L’élection présidentielle de dimanche prochain marquera-t-elle la fin de 25 ans de chavisme ? « Il y a un mouvement pour le changement. Ici, on demande le changement comme on demande de la nourriture », affirme Luis Salamanca, professeur à l’Université centrale du Venezuela.
Riche en pétrole, le pays a longtemps été l’un des plus riches d’Amérique latine. Aujourd’hui, il est exsangue et englué dans une crise économique sans précédent. Conséquence de la mauvaise gestion et de la corruption, la production pétrolière s’est effondrée. Le produit intérieur brut (PIB) a diminué de 80 % en dix ans avec une hyperinflation qui a contraint les autorités à dollariser partiellement l’économie. Les systèmes de santé et d’éducation sont dans un état de délabrement complet.
Un combat plus serré qu’il n’y paraît ?
Si les conditions de vote restent « normales », « il y aura une victoire extrêmement large de l’opposition », estime l’enseignant. C’est en tout cas ce que prédisent les sondages.
En fait, certains observateurs estiment que la lutte entre Nicolas Maduro, héritier de l’ancien président socialiste Hugo Chavez, décédé en 2013, et Edmundo Gonzalez Urrutia, ancien ambassadeur devenu par accident candidat de l’opposition unifiée, est bien plus serrée que ne le suggèrent les estimations, en l’absence d’un recensement récent de la population. Quelque 21 millions des 30 millions de Vénézuéliens sont appelés à choisir entre ces deux têtes d’affiche, les huit autres candidats étant anecdotiques.
Et logiquement, les observateurs sont unanimes (ou presque) à anticiper que plus la participation sera élevée, plus grandes seront les chances de victoire de l’opposition ; le président sortant, qui brigue un troisième mandat de six ans, ne peut guère espérer mobiliser au-delà de sa base, qui tourne autour de 30% dans les sondages.
A la veille du scrutin, la tension et l’incertitude régnaient. Et beaucoup craignent que Maduro, souvent qualifié de « dictateur » par l’opposition, ne tente de fausser le jeu après avoir multiplié les menaces. « L’avenir du Venezuela pour les 50 prochaines années se jouera le 28 juillet, entre un Venezuela de paix ou de violence. Paix ou guerre », a-t-il déclaré, évoquant un possible « bain de sang dans une guerre civile fratricide provoquée par les fascistes ».
Ses propos ont provoqué une réaction du président brésilien Lula et du président chilien Boric.
Menaces de violence après le vote
Rebecca Hanson, de l’Université de Floride, estime que des « violences après l’annonce des résultats » sont possibles. Elle souligne que les chances que Maduro, 61 ans, accepte de quitter le pouvoir sont « faibles ».
L’une des clés sera l’attitude de l’appareil de sécurité, pilier du pouvoir. Très critique, Edmundo González Urrutia, 74 ans, a signé une lettre ouverte à l’armée, très appréciée, dans laquelle il demande aux militaires de « respecter et de faire respecter » le résultat des élections.
« L’armée est loyale jusqu’à ce qu’elle cesse de l’être », rappelle un universitaire qui s’exprime sous couvert d’anonymat, citant l’ancien président Luis Herrera Campins (1979-1984). Il espère que la loyauté de l’armée envers le chavisme ne sera pas inébranlable.