« Une libération de la parole est nécessaire, à l’image de ce qui a été fait pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles »
Les universités françaises n’ont pas été épargnées par l’onde de choc de la guerre entre Israël et le Hamas. Ils sont confrontés à une multiplication des actes antisémites et à de fortes tensions dans les débats autour du conflit israélo-palestinien. Président de l’association France Universités, Guillaume Gellé analyse ce dont l’université a besoin pour relever ce double défi et répond aux accusations de déni formulées par certains parlementaires.
Quelles ont été les répercussions du conflit Israël-Hamas sur les universités ?
Après l’attentat du 7 octobre 2023, on avait le sentiment que le nombre d’actes antisémites augmentait fortement. Nous avons organisé une enquête pour vérifier cela. Elle a révélé un doublement des actes d’antisémitisme dans les universités (67 actes depuis le 7 octobre), par rapport à l’année 2022-2023 (33 actes antisémites). Ce sont des abus inacceptables qui n’ont pas leur place sur nos campus. Mais rappelons que les universités ne sont pas en dehors de la société, elles souffrent des mêmes maux. Or, selon le Conseil représentatif des institutions juives de France, le nombre d’actes antisémites en France a quadruplé entre 2022 et 2023.
Dans une enquête commandée par l’Union des étudiants juifs de France en septembre 2023, 91 % des étudiants juifs déclaraient avoir subi des actes ou des propos antisémites au cours de leur scolarité. Pensez-vous qu’il y a un problème avec les rapports faisant état d’antisémitisme à l’université ?
Oui. Ce que l’on observe, c’est qu’en cas de problème, les étudiants ont plus tendance à se tourner vers des associations spécialisées que vers l’établissement universitaire. Nous devons changer cela. La liberté d’expression est nécessaire, à l’image de ce qui a été fait pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles.
Il faut proposer des dispositifs clairs, visibles, garantissant la confidentialité, qui permettent aux étudiants de signaler les actes ou propos antisémites et racistes dont ils pourraient être victimes. Sur ce point, je salue l’initiative de l’Université de Strasbourg qui a mis en place un système de reporting spécifique avec une cellule dédiée.
Nous demandons également d’avoir des canaux de communication directs avec le ministère de la Justice pour être plus efficaces. France Universités propose la nomination d’un représentant de l’enseignement supérieur et de la recherche pour chaque parquet. Actuellement, lorsque nous intentons une action en justice, nous n’avons pas forcément de retour. C’est un véritable handicap de convaincre les étudiants de se tourner vers nous.
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