Voyager sans smartphone : un défi périlleux
HORS DES SENTIERS BATTUS EN VACANCES : UN PARI À HAUT RISQUE ? (5/5) – Aujourd’hui, ceux qui ne supportent plus de voyager avec un smartphone accroché à la main, ont essayé de se passer complètement des nouvelles technologies lors de leurs déplacements. Verdict ?
« Nous pensions être prêts, nous avions déjà fait le tour de l’Europe sans smartphone ni GPS, avec un vieux Nokia et des cartes, et tout s’est très bien passé »Eric tient à souligner, en préambule à son récit. « Mais nous avons découvert à nos dépens qu’une feuille de route n’est pas toujours suffisante dans certains domaines ». Désireux de prouver à leurs enfants techno-addicts que l’on voyageait tout aussi bien avant l’invention des applications, le quinquagénaire et sa femme ont emmené leurs adolescents dans un road trip… qui les a vus se perdre dans le désert mexicain de Basse-Californie.
« Le plus absurde, c’est que nous pensions vraiment mettre toutes les chances de notre côté en choisissant Baja ! Sur le papier, il s’agit d’une péninsule de 1 250 kilomètres de long avec une route principale, la « Transpeninsular », que nous avions prévu de suivre du début à la fin. »se souvient Annelise, la compagne d’Eric, mortifiée. Comme Internet n’était pas disponible, les voyageurs réservaient à l’avance tous les hôtels le long de leur parcours, les marquant soigneusement sur la carte. « Sauf que là où est censé se trouver celui du jour, le long de la Transpéninsulaire, il n’y a rien. Et dans la panique du moment, on a pris mauvaise décision après mauvaise décision. »continue Eric.
Dormir dans la voiture
« On avait croisé un peu plus en amont une piste qui n’était pas sur la carte, alors on s’est dit que c’était peut-être par là. On a roulé, on a persisté, on a bifurqué sur une piste encore plus bosselée, la nuit est tombée… Obligés de dormir dans la voiture. Le lendemain, on a fait ce qu’on croyait être le chemin inverse, mais on n’a pas trouvé la route principale… Et puis, on est tombé en panne d’essence ! ». À ce moment-là, Eric sort son antique pour appeler les secouristes routiers mexicains, les Angeles Vertes… et se rend compte qu’il n’y a pas de réseau.
C’est finalement un jeune couple, parti à l’aventure en van, qui les sauvera un jour plus tard. « Les 24 heures d’enfer, comme les ont baptisées les enfants. Ils ont pleuré, hurlé qu’on allait mourir, j’aurais ri si au fond je n’avais pas eu aussi très peur. J’étais à la fois soulagée et blasée quand les jeunes nous ont donné un jerrycan et nous ont montré le chemin sur l’application Maps.me… qui montrait tous les chemins de terre que ma carte ne voyait pas ! ». Il suffit de dire que la crédibilité parentale a pris un coup. Mais pas autant que l’estime de soi de Catherine, qui a failli mourir d’hypothermie – et de peur – dans les Highlands écossais, lors d’un voyage sans écran.
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Mourir d’hypothermie
« Même après cette mésaventure, je crois toujours qu’on peut se passer de tout : Booking, Airbnb, Uber, les QR codes, peu importe, on peut toujours s’en sortir en parlant aux gens, en gesticulant ou en dessinant ! Le seul vrai défi est de survivre sans GPS. »la jeune femme analyse calmement. C’est ainsi que, lors de son voyage dans le nord de l’Ecosse, Catherine doit dormir une nuit dans sa voiture suite à une erreur de réservation et ne pouvant réserver un autre hôtel en ligne. « Mais cela fait partie du jeu. »elle concède. Garée au pied d’une jolie montagne, elle décide, réveillée à l’aube, de faire une petite balade dans les environs avant de poursuivre.
« Je vois un sentier pas très loin sur ma carte de randonnée locale, alors je le prends et j’y vais. »elle rembobine. Le terrain est escarpé et la brume enveloppe les hauteurs, alors la jeune femme entame une ascension sans visibilité. « Au bout d’une heure, je nage dans le brouillard le plus total et, d’après ce que j’ai pu voir, je ne suis plus sur le parcours. ». Déterminée à ne plus se perdre, Catherine choisit d’attendre que la soupe aux pois se dissipe, ce qui lui prendra des heures. Gelée, elle se met enfin en route, mais ne voit ni chemin ni route au loin. Seul signe de civilisation, un pylône et quelques fils électriques, qu’elle décide de suivre. Cinq heures de marche plus tard, gelée et redoutant la tombée de la nuit, elle tombe enfin sur un sentier, où un chauffeur miraculé la prend en stop.
« Si j’avais emporté mon smartphone, je me serais sortie de ce pétrin toute seule et en 30 minutes, donc je ne vous cache pas que cette histoire a complètement changé mon point de vue sur les voyages à l’ancienne. C’est un peu comme accoucher sans péridurale, pourquoi se faire mal juste pour le plaisir ? »compare la jeune femme d’aujourd’hui. Pour elle, comme pour la famille d’Eric, les déplacements se font désormais avec un smartphone, certes éteint, mais bien au chaud dans le sac à dos. Et tant pis si, en cas de pépin, ils se retrouvent à le brandir comme un phare dans la nuit.
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