Victime d’un canular à l’US Open, Jules Marie veut porter plainte pour « marquer le coup »
Le Français a reçu mardi 20 août deux courriels lui annonçant qu’il pourrait participer au tournoi de qualification pour le Grand Chelem de New York, dont il rêvait. Les messages provenaient en réalité d’une personne anonyme qui se faisait passer pour le directeur du circuit afin de se venger.
Jules Marie en rêvait. Après avoir disputé les trois premiers tournois du Grand Chelem de l’année, le Français, classé 295e mondial, avait pour ambition de prendre part au tableau qualificatif de l’US Open.
Présent à New York depuis quelques jours, le Caennais de 32 ans a dû bénéficier d’un concours de circonstances, le forfait de deux joueurs, pour fouler les courts de Flushing Meadows.
Mardi 20 août, en début d’après-midi, il reçoit un mail lui indiquant que les conditions sont réunies, que deux joueurs sont indisponibles. Puis un deuxième, lui indiquant qu’il doit aller se préparer avant son match contre le Français Quentin Halys, prévu à 16 heures sur le court numéro 4.
Il ne l’apprendra que plus tard, mais il s’agissait d’un canular, orchestré par un anonyme se faisant passer pour le directeur de tournée de l’US Open.
Pouvez-vous revenir sur vos pas mardi et décrire comment vous avez vécu ces montagnes russes émotionnelles ?
« Après avoir reçu les mails, j’ai mis une surprise, j’ai posté sur Instagram l’affiche que j’avais prévue si j’étais entré en qualifications. J’ai mis les mails en story pour pouvoir annoncer qu’il y a deux forfaits et que je suis accepté. Je vais voir Baptiste, mon vidéaste. (…) Je lui montre le mail. Évidemment, grand sourire, grande joie, etc. Je rencontre un joueur (le Tunisien Aziz Dougaz, ndlr) qui est aussi remplaçant, comme moi, qui est quatrième. J’étais deuxième. Il me reste 2h30 avant le match. Entre-temps, Aziz Dougaz rencontre le manager du circuit ATP et lui dit qu’il y a eu deux forfaits, que Jules est revenu. »
« Je descends réserver un terrain d’entraînement. Et puis le tour manager entre. Il pose sa main sur mon épaule. Je lui fais un grand sourire. Et il me dit : « Jules, je suis désolé. Je ne sais pas ce qui s’est passé. Je ne sais pas qui t’a envoyé les mails mais ce n’était pas nous ». Au début, je ne le crois pas vraiment. Je pense qu’il plaisante. En fait, pas du tout. Je commence à comprendre que c’est vrai, qu’il n’y a pas deux packages. »
« Je commence à me rendre compte qu’à Wimbledon, j’étais dans la même situation. J’avais aussi reçu un mail, soi-disant de l’agent du joueur Gabriel Diallo, qui est Canadien, qui s’était blessé aux adducteurs et qui allait déclarer forfait le lendemain, ce qui me ferait gagner une place. En fait, cette chose était un canular et je me rends compte que ce que je vis est aussi un canular, que potentiellement, c’est le même gars. »
« J’envoie la capture d’écran à RomainNextGen. Il a un compte X et plus de 15 000 abonnés je crois. Il suit le circuit secondaire et donc il parle beaucoup de moi sur son compte. Je lui envoie ce mail et je lui dis que ce n’est absolument pas vrai, que c’est un hoax et que c’est le même mec que Wimbledon. »
« Et puis je reçois un troisième mail, avec RomainNextGen en copie. C’est le même logo, l’US Open, etc. Le mail dit que c’était un canular, que je dois demander à RomainNextGen pourquoi, que je ne jouerai pas ce soir. »
Quelle suite souhaitez-vous donner à cette affaire ?
« Je vais porter plainte. C’est la deuxième fois que le mec me fait ça. Il ne vit pas la même histoire que moi. C’est mon métier, ma passion. Je vis le tennis au quotidien. Je suis à fond dedans. J’ai radicalement changé de vie il y a deux ans et demi pour faire ça. C’était un de mes objectifs, participer à l’US Open, à quatre tournois du Grand Chelem. »
« Jouer avec les sentiments et les émotions des gens, ça ne se fait pas. C’est néfaste : préjudice moral et atteinte à l’image parce que j’ai posté sur Instagram que je jouais l’US Open. Et puis cyberharcèlement et usurpation d’identité. Ce qui s’est passé pour l’US Open, pour les proches de Gabriel Diallo. (…) L’US Open va m’envoyer une lettre disant qu’il y a eu usurpation d’identité. »
« Je vais porter plainte car je ne veux pas en rester là. Je veux que cela serve d’exemple à tous les cyberharceleurs qui agacent le monde. »
Dans son troisième courriel, l’auteur du canular affirme vouloir se venger. Savez-vous à quoi il fait référence ?
« Quand il m’a fait une blague à Wimbledon, juste après, ce type a écrit à RomainNextGen et a dit ‘j’ai fait une blague à Jules Marie’, pensant que Romain allait rire. (…) En fait, ils ont eu une petite dispute, une bagarre, des insultes, etc. Je pense que le type est très jeune. (…) C’est parce qu’il y a eu une dispute, une interaction un peu violente. D’où cette vengeance. »
« Puis il a dit des choses comme « La communauté RomainNextGen a proféré des menaces de mort et m’a envoyé des matières fécales ». Je suppose que non et Romain m’a assuré que ce n’était pas le cas. Cela n’a rien à voir avec moi non plus. »
Savez-vous qui se cache derrière ce canular ?
« Je n’en suis pas sûr à 100%. Je vais quand même me renseigner. J’ai parlé à un avocat au téléphone ce matin. On va écrire une lettre au procureur pour que ce soit pris au sérieux. (…) La police, dans un, deux, trois mois, saura vite de qui il s’agit. »
« Je veux savoir qui il est. Je veux voir son visage. Et je veux qu’il paie. S’il paie 500 dollars, je ne pense pas que je les accepterai. Je veux qu’il soit puni parce qu’il fait du cyberharcèlement, qu’il se fait passer pour quelqu’un d’autre et qu’il joue avec les émotions des gens. Je veux faire passer un message. »
Cette affaire est symptomatique du harcèlement subi par de nombreux joueurs sur le circuit…
« Il y a beaucoup de joueurs qui se font harceler en ligne par les parieurs après les matchs, des types comme ça. Dans cette histoire de canular, je ne sais pas si je suis un cas isolé ou pas. Si ça m’arrive, ça arrivera à d’autres et c’est peut-être déjà arrivé. »
« J’avais mis sur Instagram une fois ce qu’on m’avait envoyé par mail. Je l’avais mis parce que c’était très violent. On est régulièrement, je ne pense pas être le pire, harcelés par des clients, en général. »