir.

La troisième composante est celle évoquée par Sarah Legrain : les nostalgiques de la Seconde Guerre mondiale, et plus précisément de la Collaboration. En 1972, Jean-Marie Le Pen dépose les statuts du parti à la préfecture aux côtés de Pierre Bousquet, Waffen-SS au sein de la circonscription de Charlemagne. Il occupera le poste de trésorier. Egalement à leurs côtés, François Brigneau, journaliste et ancien milicien Pétain, est nommé vice-président.

Interrogé sur Pierre Bousquet par franceinfo, à l’occasion des 50 ans du parti, Jean-Marie Le Pen ne le condamne pas : « Nous étions à trente ou quarante ans de la guerre et, par conséquent, les options que les gens de 60 ans avaient pu prendre à 20 ans n’étaient pas le critère principal.il explique aujourd’hui. Les affaires de l’Algérie étaient plus proches que celles de la Seconde Guerre mondiale. »

« M. Bousquet n’avait pas d’histoires cochonnes, pour la bonne raison qu’il n’avait pas d’histoires. »

Jean-Marie Le Pen

à franceinfo, en 2022

Pierre Bousquet a quitté le parti huit ans après sa création, en même temps qu’un autre ex-Waffen-SS, Jean Castrillo. Malgré cela, il y avait « de nombreux membres de la Nouvelle Droite et du FN » lors des funérailles de l’ancien trésorier en 1991, rapporte l’historien Nicolas Lebourg sur Slate.

Léon Gaultier, autre co-fondateur du parti, s’est également impliqué dans la Waffen-SS. Photo à l’appui, il a évoqué son passé dans un reportage de « Envoyé Spécial » diffusé sur Antenne 2 en 1992 : « Oui, c’est moi en uniforme SS, un uniforme que j’ai porté pendant plus de deux ans, parce que j’étais volontaire dans la Waffen-SS, qui dépendait de l’armée allemande, mais qui n’était pas l’armée allemande. armée’, a-t-il détaillé. Jean Marie Le Pen fonde avec lui Serp, une maison d’édition qui publie notamment un disque de chansons du Troisième Reich.

« Sur le plan politique, les anciens SS ont joué un rôle essentiel dans la reconstruction de l’extrême droite après la guerre., estime l’historien Nicolas Lebourg. Au vu de tous les courants présents à la création du FN, il est donc juste, comme le fait la députée LFI Sarah Legrain, d’affirmer que l’ancêtre du RN est issu d’un héritage lié aux Waffen-SS et au régime de Vichy.

Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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