Victime de son succès, le célèbre village de Binibeca Vell, situé sur l’île de Minorque, envisage de fermer ses rues aux touristes dont l’attitude jugée inappropriée irrite les habitants.
Trônant au dessus de la baie, le village de Binibeca Vell situé au sud de l’île de Minorque (Espagne), attire de plus en plus de touristes. Ruelles pavées, maisons blanches et balustrades en bois, ce petit quartier pittoresque, surnommé par les médias locaux le « Mykonos espagnol », ne cesse de faire parler de lui sur les réseaux sociaux.
Mais alors que sa notoriété augmente, les habitants de Binibeca Vell menacent de fermer définitivement l’accès au village, exaspérés par les innombrables selfies et le manque de savoir-vivre de certains touristes.
« Le problème, ce ne sont pas les touristes »
Chaque année, plus de 800 000 touristes parcourent les rues étroites de Binibeca Vell, rapporte le quotidien espagnol El Economista. Une popularité qui va au-delà de la tranquillité des quelque 200 habitants qui vivent dans le petit village de pêcheurs.
Face à la généralisation des incivilités, les habitants envisagent même une fermeture définitive du village aux touristes, qui devra être soumise au vote lors d’une assemblée générale le 10 août, selon El Economista.
Pour Oscar Monge, représentant de la communauté Binibeca Vell, « le problème, ce ne sont pas les touristes ». Le Minorquin pointe au contraire du doigt les autorités locales qui, selon lui, ont abandonné les habitants livrés au défilé constant des visiteurs et aux détritus qui s’accumulent quotidiennement dans les rues de la ville.
Derrière la menace de fermeture du village par ses habitants se cache en réalité un accord défunt avec les autorités locales. En effet, chaque année, la Mairie de Minoque et la mairie de Sant Lluis paient un peu plus de 25 000 euros par an pour aider les propriétaires des 165 maisons à peindre, nettoyer et entretenir cette image de carte postale de Binibeca Vell.
Cependant, selon El Economista, cette aide financière n’a pas encore été renouvelée pour l’été 2024, les deux parties se rejetant la faute. Le désaccord a atteint un tel point que la Communauté des propriétaires de Binibeca Vell a demandé à rencontrer le président de l’île, Adolfo Vilafranca, le jeudi 9 mai.
Interviewée par le journal espagnol El Diario, la responsable du tourisme du gouvernement de Minorque, Begoña Mercadal, a déclaré que le village avait le droit de demander sa fermeture au public.
« Nous reconnaissons pleinement qu’il s’agit d’une propriété privée et donc s’ils veulent la fermer, c’est leur droit », a-t-elle déclaré.
Visites limitées de 11h à 20h
En attendant une décision finale, la Communauté des propriétaires de Binibeca Vell a déjà imposé une fenêtre de visite aux touristes qui s’étend de 11h00 à 20h00, depuis le 1er mai.
Elle rappelle également aux visiteurs qu’il est essentiel de rester calme et respectueux de l’environnement et qu’il est interdit de pénétrer chez les résidents et de prendre des photos à l’intérieur de leur logement.
« Lorsque vous nous rendez visite, n’oubliez pas que vous êtes entré dans une propriété privée et que vous devez respecter la vie privée des voisins », peut-on lire sur le site.
Les pieds sur les murs, affalés sur leurs escaliers ou assis sur leurs terrasses, les habitants de Binibeca Vell n’ont pas non plus hésité à poster sur le site communautaire quelques exemples de touristes jugés décontractés et un peu trop à l’aise. S’adressant au journal El Diario en avril dernier, un habitant confiait que certains touristes n’hésitaient pas à entrer chez eux et à « organiser des beuveries ».
« Si ce n’est pas réglementé, cela se produira chaque été », a-t-elle déclaré.
Si la menace de fermeture de Binibeca Vell pouvait se réaliser, Oscar Monge a admis dans El Diario que cela nuirait certainement à l’économie locale. « Bien sûr, c’est une décision difficile, mais nous y sommes déterminés », a-t-il déclaré.