Les nouvelles les plus importantes de la journée

« Vous avez beaucoup de chance d’avoir un pays où de nouvelles voix peuvent s’exprimer »

« Vous avez beaucoup de chance d’avoir un pays où de nouvelles voix peuvent s’exprimer »

L’actrice-réalisatrice savoure la joie de présider le jury du Festival du Film Francophone d’Angoulême.

Depuis dix-sept ans, c’est le rendez-vous incontournable du cinéma français à la veille de la rentrée. Créé par Dominique Besnehard et Marie-France Brière, il propose une programmation éclectique mêlant avant-premières (Les barbares, par Julie Delpy, Sarah Bernhardt, la divine, avec Sandrine Kiberlain…), films en compétition (Le Procès du Chien, par Laetitia Dosch, Vingt Dieux, de Louise Courvoisier…) et d’autres événements (dont un focus sur Valérie Donzelli), le Festival du Film Francophone d’Angoulême sera cette année présidé par Kristin Scott Thomas.

Si Hollywood a régulièrement frappé à sa porte, l’actrice britannique s’est aussi souvent illustrée auprès d’auteurs français : François Ozon, Philippe Claudel, Catherine Corsini, Pascal Bonitzer… En plein tournage de la dernière saison de la série Chevaux lents, Elle nous parle de son amour pour le cinéma français et revient sur certains moments clés de sa carrière.

 » data-script= »https://static.lefigaro.fr/widget-video/short-ttl/video/index.js » >

Madame Figaro. – Quel plaisir de présider le Festival du Film Francophone d’Angoulême ?
Kristin Scott Thomas. – Immense. J’y ai été invité plusieurs fois avec des films, mais je n’ai malheureusement jamais pu y participer. J’y vais pour la première fois, et en tant que président, s’il vous plaît. C’est une joie de pouvoir m’immerger dans le cinéma francophone, qui me manque tant. J’ai accumulé un retard fou : je vis en Angleterre, et les films français y sont très difficilement accessibles.

Quelle place a occupé le cinéma français dans votre formation cinématographique ?
Mon amour du cinéma est né lorsque, très tard un soir, j’ai découvert Un homme et une femmede Claude Lelouch, à la télé. Je devais avoir 12 ans. J’étais complètement captivée. Cela me faisait pleurer, j’adorais les imperméables, les plages de Normandie, la pluie, le bruit des essuie-glaces et Anouk Aimée, à qui le festival rend hommage cette année. Plus tard, à 17 ans, je me souviens avoir marché des kilomètres pour aller voir La Dentellière, avec Isabelle Huppert. Et quand je suis arrivée en France, en 1980, l’homme qui m’a épousée, le père de mes enfants, m’a emmenée voir Mépris, de Jean-Luc Godard. J’ai été définitivement conquise !

Un favori récent ?
L’Enlèvement, d’Iris Kaltenbäck. Je n’avais jamais vu une scène d’accouchement aussi bien filmée, et Hafsia Herzi est époustouflante. Tout sonne juste. C’est remarquable de voir ces jeunes réalisatrices émerger et proposer d’autres perspectives, d’autres histoires. J’ai aussi récemment découvert Yannick. Pio Marmaï m’étonne à chaque fois : il n’a peur de rien et ne se regarde pas jouer. Tout ce que j’aime. J’ai aussi été émerveillée par Raphaël Quenard, un nouveau visage fascinant. Vous avez beaucoup de chance d’avoir un pays où de nouvelles voix ont le droit de s’exprimer. En Angleterre, on produit si peu de films… J’espère que cela va changer avec notre nouveau gouvernement.

Mon amour du cinéma est né lorsque, très tard un soir, j’ai découvert Un homme et une femmepar Claude Lelouch, à la télé

Kristin Scott Thomas

Vous avez récemment réalisé votre premier film, Étoile du Nord encore inédit ici…
Plus pour très longtemps, j’espère ! C’est un film de femmes basé sur une expérience que j’ai vécue quand j’étais enfant. C’est l’histoire de trois sœurs qui, comme moi, ont perdu un père et un beau-père. Le reste est fiction : quand la mère de mes personnages décide de se remarier avec un homme qui lui convient parfaitement, ils ont du mal à s’en sortir. C’est une comédie qui raconte notre relation à nos parents, morts ou vivants, et la façon dont nous pouvons les idéaliser.

Qu’avez-vous appris en vous lançant dans la réalisation ?
Quand je suis actrice, je sais ce que je fais. Là, d’un coup, j’étais la patronne, mais il me manquait un ancrage. Il m’a fallu quelques jours pour comprendre que je n’avais pas besoin de demander la permission. Tout s’est passé plus facilement quand j’ai assumé, pris ma place. De plus, j’ai eu la chance de travailler avec une équipe et des actrices extraordinaires : Sienna Miller, Emily Beecham et Scarlett Johansson, dont j’incarne la mère pour la troisième fois, après L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux Et Deux sœurs pour un roiElle a immédiatement accepté de suivre ce chemin avec moi, pour continuer notre belle histoire.

Et vous, avez-vous toujours la même soif de jeu ?
Oui, quand on ne me propose pas des rôles que j’ai déjà faits ou lus mille fois. Pour moi, le cinéma doit être un saut dans l’inconnu, un vertige. Je fais ce métier pour expérimenter des territoires différents, pour vivre d’autres vies que la mienne. Mais la nouveauté est rare sur les écrans. Heureusement, j’ai la chance incroyable de vivre dans le pays où le théâtre est roi. La scène fait partie de l’histoire des acteurs britanniques, de leur ADN, et j’ai moi-même besoin de m’y ressourcer régulièrement. C’est le seul moyen pour moi d’entretenir les muscles du jeu d’acteur.

Je fais ce métier pour découvrir des territoires différents, pour vivre d’autres vies que la mienne.

Kristin Scott Thomas

Votre fils Joseph Olivennes est acteur. Souhaitez-vous travailler ensemble ?
Ce serait super, mais je ne pense pas que je pourrais écrire pour nous : il y aurait trop d’affect. Mais j’aimerais qu’on me propose quelque chose. Quelque chose de terrible, par exemple, à l’opposé de notre relation. Mais pour le moment, il est très occupé : il a sa propre troupe de théâtre qui fait un carton, et il alterne avec des rôles dans des films, comme La Vallée des Fous, par Xavier Beauvois (sortie le 13 novembre, NDLR)).

Quatre mariages et un enterrement fête ses 30 ans. Que représente cette comédie dans votre carrière ?
Confirmation qu’il est possible de réaliser des films grand public de très grande qualité. J’ai la chance d’en avoir plusieurs dans ma filmographie : Le Patient anglais, L’homme qui murmurait à l’oreille des chevaux, Ne le dis à personneQuatre mariages est différent en ce sens qu’il est devenu une secte. En Angleterre, on l’appelle un favori de la famille. On le voit à la télé tous les ans à Noël. Ils ont essayé de le refaire, mais ça n’a pas marché. Parce que nous n’y étions pas, bien sûr ! (Rires.)

Festival du Film Francophone d’Angoulême, du 27 au 1er aoûteuh Septembre. filmfrancophone.fr

Quitter la version mobile