Pour la première fois, Romane, 10 ans, a pu manger du gâteau à l’occasion de son anniversaire. Ce n’est pas le cas de la plus jeune de ses sœurs, Lou, 2 ans. Les filles souffrent toutes deux du Sama, pour syndrome d’activation des mastocytes, provoquant une série de symptômes, notamment des douleurs chroniques et de la fatigue. Une maladie auto-immune récemment identifiée pour laquelle la recherche ne fait que commencer.
Opiniâtre pourrait être un euphémisme lorsqu’il s’agit de décrire le personnage de Lucie Aupetit, leur mère. Cette habitante d’Espiens, en plus de gérer un quotidien rythmé par la pathologie de ses enfants, a dû faire face à sept années d’errance médicale avant que son aîné ne soit diagnostiqué. Et doit faire face, aujourd’hui, à un refus de prendre en charge les plus jeunes. « Les gastropédiatres me disent que son cas est trop compliqué, ils ne veulent pas la suivre. C’est scandaleux. Voir son enfant souffrir et personne ne veut l’aider est terrible. »
Des crises terribles
Pour Romane, le salut est venu de l’hôpital Necker, et plus particulièrement du docteur Polivka, spécialiste des formes rares de mastocytose chez l’enfant. « Malheureusement, comme en France il n’y a pas de financement pour la recherche, elle est partie aux Etats-Unis », regrette Lucie Aupetit, au vu de l’amélioration des conditions de vie de sa fille, qu’elle aurait souhaité. pour son plus jeune. « Avant d’être diagnostiquées, les crises étaient terribles. Il y avait toujours quelque chose qui n’allait pas, le moindre virus devenait un enfer. Et quand c’est invisible, les gens ne comprennent pas à quel point c’est douloureux. J’ai entendu des gens dire que j’en faisais trop. Nous avons même fait l’objet d’une enquête sociale car ma fille était trop souvent aux urgences. Je me suis mis en colère contre les médecins qui ne parvenaient pas à trouver ce qui n’allait pas chez elle. Romane est la personne la plus courageuse que je connaisse. »
« Quand c’est invisible, les gens ne comprennent pas à quel point c’est douloureux. J’ai entendu des gens dire que j’en faisais trop. »
Chaque manifestation de la maladie – qu’il s’agisse de douleurs intestinales, de diarrhées, de vomissements, de cystite interstitielle, de démangeaisons, de congestion nasale, de maux de tête, de bouffées de chaleur, de difficultés de concentration – peut être provoquée par une série de facteurs déclenchants. , avant tout l’alimentation, mais aussi le stress, les médicaments, les températures élevées et même la fatigue.
À l’image de l’expérience des premières années de sa fille, paralysée par la douleur, Lucie Aupetit s’est retrouvée dans le livre de Marie Garin, « Personne ne m’a cru », après avoir traversé les mêmes vicissitudes avant qu’on reconnaisse enfin le Sama de son enfant.
Ingénieur de formation, tout comme son mari, Lucie Aupetit a fait beaucoup de recherches pour comprendre la maladie dont souffrait Romane, s’est abonnée à des revues médicales et a beaucoup parlé avec des familles vivant la même situation. « J’ai même envisagé de retourner aux études pour étudier la médecine. » Six mois après le début de son traitement, Romane est méconnaissable : « Elle n’a plus d’insomnie, a moins de problèmes de communication, même si l’errance médicale a entraîné des retards d’apprentissage. Elle commençait même parfois à se plaindre lorsqu’elle souffrait, car jusque-là, elle ne savait pas ce que c’était que de ne pas souffrir… »
Des informations claires et fiables
Lorsque les symptômes de Lou apparaissent, Lucie Aupetit a déjà l’expérience des adaptations à mettre en place. «Quand j’allaite, je ne mangeais que quatre aliments différents. Elle a déjà dû recevoir deux transfusions en raison d’une carence en fer. Je suis devenu spécialiste de la lecture des résultats d’analyse. Mais encore une fois, il a fallu se battre. Une fois, ma fille a failli s’évanouir à cause du Doliprane. Elle n’est pas allergique au paracétamol, mais à l’excipient. De ce fait, ses gélules doivent contenir uniquement le principe actif, et seule une pharmacie parisienne les fabrique. Comme personne ne veut la soigner ici, nous sommes allés voir un spécialiste en Belgique. Depuis qu’elle est soignée, elle a pris un peu de poids, elle joue, sourit, dit même qu’elle a faim. On dépense plus de 500 euros par mois en compléments alimentaires, mais au moins on essaie de soigner les conséquences sans pouvoir agir directement sur la cause », constate Lucie Aupetit, détaillant la charge mentale liée à l’alimentation, aux médicaments et à l’hygiène quotidienne.
La maman envisage de créer une association pour que les parents puissent « avoir des informations claires et fiables, proposer des formations et des interventions. Je veux que mes enfants aient un jour une vie normale. »