Le Snapdragon 8 Elite s’annonce comme le processeur pour smartphone le plus puissant en 2025. Une puissance qu’il mettra au service d’un tournant de l’informatique mobile : l’exécution locale de l’IA générative.
« Snapdragon n’est pas une simple mise à jour, c’est un bond en avant » : La promesse du nouveau processeur pour smartphone haut de gamme de Qualcomm sonne comme une flexion des muscles.
Présenté lors de sa conférence annuelle à Hawaï, le Snapdragon 8 Elite est le processeur tout-en-un (SoC pour système sur puce) que la majorité des constructeurs devraient intégrer dans leurs flagships 2025.
Cette puce a un double objectif :
- continuer à se moquer d’Apple, qui bénéficiait depuis plus de deux ans de la meilleure finesse de gravure,
- et contenir la montée en puissance du MediaTek taïwanais.
Les différentes évolutions de sa puce haut de gamme Dimensity 9000 – comme la dernière Dimensity 9400 – sont de plus en plus performantes et bousculent Qualcomm dans un marché haut de gamme où il vivait seul depuis trop longtemps.
Dans un marché des smartphones difficile, Qualcomm avait donc la lourde tâche de développer un SoC qui fasse réellement la différence. Pour ce faire, l’Américain a fait, comme au poker, un tout compris en mettant sur le tapis toutes ses meilleures technologies.
Une puce « Elite » avec un cœur Oryon
Il n’y aura pas eu de numéro 4 : après trois générations de « Snapdragon 8 Gen x », Qualcomm abandonne le nom et donne à sa puce haut de gamme la même appellation « Elite » que ses puces PC.
Une démarche logique, car elle s’inscrit dans le cadre de l’introduction de son propre cœur de processeur (CPU) – Qualcomm est le seul, avec Apple, à développer un cœur de CPU sur mesure.
Un cœur qui porte le maillot d’un véritable « enfant miracle », puisqu’il affiche Gains de performances énormes, notamment dans les jeux vidéo (jusqu’à 50%).
Le CPU n’est pas le seul dans la course à la puissance : toutes les briques affichent plus de 40% de gains de performances par rapport à la génération précédente !
Si les évolutions architecturales ont évidemment un impact sur ces gains, il faut également noter que le procédé de fabrication a un rôle crucial.
Le Snapdragon 8 Elite est en effet la première puce Qualcomm à être gravée dans TSMC N3E. Qualcomm rejoint ainsi Apple – et MediaTek, qui a annoncé son Dimensity 9400 le mois dernier – dans le club très fermé de la gravure en 3 nm.
Architectures CPU et GPU remaniées
La partie processeur (CPU) de cette puce mobile représente une véritable transformation par rapport aux générations précédentes, tant architecturale qu’organisationnelle.
En termes d’architecture, la grande nouveauté est donc la toute première intégration de l’architecture Oryon. Issu de ses puces PC, ce type de cœur ARM performant arrive pour la première fois dans un smartphone, mais dans une version mobile entièrement repensée, pensée pour les mobiles, et donc jusqu’à 46% plus économe en énergie que la version PC.
D’un point de vue organisationnel, c’est le grand bouleversement. Comme MediaTek, Qualcomm supprime progressivement ses cœurs basse consommation – il y en avait trois dans le Snapdragon 8 Gen 3 de l’année dernière. Qualcomm assure que sa gestion des cœurs lui permet de se passer totalement de ce type de cœurs.
Au lieu de cela, le Snadragon 8 Elite comporte non pas un, mais deux cœurs Oryon très hautes performances (jusqu’à 4,32 GHz) et six cœurs hautes performances (jusqu’à 3,53 GHz).
La promesse semble claire : l’amélioration des performances devrait être très significative, Qualcomm promettant jusqu’à 50% (!) de puissance en plus.
Pour aller plus loin
SoC : tout savoir sur les processeurs mobiles
Course au pouvoir à tous les niveaux
Le CPU n’est pas le seul composant à afficher une augmentation de performances à deux chiffres : tous les blocs de la puce sont logés dans le même bateau.
La puce graphique (GPU) affiche un gain allant jusqu’à +40 %, le processeur neuronal (NPU) +45 %. Et même le processeur d’image (ISP), qui gère les modules caméra, voit son flux de données traitées augmenter de 35%
Mais Qualcomm n’a pas seulement profité du simple ajout de transistors offert par la gravure 3nm : il a complètement revu ses architectures et ajouté des fonctionnalités.
On pense notamment au GPU, désormais organisé en « tranches » de rendus agissant de manière autonome. Et qui est le premier dans l’industrie mobile à prendre en charge la technologie « Nanite » d’Unreal Engine 5 – technologie déjà implémentée dans les PC et les consoles. Mais aussi et surtout à leur manière d’être interconnectés.
Le FAI, qui gère jusqu’à 3 flux de caméras 48 Mpix à 30 images par seconde (soit 4,32 milliards de pixels !), dispose désormais d’un lien direct avec le NPU, permettant ainsi d’alimenter ce NPU non plus avec des données images déjà traitées , mais avec le flux brut (RAW). De quoi améliorer grandement le niveau de précision et de finesse des algorithmes.
Dans le collimateur de sa course à la performance, Qualcomm avait deux grands domaines en tête : le gaming d’une part, mais aussi et surtout l’IA.
Les promesses de l’exécution locale de l’IA
Les puces pour smartphones ont été, bien avant les puces PC, les premières à intégrer des processeurs neuronaux.
Mais le NPU n’est pas le seul bloc en charge des calculs. Selon les tâches, c’est tour à tour le CPU, le GPU ou le NPU qui sont les plus adaptés.
La volonté de Qualcomm de faire du Snapdragon 8 Elite une bête dans tous ces domaines avait un but : permettre l’exécution locale de petits LLM.
Ces versions allégées des GPT, Llama et autres Mistral sont généralement entraînées avec un nombre de paramètres bien inférieur – quelques milliards contre des centaines de milliards pour les gros LLM. Mais ils sont déjà capables de comprendre et de produire du texte, du son ou des images.
L’exécution locale de ces petits LLM par les différents blocs du SoC présente de nombreux avantages, pour les utilisateurs comme pour les titans de l’IA.
Pour vous et moi, l’intérêt est double : bénéficier d’une plus grande réactivité dans la réponse aux requêtes – qu’il s’agisse de production de texte ou d’image. Pas besoin de traduire, compresser et envoyer la requête vers le cloud et de parcourir les files d’attente de traitement avant de recevoir le résultat.
De plus, conserver la requête dans le terminal fournit également meilleure protection de la vie privée. Vos textes, sons, photos ou vidéos pourront passer dans les moulins de l’IA sans que les grands noms de l’IA ne les voient – et ne les utilisent.
Du côté des grands noms de l’IA dans le cloud, qui ont déjà largement utilisé (pillé ?) les données des utilisateurs, l’accélération des usages de l’IA a un coût énergétique de moins en moins soutenable.
Si les LLM les plus puissants et les plus efficaces continuent d’être exécutés dans le cloud, la charge de travail liée à l’exécution de petits LLM locaux peut avoir un réel impact sur leur facture énergétique.
L’autonomie ne serait pas sacrifiée
De manière générale, les annonces de gains de performances aussi importants font craindre une consommation exagérée.
Cependant, Qualcomm ajoute simultanément des gains énergétiques à ses promesses de gains de puissance.
Le processeur pourrait être jusqu’à 45 % plus efficace, mais il consommerait également 44 % d’énergie en moins pour la même tâche..
Idem pour le GPU – 40 % plus puissant et 40 % plus économique pour la même tâche, etc.
Et ce, non seulement grâce à la finesse de gravure améliorée, mais aussi aux optimisations des flux de données, ou encore à la partie logicielle.
Le diable est dans les détails, les usages seront-ils augmentés avec ce surplus de puissance sous la pédale ?
Ici, c’est l’intégration et la volonté des constructeurs de terminaux qui décideront. Certains pourront se lancer dans une course au pouvoir absolu – pour les terminaux de jeux par exemple – tandis que d’autres seront plus sobres dans leur approche.
ASUS, Honor, OnePlus, OPPO, Samsung, Vivo, Xiaomi et d’autres fabricants de smartphones devraient annoncer leurs terminaux intégrant le Snapdragon 8 Elite dans les prochaines semaines.
Pour les plus férus de technologie, nous dévoilerons une analyse plus approfondie des technologies Qualcomm dans les prochains jours !