Volocopter : les folles espérances du taxi volant allemand

Publié le 5 avril 2023 à 12 h 47Mis à jour le 5 avril 2023 à 14:16
Un ciel bleu clair et un soleil brillant sur Bruchsal, une ville de 45 000 habitants au nord de Karlsruhe, renforcent l’optimisme du ministre allemand des Transports, Volker Wissing. Il est venu en personne mardi pour inaugurer la piste d’atterrissage et le hangar adjacent où les taxis volants électriques de Volocopter seront assemblés et testés.
Ressemblant à un jouet télécommandé aérodynamique géant, le « Volocity » s’est tranquillement élevé à la verticale à l’aide de sa couronne de 18 mini-hélices aussi bruyantes qu’une grosse tondeuse à gazon, avant d’effectuer une courte vrille au-dessus du terminal et de revenir se poser. Sa production en série, au rythme de cinquante exemplaires par an dans un premier temps, pourra démarrer à la fin de ce mois dans une toute nouvelle usine située à dix minutes du hangar.
Nous sommes au début d’une nouvelle ère, celle de la mobilité aérienne respectueuse du climat
Volker Wissing Ministre allemand des transports
« Nous sommes au début d’une nouvelle ère, celle d’une mobilité aérienne respectueuse du climat, qui permettra de décongestionner les villes », s’est félicité Volker Wissing. « Depuis ce hangar, nous enverrons nos avions dans les métropoles du monde entier et nous ouvrirons une nouvelle voie de transport », a ajouté le directeur général de Volocopter, Dirk Hoke.
Aussi sûr qu’un A320
Le groupe espère obtenir au cours du premier semestre 2024 le précieux sésame de l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) pour pouvoir effectuer ses premiers vols commerciaux lors des Jeux olympiques de Paris.
Contrairement à un hélicoptère classique, « on aura alors la même certification qu’un A320, ce sera un signal fort pour les gens qui veulent avant tout des moyens de transport sûrs », précise Dirk Hoke aux « Echos ».
Dans le hangar de Bruchsal, une borne numérique a été installée pour simuler l’enregistrement des passagers. Une fois son identité vérifiée grâce à une application sur son téléphone portable, le client doit… se peser. Une condition nécessaire pour s’assurer que les neuf batteries, qui disposent d’une autonomie globale de vingt-cinq minutes, pourront supporter la distance à parcourir. Avec deux passagers, dont le pilote, le Volocity pèse environ une tonne, et « chaque gramme compte » peut être lu par le visiteur sur le mur des toilettes du hangar !
La capacité des batteries complique le modèle économique de ce nouveau moyen de transport car il ne peut ni augmenter les distances ni le nombre de passagers. « Nous ne voulons pas être un moyen de transport pour les riches », assure le directeur opérationnel de Volocopter, Christian Bauer.
Un marché de 290 milliards d’euros
La diversification vers le transport de médicaments, d’organes ou de petites marchandises est cependant limitée : sur un marché mondial estimé à 290 milliards d’euros en 2025, les personnes représentent la part la plus importante, soit 170 milliards d’euros, selon Christian Bauer. Bien que moins bruyant qu’un hélicoptère, le bruit peut également limiter son acceptation.
Mais Volocopter parie sur l’amélioration de la technologie des batteries qu’elle produit elle-même et sur les économies d’échelle que permettra le développement du marché. L’objectif est d’être aussi cher qu’un taxi premium d’ici 2030, avec un tarif d’environ 90 euros la course pour rejoindre Paris depuis Charles-de-Gaulle.
« Nous avons un vrai rôle à jouer dans la décarbonation du transport aérien. La technologie ne sera pas mature avant 2035 pour le reste du secteur, voire 2050 pour les plus gros avions. Nos batteries sont prêtes », se souvient Dirk Hoke. En attendant de devenir rentable, Volocopter devra cependant tenir financièrement.
Un financement public nécessaire
En douze ans d’existence, la start-up a consommé environ 400 millions d’euros sur les 600 millions levés. De Mercedes Benz à BlackRock, en passant par DB Schenker, Japan Airlines ou encore Microsoft, son actionnariat est solide. Mais « nous avons besoin de 100 millions d’euros supplémentaires pour accélérer la production. Un soutien public serait souhaitable », confirme Dirk Hoke.
Un message entendu par les autorités allemandes qui n’ont eu de cesse de célébrer ce champion national de la mobilité décarbonée, employant 500 personnes rien qu’à Bruchsal. Volker Wissing a annoncé qu’un groupe d’experts travaillera à partir de ce mois sur une stratégie dédiée à la « mobilité aérienne avancée ».