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Une recette révolutionnaire pour créer du ciment sans émettre de CO₂

Le béton a changé la face du monde. Cela illustre son génie et sa folie. Depuis les Romains, elle a construit nos villes, nos ports, nos routes, au point de constituer le deuxième matériau le plus utilisé sur la planète, après l’eau. Mais, à l’ère du changement climatique, cela pèse terriblement sur notre empreinte carbone. Il représente à lui seul 7,5 % de toutes les émissions de CO.2. Pourtant, une équipe de l’université de Cambridge vient de mettre au point une méthode révolutionnaire pour concevoir le ciment, l’élément essentiel du béton mais aussi celui qui concentre tous ses maux. L’article qu’elle a publié jeudi 23 mai dans la revue Naturefait même la promesse d’un produit « zéro émission ».

La recette du béton moderne, dit béton « Portland », est bien connue : de l’eau, du sable, des cailloux et 15 % de ciment, qui lie le tout. Pour préparer cette dernière, un mélange de calcaire, d’argile et d’un peu de silice et d’aluminium est chauffé à 1 450°C. Une opération doublement coûteuse. Le calcaire s’y transforme en chaux et émet une quantité considérable de CO2. De plus, atteindre une telle température entraîne une consommation très élevée de matières fossiles. La recherche de produits de substitution n’a jamais cessé. Mais cela se heurte à leur disponibilité, à leur coût ou à l’efficacité de la recette finale.

La révolution proposée par l’équipe de Cambridge est née d’un défi entre Cyrille Dunant, chercheur suisse spécialisé dans le béton, et son collègue du département d’ingénierie Julian Allwood, plus familier avec l’acier. Le premier sait, pour l’avoir étudié, qu’on peut recycler le béton usagé à condition de le réchauffer à nouveau. La seconde a développé des fours à arc électrique, qui profitent de la conductivité du fer, pour fondre l’acier sans le chauffer et, là encore, le recycler. « Et si j’utilisais vos fourneaux pour fabriquer mon béton ? — Essayez-le ! »

Une nouvelle recette est née. Le béton dégradé est brièvement chauffé à 400°C, puis malaxé et tamisé. La poudre de ciment alors isolée est introduite dans le four à arc. D’une part, l’acier barbotant à 1 600°C apporte aux résidus de béton la chaleur dont ils ont besoin. En revanche, cette dernière apporte au métal la chaux nécessaire à son nettoyage. « Coup double »conclut Cyrille Dunant.

Pas de frais supplémentaires

Dans le four, deux liquides bien distincts apparaissent : au fond, de l’acier recyclé ; au-dessus, ce que les spécialistes appellent « le laitier », qu’il faudra simplement refroidir, broyer et enrichir d’un peu de gypse pour obtenir un nouveau ciment. Les chercheurs de Cambridge ont testé 28 formules différentes dans un four expérimental de l’Institute of Materials Processing de Middlesbrough. Ajoutez un peu d’aluminium, de fer ou même de bauxite ; remplacer une partie du ciment usagé par du sable. « Finalement, nous sommes arrivés à la conclusion que la meilleure recette était d’utiliser du ciment pur », conclut le chercheur suisse. Rien de tel que la simplicité.

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Ray Richard

Head of technical department in some websites, I have been in the field of electronic journalism for 12 years and I am interested in travel, trips and discovering the world of technology.
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